Guy Polet, le président du Medef de Guyane, fait le point sur les retombées économiques futures liées à l’exploitation du pétrole. Et livre son inquiétude quant au risque de déstabilisation du territoire. 

Caribamag : Du pétrole a donc été découvert au large de la Guyane. A quelles retombées économiques peut-on s’attendre ?

Guy polet : Deux opérations de confirmation doivent encore avoir lieu en 2012 mais il s’agirait d’un gisement qui devrait fournir entre 1.200 et 2.400 barils par jour d’un pétrole de très bonne qualité, à la différence notamment du pétrole vénézuélien qui est l’un des pires du continent américain.

L’exploitation devrait ainsi rapporter aux alentours de 4 milliards d’euros par an, sur une durée de 25 ans. Sur cette somme, environ un quart reviendra aux concessionnaires. C’est donc près de 3 milliards d’euros qui seront reversés à l’État français chaque année.

Comment la manne dégagée peut-elle bénéficier au territoire guyanais ?

Nous devons prendre en compte deux aspects. D’un côté, le développement logistique, avec la construction d’un terminal pétrolier au niveau du port pour l’acheminement du brut. Cela implique la construction de pipelines et de tout le matériel nécessaire à l’acheminement du carburant depuis et vers la plateforme. De l’autre côté, il faut une vision politique pour un retour local. Et c’est à l’État français de faire ce travail. Les quelques 3 milliards d’euros qui seront reversés chaque année doivent servir à structurer le territoire par la réalisation de routes, le développement du numérique et des systèmes de production d’énergie etc. Ils doivent aussi servir à subventionner d’autres filières comme le bois, la pêche ou l’industrie agro-alimentaire.

Et en termes d’emploi ?

Selon les estimations, autour de 1.500 emplois directs et indirects seront générés, dont au moins un millier accessibles localement dans les domaines du transport, de l’hôtellerie, de la restauration, de la sécurité, etc.

Le prix à la pompe sera-t-il revu à la baisse ?

Il ne faut pas s’y méprendre, le prix à la pompe ne va pas changer pour les Guyanais. Parce qu’il n’y aura pas de raffinerie construite en Guyane mais aussi parce que le prix du carburant est le même en tout point du territoire français.

Comment intégrer les entreprises locales au développement lié à l’exploitation du pétrole ?

C’est aux entreprises guyanaises de s’accaparer les marchés, quitte à mettre en place des partenariats avec des entreprises européennes. J’ai envie de dire aux Guyanais : tenez-vous prêts car lorsque l’on appuiera sur le bouton « ON », il faudra être là. Vous connaissez beaucoup de pays avec de l’or vert, de l’or jaune, et maintenant de l’or noir ? Le Brésil est de ceux-là et c’est aussi pour cette raison qu’il est aujourd’hui l’une des grandes puissances émergentes. La Guyane a le même jeu à jouer. Les Guyanais ne peuvent pas se considérer comme spectateurs, ils doivent s’engager.

Vous semblez inquiet toutefois…

Oui, parce qu’une question demeure : comment ce territoire français pourra-t-il résister à des stratégies malsaines de certains groupuscules, indépendantistes notamment ? Comment empêcher certains de faire miroiter la population, en leur disant que la Guyane peut être indépendante et vivre comme le Koweït ? Parce qu’il est très facile de déstabiliser un espace qui regroupe à peine 200.000 personnes. Le grand danger est là ! Nous étions tranquilles avant. Aujourd’hui, nous sommes inquiets.