Réélue le 4 novembre à la tête de la CCISM, Angèle Dormoy a réuni en une seule liste tous les acteurs économiques du territoire. Des chefs d’entreprise, de Quartier d’Orléans jusqu’à Terres Basses, de tous secteurs confondus. Déterminée, elle souhaite, plus que tout, relancer l’économie du territoire.

Angèle Dormoy, CCI Saint-Martin
Angèle Dormoy

« Nous allons renforcer notre présence auprès des socioprofessionnels en les accompagnant mieux dans leur parcours de création et leur business model et en développant une offre de formation qualifiante. »

Quelle sera votre feuille de route pour les cinq ans à venir de votre mandat ?

Nous souhaitons, avant toute chose, nous moderniser. Nous passons à la dématérialisation de nos services afin de rendre le chef d’entreprise plus autonome. La pandémie nous a obligés à revoir notre communication, en allant plus vers le virtuel.

Nous allons également renforcer notre présence auprès des socioprofessionnels en les accompagnant mieux dans leur parcours de création et leur business model. Aussi, et j’y suis attachée, nous devons développer une offre de formation qualifiante à destination des porteurs de projets en leur proposant des outils plus performants.

Comment se portent les 8 400 entreprises du territoire après ces dernières années particulièrement difficiles ?

Elles se portent mal. Certaines ont réussi à tirer leur épingle du jeu, comme le BTP après Irma. Dernièrement, celles du tourisme commençaient à bien reprendre, mais c’était sans compter sur les blocages de fin d’année ainsi que la hausse des cas de Covid.

En matière de création, pour l’année 2021, nous sommes à 468, contre 449 en 2020. Il est vraiment primordial, aujourd’hui, de soutenir les entreprises qui ont connu Irma, les tensions du PPRN, la pandémie… Elles ont des salariés, nous devons nous donner les moyens de les protéger. Nous avons constaté seulement 212 radiations en 2021 contre 216 en 2020.

« Nous allons travailler avec la Collectivité pour mettre en place un « Smart Business Act », qui consiste à privilégier au moins 30 % des marchés pour les TPE. »

Que proposez-vous pour les entreprises qui souhaitent se projeter vers l’avenir ?

Saint-Martin est un territoire qui donne envie d’y croire. Les chefs d’entreprise ont du potentiel. Nous allons travailler avec la Collectivité pour mettre en place un « Smart Business Act », qui consiste à privilégier au moins 30 % des marchés pour les TPE. Il existe aussi des dispositifs d’accompagnement pour les entreprises qui permettent de sauver des emplois et des entreprises. Je pense notamment à CARE, la Cellule d’Accompagnement à la Régularisation des Entreprises pour des problèmes d’ordre fiscaux ou sociaux.

Vous avez pour projet de créer des pépinières d’entreprises, pouvez-vous nous en dire plus ?

C’est un projet au stade de financement, que nous espérons concrétiser dans les prochains mois. Chaque pépinière abritera une trentaine d’entreprises, réunies par thématiques, et permettra à quelqu’un de s’essayer à la gestion d’entreprises. Nous avons une forte demande.

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Avec franchise, le président de la FIPCOM, Michel Vogel, dresse un bilan sur la situation économique du territoire. Selon lui, le vivre ensemble n’est pas « à promouvoir, il est déjà la normalité du quotidien ».

Michel Vogel, président FIPCOM - Saint-Martin
Michel Vogel

Quel regard portez-vous sur l’économie saint-martinoise ?

Nous connaissons, depuis quatre ans, une succession de catastrophes. Irma nous a profondément fragilisés. Il a fallu deux ans pour mettre en place un plan de relance. Et derrière, le Covid arrive. Moralité : les difficultés des entreprises, au niveau trésorerie, sont importantes. Les chefs d’entreprise gardent cependant le moral et essayent de repartir malgré les charges et les impôts. Depuis quatre ans, la situation est en stand-by, nous attendons tous le rebond. Si cette situation perdure encore longtemps, cela va profondément changer notre société et il nous faudra trouver une autre source de financement que le tourisme.

« Si cette situation perdure encore longtemps, cela va profondément changer notre société et il nous faudra trouver une autre source de financement que le tourisme. »

Des petits déjeuners de l’entrepreneur sont organisés au sein de votre fédération, quelle est leur vocation ?

Cela permet de se retrouver et, en ce moment, c’est important. Nous discutons, apprenons à nous connaître, échangeons avec les autorités présentes. Les chefs d’entreprise exposent leurs difficultés, émettent des pistes de sortie de crise. On se rend compte que beaucoup ont été bloqués à la maison avec la pandémie, le télétravail est impossible… et donc, ils baissent la voilure.

« Je constate que beaucoup cherchent des lieux de regroupement, de partage. Sans ces ouvertures de lieux de rencontre, le vivre ensemble risque de ne rester qu’une expression vide de sens. »

Que vous inspire le vivre ensemble à Saint-Martin ?

Saint-Martin doit se projeter dans son avenir en s’appuyant sur la richesse de sa population. Car, le vivre ensemble est clairement modifié. L’apport d’une clientèle européenne a modifié la donne. Il y a vingt ans, tout le monde se connaissait, les relations étaient plus fraternelles entre les communautés. Aujourd’hui, je constate que le tissu ne se mélange pas. Chaque ethnie reste entre elle, par habitude culturelle je pense.

Je vis à Saint-Martin depuis vingt-huit ans, j’ai côtoyé bien des résidents, des Saint-Martinois de souche, d’adoption, de cœur… Je constate que beaucoup cherchent des lieux de regroupement, de partage. Notre Collectivité doit en créer, en commençant par les tout-petits. Je note avec plaisir que dernièrement les terrains de street workout ont été remis en état. Sans ces ouvertures de lieux de rencontre, le vivre ensemble risque de ne rester qu’une expression vide de sens.

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