Directrice des agences Alpha Conseil et Outremer Intérim (franchisé Randstad), Solange Agricole a établi, depuis vingt ans et dans quatre départements d’Outremer (Martinique, Guadeloupe, Guyane et Réunion), un service de conseil en ressources humaines spécialisé dans le recrutement et l’évaluation des compétences. Les personnes en recherche d’un CDI, d’un CDD ou d’un poste en intérim peuvent se tourner vers elle et ses collaborateurs pour dénicher le job qui leur convient. Mais il y aurait donc encore des postes à pourvoir ? On raconte pourtant que le chômage est endémique et inévitable… rien n’est moins sûr.

 

Vous semblez passionnée par votre métier, cela se remarque de suite…

Je l’adore ! Participer au développement économique des départements d’Outremer, dénicher des talents, résoudre des problèmes… c’est gratifiant et passionnant à la fois. Cela me vient de loin puisque j’ai suivi à l’origine une formation en sociologie, puis en gestion du personnel et en ingénierie des ressources humaines. Dans cette branche, on n’a réellement accès qu’aux aspects positifs de ce métier, et ça me convient très bien ! (rires)

 

La demande et la recherche d’emploi sont-elles fortes dans les départements d’Outremer ?

Les gens sont avant tout en recherche de conseils et de bons réseaux pour les guider vers des projets ou des entreprises fiables. Plutôt que de diffuser eux-mêmes leur CV, de démarcher, de galérer en somme, ils préfèrent passer par une agence de conseil en recrutement qui délivre un accompagnement personnalisé. Du côté des chefs d’entreprises, recruter coûte cher et peut avoir certaines conséquences négatives sur leur société, donc ils se sécurisent en passant par une agence spécialisée.

 

Où en est le recrutement global en cette première partie d’année ?

2013, contrairement à 2012, est une année difficile, plus frileuse, plus prudente. Si l’intérim est florissant, c’est malheureusement un concept non pérenne. La prudence explique cette situation, bien que cela aille à l’encontre des principes mêmes de l’entreprenariat qui consiste à s’engager, à essayer, à prendre des risques… Les recruteurs sont désormais plus durs à convaincre, ils recherchent clairement « la merveille », et s’en passent s’ils ne la trouvent pas. L’acte de recrutement ne s’enclenche que lors de la rencontre avec un candidat vraiment exceptionnel. Les entreprises misent plutôt sur la polyvalence de leurs membres, quand elles ne renoncent pas tout simplement au projet. Les effets de la crise mondiale sont très nets.

 

Votre pronostic pour les prochaines années est-il ensoleillé malgré tout ?

Nous n’avons pas encore dit notre dernier mot pour 2013. Le dynamisme de l’emploi symbolise la réussite économique d’une région. Le déblocage de la situation aux AG passera par la recherche de talents et le développement de la qualité.

 

Où se cachent donc les « merveilles » tant désirées ?

On les recherche partout, mais elles se font rares, au vu des critères toujours plus exigeants des entreprises. Les talents sont très mobiles partout dans les DOM, ils saisissent les opportunités où elles se trouvent… Nos clients sont situés sur les quatre départements avec des postes à pourvoir sur place. Les chefs d’entreprise ont une préférence pour les domiens ayant travaillé ailleurs et qui souhaitent revenir dans leur département d’origine. Nos chargés de recherche ont donc pour mission prioritaire d’aller dénicher les candidats potentiels partout via les réseaux sociaux, les écoles, les associations sportives ou culturelles… Nous créons des liens avec la diaspora domienne afin de leur proposer des projets sur leur territoire de naissance.

 

Quels sont les secteurs d’activité où la recherche est la plus conséquente ?

Le bâtiment de haut niveau, c’est à dire des métiers très spécialisés (ingénieurs béton, structure, projeteurs…) La grande distribution également : la société de consommation est très active et les grandes surfaces florissantes. Les experts dans ces deux grands domaines sont activement demandés pour des CDI.

 

Comment expliquez-vous en partie le taux de chômage si élevé de nos départements ?

La formation est sans doute insuffisante : on ne trouve pas localement les profils recherchés. Et quand ils existent, il est souvent ardu de les garder ou de les faire revenir. Les spécialistes sont attirés uniquement par de beaux projets d’envergure, ou bien ils préfèrent revenir pour travailler dans le secteur public.

Je constate hélas que les gens ne sont pas assez fiers de leur métier. Les candidats sont de plus en plus exigeants vis à vis de leur employeur, certaines réactions sont parfois surprenantes : il faut savoir que 30% des offres proposées sont rejetées par le chercheur d’emploi lui-même… Les candidats n’acceptent pas tout et n’importe quoi, ils n’ont pas encore franchi le cap du « un emploi à tout prix ». Ce qui n’a rien de critiquable bien entendu, mais qui freine en partie le développement.

 

Quelles sont les exigences mutuelles des chercheurs d’emploi comme des recruteurs ?

Les demandes ont beaucoup évolué ces dix dernières années. Le salarié aime qu’on vienne à lui, il souhaite être sollicité. Le travail n’est plus véritablement perçu comme source de plaisir, d’épanouissement personnel ou de valorisation sociale : c’est une simple source de revenus pour laquelle il n’est pas toujours nécessaire de se donner du mal si elle n’est pas assez attrayante. Les recruteurs quant à eux jouent la carte de la prudence et de la polyvalence. Ils ont des projets mais ne se lancent pas sans la garantie d’avoir embauché LE talent adéquat. Ils veulent les meilleurs ou rien. Sur des petits territoires comme les nôtres, c’est encore plus compliqué… Le travail existe bel et bien mais d’un côté comme de l’autre les prises de décisions sont très lentes et les engagements difficiles à prendre.