Trois générations d’accros

A l’heure de l’e-réputation, à l’heure où la notoriété d’une marque peut aussi se mesurer au nombre de fans qu’elle possède sur Facebook, le cas de Floup a quelque chose d’irrationnel. La page non officielle du berlingot glacé Made in Martinique rassemble près de cent trente mille fans répartis entre les Antilles et la métropole, un chiffre colossal au regard du marché très “limité” de la marque : Martinique, Guadeloupe, Guyane, Nouvelle-Calédonie depuis peu, ainsi qu’un seul distributeur dans l’Hexagone…

Mais qu’est-ce que Floup a donc de si spécial pour faire l’unanimité autour de son nom, inspiré pourtant d’une onomatopée créole désignant une chute aussi rapide qu’inattendue : “C’est tombé à terre, floup !”

Bien sûr, c’est avant tout le goût des Antilles dans un emballage de 125 ml que l’on peut mordiller, déchirer avant d’en aspirer le précieux nectar. Floup c’est aussi une gamme très diversifiée : Floup au sirop, Floup au lait – idéal pour les cantines – ou Floup au jus de fruits. Au total, c’est une multitude de parfums, repérables par des couleurs vives et variées, qui compte plus de dix-huit références et qui se consomme depuis trois générations aux Antilles.

Pourtant, né dans les années 1970, Floup était vendu à l’origine à température ambiante. Et celui qui n’était pas encore devenu la glace la plus célèbre des Antilles françaises était alors produit dans l’usine du soda “Super” à Saint Joseph en Martinique… et livré à l’état liquide ! Dès le rachat de la marque par Antilles Glaces, les normes sanitaires venaient d’être mises en place : les Floup seraient désormais livrés congelés après pasteurisation prêts à déguster dans de jolies fourgonnettes. Et elle est certainement là, la clé du développement commercial de la marque. “Au départ, lorsqu’une boutique souhaitait proposer des Floup à ses clients, on lui offrait un congélateur pour les garder bien au frais, souligne Valérie Ladieu, directrice générale de la société Antilles Glaces. C’est ce qui a permis de faire “rentrer” Floup dans la majeure partie des boutiques de Martinique, puis de Guadeloupe et de Guyane“.

En l’espace d’une génération, Floup est ainsi devenu l’un des produits les plus identitaires des Antilles. Il s’appuie sur le souvenir des moins jeunes et sur l’adhésion des plus petits. Il s’est affirmé comme un produit transgénérationnel dont la notoriété est aussi motivée par une certaine forme de nostalgie. Nostalgie des anciens aux Antilles, mais aussi et surtout, nostalgie des Antillais de France et de Navarre à qui le berlingot glacé rappelle invariablement la douceur des îles et qui ravive chez eux les souvenirs de leur enfance.

Pour François Dabas, directeur commercial d’Antilles Glaces, “la force de Floup, c’est aussi son prix : 60 centimes. Quand les enfants sortent de l’école et qu’ils ont un peu de monnaie dans leur poche, que peuvent-ils acheter avec 60 centimes ? Pas grand chose hormis peut-être quelques friandises…

Ancré durablement dans la culture antillaise, quelque part entre le sorbet coco dominical et le Royal Soda, Floup continue aujourd’hui de surfer sur la vague de son succès en élargissant régulièrement sa palette de parfums : des goûts locaux, chocolat, ananas ou encore pinacolada, mais aussi des goûts internationaux, des goûts d’aujourd’hui comme “bubble gum” ou “cola” par exemple.

Et si certaines mauvais langues argueront que le succès de Floup a été rendu possible par l’absence d’une concurrence réelle, une vieille affiche publicitaire est là pour le rappeler “Sur les vrais, c’est écrit Floup”.