La Guadeloupe à l’heure de l’envol ?

Nous avons rencontré Mme Borel-Lincertin, Présidente nouvellement élue du Conseil Régional de Guadeloupe et Présidente du Comité du Tourisme. Cela a été l’occasion de faire un tour de la situation touristique des îles de Guadeloupe. Un entretien riche et convivial.

Pour commencer, quelle est la conjoncture actuelle de l’activité touristique en Guadeloupe ?

Le tourisme en Guadeloupe est bien portant aujourd’hui même si l’ensemble demeure encore assez fragile. On peut dire que, naturellement, la Guadeloupe possède des atouts exceptionnels qui la placent comme une destination “cœur de cible” parmi les destinations de la Caraïbe. En revanche, bien que sa signature « archipel de découvertes » ai remporté un réel succès, elle souffre encore  d’un déficit de différenciation au sein du marché des destinations soleil plage. N’oublions pas, en effet, que le tourisme est une industrie très concurrentielle. Dans ce concert des destinations soleil, vous devez faire émerger vos atouts de façon simple en vous basant sur des avantages que n’ont pas vos concurrents mais que recherche votre clientèle. Il en est de même pour tout produit de consommation courante. Bien sûr, le prix constitue un élément important du choix mais il n’en est pas forcément la composante principale. En réalité quand votre produit séduit, le prix ne compte plus.

 

Quel bilan peut-on faire de l’année 2011 ? Quelles sont les attentes pour 2012 ?

Nous avons réalisé une progression sensible en 2011 sur le tourisme de séjour comme sur le secteur de la croisière. On peut même parler d’année record car en 2011, la Guadeloupe a accueilli plus de touristes de séjour qu’en 2008, l’année de référence (soit avant 2009, ndlr). Pour la croisière, les chiffres sont aussi très bons puisque nous avons eu deux fois plus de croisiéristes qu’en 2010. Et en 2012/2013, nous allons à nouveau multiplier par deux nos résultats, soit plus de 300.000 croisiéristes. Avant de dépasser, je l’espère, la barre des 400.000 l’année suivante…

 

Que faut-il entreprendre pour que l’activité touristique décolle réellement ?

En premier lieu, nous devons travailler aujourd’hui pour que l’image de la Guadeloupe ne soit plus détériorée. Les tour-opérateurs et les agents de voyage sont très vigilants sur ce point. En 2009, nous avions connu une chute phénoménale des touristes de séjour, de l’ordre de -20% !

Deuxièmement, nous devons faire évoluer cette perception de notre destination afin de parvenir à l’émergence d’une véritable marque « les îles de Guadeloupe » en adéquation avec nos forces.

Enfin, il faut poursuivre les efforts sur les infrastructures notamment en rénovant nos hôtels, en créant de nouveaux établissements, et en mettant en place de grands chantiers touristiques comme l’Aquarium du Gosier ou le Memorial Act (futur Musée de l’esclavage de Pointe-à-Pitre, ndlr). Si on parvient à poursuivre cette politique d’amélioration de l’offre, on pourra poursuivre sur notre dynamique. D’autant plus qu’il s’agit d’un élément à croiser avec le fait que nous disposerons d’une offre de sièges aériens plus importante d’ici la fin de l’année. Notre rôle est donc de fixer la demande et de la faire progresser dans le sens de nos objectifs.

 

Comment la Guadeloupe se positionne-t-elle au niveau de la Caraïbe ?

Aujourd’hui, notre positionnement est clairement archipélagique. Il s’agit d’une image construite il y a une dizaine d’années et qui continue de prendre de l’ampleur.

Nous possédons chacun des atouts de nos voisins, avec des rivières magnifiques comme celles de la  Dominique, des plages de sable fin comme à Barbade ou aux Bahamas, un piton, aux Saintes, un peu comme à Sainte-Lucie, ou encore un parc national comme El Yunque, à Porto-Rico. A quelques exceptions bien sûr : nous n’avons pas de grottes avec des stalagmites comme celles que l’on trouve à la Barbade par exemple… Ainsi, en Guadeloupe, sur un territoire multiple, on peut passer de la mer à la montagne, de la randonnée à la plongée sous-marine et évoluer au sein de sites d’une beauté inouïe.

 

Peut-on imaginer concurrencer les destination-phares comme la République Dominicaine ou  Sainte-Lucie?

La question est la suivante : comment profiter au mieux du dynamisme de certains pays de la Caraïbe, des destinations qui sont inondées de touristes américains -notamment à Porto Rico ou en Jamaïque, anglais -à Barbade ou Sainte-Lucie, et français. Il faut développer le tourisme multi-destinations même si le problème du transport entre nos îles continue de se poser.

 

Qu’est-ce que la Guadeloupe a en plus que ses voisins ?

Nous avons l’authenticité, un côté peut-être un peu plus “roots”, l’âme d’un peuple avec des traditions bien vivantes… Par exemple, les touristes aiment manger dans les petits restaurants le midi, pour une dizaine d’euros. Riz, haricots rouges, poisson, ils mangent comme les Guadeloupéens. Ce genre de choses, très importantes, font partie des atouts de la destination Guadeloupe, comme les vendeurs d’eau de coco ou le sorbet tourné à la main… Il faut aujourd’hui le faire savoir.

Il faut aussi noter notre capacité à accepter les contraintes liées à la préservation de l’environnement, comme c’est le cas avec la Réserve naturelle de la Désirade, la seule dans les DOM, ou encore Petite-Terre et ses requins-citron. Un groupe de scientifiques internationaux doit d’ailleurs venir prochainement pour tenter de comprendre pourquoi les requins-citron sont revenus à Petite-Terre, alors qu’en général, ils ne reviennent pas sur un site qu’ils ont délaissé auparavant. Nous assistons à la reconstruction d’un écosystème, comme avec les tortues. A nous d’en récolter les fruits aussi.

 

Un mot sur le tourisme d’affaire. Pourquoi
peine-t-il à se
développer ?

 

Le tourisme d’affaire représente 10% des séjours. Cependant, ce n’est pas quelque chose de permanent, il manque des infrastructures comme un Palais des Congrès. La Guadeloupe est plutôt une destination de “conventions”, pour l’Assemblée générale de certaines entreprises par exemple.

Se pose aussi le problème des visas à l’échelle de la Caraïbe.

Par contre, la Guadeloupe connait une multiplication d’événements avec le plus populaire d’entre eux, la Route du Rhum, mais aussi la Karujet, le festival de Jazz « Terre de Blues » à Marie-Galante, le Tour cycliste ou encore la Fête des Cuisinières…