« Etablir une relation gagnant-gagnant entre les Antilles françaises et les autres îles de la Caraïbe, sans complexe de supériorité»

« Le but est de sortir du champ institutionnel pour rentrer dans l’opérationnel »

 

 ICFC : Apprendre, donner et recevoir  

La directrice de l’Institut de Coopération Franco-Caraïbe, Lydia Barfleur, a fait de la coopération son cheval de bataille. Pour nous, elle revient sur les missions de l’ICFC et livre quelques pistes de réflexion pour améliorer les relations entre les îles de la Caraïbe.  

L’ICFC est assez méconnu finalement. Pouvez-vous nous présenter cet institut ?

Il s’agit d’une association loi 1901 créée en 1973 et qui avait pour mission à l’origine de développer des liens autour des domaines de la culture et du sport. Compte tenu de l’indépendance de nombreux territoires à la fin des années 1970, la coopération s’est étendue à de nouveaux domaines : santé, formation, développement économique, accompagnement des entreprises à l’export…

Comment faire en sorte de rendre plus concrète la coopération dans la Caraïbe ?

Il faut tout d’abord identifier les partenaires clés, fidéliser des partenariats et enfin, établir une relation gagnant-gagnant entre les Antilles françaises et les autres îles de la Caraïbe, sans complexe de supériorité… et faire émerger des projets de coopération pour les deux territoires, entre les deux acteurs. Dans ce cadre, nous sollicitons régulièrement le programme Interreg et le Fonds de Coopération Régionale (FCR).

Les actions de coopération ne pâtissent-elles pas d’un déficit en termes de communication ?

Le constat général, c’est qu’il existe un déficit d’information en termes de coopération régionale, surtout au niveau des différents secteurs, des différentes niches. Aussi, nous avons décidé de mettre en place la lettre d’information électronique de la Caraïbe, destinée au monde de l’entreprise, secteur par secteur. Ainsi, les chefs d’entreprises peuvent se tenir informés vis-à-vis des secteurs qui les intéressent (boulangerie, BTP, etc.). Parce que les chefs d’entreprises n’ont pas toujours le temps de se renseigner. Il existe un vrai intérêt pour ce genre d’information pratique. Dès février 2012, nous avons également pris le relais de la CCI et de la Région en organisant des petits-déjeuners débat sur l’international. Le but est de sortir du champ institutionnel pour rentrer dans l’opérationnel en prenant soin d’organiser ces débats autour de secteurs porteurs. En 2012, nous allons aussi créer un annuaire de la coopération et des régions afin d’accompagner les porteurs de projets à l’export.

La coopération doit aussi être un vecteur de solidarité, notamment vis-à-vis d’Haïti…

Oui. L’ICFC est l’organisme qui a été désigné par les différents acteurs pour percevoir les fonds dédiés à la reconstruction d’Haïti. Ainsi, c’est plus d’un million d’euros qui ont été confiés à l’ICFC dans le but de participer à l’effort de reconstruction. La construction du lycée des Régions de France a été rendue possible, la maîtrise d’ouvrage étant confiée au Conseil Général de Guadeloupe. Nous aidons aussi à la reconstruction de l’hôpital français d’Haïti, avec une participation à hauteur de 250.000 euros.

Pourquoi a-t-il fallu attendre si longtemps pour voir la coopération régionale se construire ?

Plusieurs raisons à cela. Il y a bien sûr le poids de l’histoire, les Antilles françaises étant plus tournées vers la France et l’Europe, tandis que dans les anciennes colonies britanniques la réalité est bien différente : la Jamaïque et Trinidad-et-Tobago sont devenues indépendantes en 1962, la Dominique en 1976… Ceci dit, on ne pouvait aller plus longtemps à l’encontre de la réalité géographique, de notre proximité culturelle avec nos voisins. Si cette participation n’est pas encore institutionnelle, elle existe dans de nombreux domaines (art, culture, sport…)

Qu’est-ce qui freine encore aujourd’hui la coopération dans la Caraïbe ?

Il y a bien sûr le problème de la langue, le problème d’obtention de visas. Par exemple, un Antiguais qui veut venir en Guadeloupe doit passer par Trinidad-et-Tobago ou la Barbade pour obtenir un visa. Il y a aussi le problème des transports, notamment aériens, entre les différents territoires de la Caraïbe. Mais les mentalités sont en train de bouger… L’Europe ne s’est pas faite en un jour ! La connaissance des autres prend du temps, les choses se mettent en place doucement. Certains programmes comme Interreg ont aussi accéléré le mouvement. On est là pour apprendre, on est là pour donner, on est là pour recevoir également