La carrière de zoukeuse dans laquelle sont enfermées les chanteuses antillaises, Rachelle Allison n’en veut pas. Elle est pourtant repérée très tôt Rachelle, et s’essaie au micro du studio Rose-Marie Debs de Pointe-à-Pitre sur des mélodies entendues. Mais rapidement la demoiselle sort des rangs, quitte à surprendre. Rachelle propose autre chose, son style à elle est urbain, fait corps avec dancehall, trap, R&B et urban pop. Elle façonne une musique authentique qui lui ressemble sans concession. Telle est sa définition de la liberté. 

Par Julie Clerc

Basse-terrienne, passionnée par la musique depuis l’âge de six ans – lorsqu’elle prend le micro dans une église dominiquaise – mademoiselle Allison n’omet pas la case études pour décrocher à Aix-en-Provence un diplôme de contrôleur de gestion. Ceci fait, cap sur Paris où la musique la rattrape avec la complicité de figures qui longtemps la suivront : le designer Arno Gadjard et le technicien audiovisuel Mike Saint-Auret, avec lesquels elle monte le groupe ENIGM. Ensemble, ils font de la Guadeloupéenne l’une des premières artistes émergeant sur le Net, avec son premier single « Sur tes lèvres » (qui fait sensation en paradant longtemps à la deuxième place du Top Hit de la radio RCI) et une première mixtape intitulée « La rêveuse ». Un titre qu’elle expliquera lors d’interviews comme une autocritique, clin d’œil aux déceptions vécues au fil de ses expériences musicales. L’album rassemble plus d’une douzaine de remix de ses titres les plus en vogue cette année-là. Rachelle y est dans son élément, balance entre R&B et reggae.

Rachelle se fait remarquer et les premières collaborations s’enchainent. Pas des moindres. Skyzo, manageur du groupe Jutsu, lui propose un duo avec Keros-n. Avec lui, elle réalise le titre « Tchenbé mwen » issu de la 2e mixtape de Rachelle nommée « Vices et Vertus ». » Pour le titre “Lotus Love”, c’est avec Admiral T qu’elle collabore.

Le succès est immédiat, et se propage. En 2013, c’est la consécration. A 24 ans, la chanteuse obtient le titre de Révélation de l’année 2013 aux Hit Lokal Awards. Rachelle tourne en boucle sur NRJ Guadeloupe et Tropiques FM, en Métropole. Mais elle ne perd pas la tête. La jeune artiste n’est pas une machine à tubes, elle a aussi des messages à faire passer, comme l’atteste son titre « Echo », hommage aux femmes antillaises en forme d’injonction à aimer ce qu’elles sont, leur identité, leur peau, leur chevelure. Un engagement palpable aussi dans son dernier single « Caribbean », qui prend aux tripes comme un hymne à l’unité et à la tolérance sur une instru hybride rap, pop et hip hop. « Je demande aux Antillais de se serrer les coudes. Il y a suffisamment de barrières dans ce monde pour en rajouter entre nous », plaide-t-elle. « La chanson est en créole haïtien. J’ai voulu honorer ce peuple meurtri qui tient encore debout et dont je déplore qu’il soit tant stigmatisé en Guadeloupe », ajoute la chanteuse.

Elle a une idole Rachelle, ou peut-être est-ce simplement un modèle : Rihanna. « Sa musique est différente, elle me parle. Elle mêle dancehall, pop et électro : les Américains se permettent d’essayer plusieurs styles. Cette liberté artistique, voilà ce que j’aime chez elle ! », lâche la jeune femme qui peut se vanter, aux Antilles, d’avoir réussi à mettre la lumière

sur le dancehall féminin francophone. Son avenir musical s’écrit jour après jour. « Je fredonne, je crée un flow, une mélodie, et je pose des mots dessus », raconte-t-elle. Elle avoue : « J’aimerais mêler ma voix à celle d’un rappeur ». L’incisif Nekfeu pourrait être cet élu. Depuis peu, Rachelle a retrouvé son île natale et prépare un nouvel album, qu’on attend avec impatience.

Henri Debs & Fils

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