Si l’entreprise familiale peut relever du challenge, pour la famille Yang, cela semble être une affaire bien rodée. Une juste mesure entre les liens affectifs et professionnels, voilà sans doute, selon Alice Yang, gérante de l’activité, la clé de la réussite.

Depuis combien de temps fonctionne votre restaurant ?

L’entreprise familiale en restauration a débuté en 2008, juste après notre déménagement de la métropole vers la Guyane, dans le village de Cacao.

 

Comment vous est venue l’idée du restaurant familial ?

Cette idée nous est venue un peu par surprise. Un cousin possédait la place de marché, mais avait décidé après plusieurs années d’activité de céder l’emplacement. J’étais alors en Guyane pour des vacances avec mon fils et ma fille ainée et nos idées d’y vivre étaient encore très vagues. Après avoir entendu cette nouvelle, mon mari et moi avions décidé de succéder au cousin, pensant qu’une entreprise de ce genre assurait les bases d’un bon déménagement puisqu’elle permettait à toute la famille d’avoir un job le week-end pour commencer.

 

Qui fait quoi ?

Nous travaillons à cinq tous les dimanches. Mon mari et moi-même occupons les postes de cuisiniers, tandis que mon deuxième fils de 28 ans, qui est aussi agriculteur, gère la partie service avec son petit frère de 15 ans. Enfin, l’épouse du second nous aide pour les fritures et les entrées en cuisine.

 

Comment parvenez-vous à conjuguer relations professionnelles et familiales ?

Au départ, il était difficile de concilier travail et aspects sentimentaux. Petit à petit, une organisation s’installe, régie par certaines règles de fonctionnement. Il faut savoir faire la part des choses, ce n’est pas parce que l’on hausse un peu le ton pour accélérer la cadence que tout cela s’en ressent hors activité. À la fin du service, tout le monde comprend bien que c’était dans le cadre du travail, et seulement dans ce contexte, que les mésententes (assez rares) ont eu lieu. Tout le monde doit se comporter en adulte et chaque membre de l’activité a appris à s’adapter à autrui en restauration.

 

Justement, quels sont les bons côtés et quelles peuvent être les difficultés rencontrées ?

La différence notable se situe dans la synchronisation de nos efforts, liés justement à cette organisation bien calibrée. Chez nous, chaque seconde de retard compte et on le voit notamment par rapport à la concurrence qui, par défaut d’organisation, s’emmêle parfois les pinceaux. Nous sommes les moins bien lotis en terme d’emplacement, il nous manque 4 ou 5 mètres par rapport à tous nos concurrents, nos places sont les plus étroites et notre espace de travail réduit. Mais force est de constater que malgré tout ces désavantages, notre organisation et notre souci de qualité nous amènent à avoir presque toujours plus d’affluence. Nous sommes une sorte de locomotive que tout le monde observe, cherchant à en comprendre le fonctionnement. Parallèlement à cela, notre plus grande difficulté serait la mise aux normes de nos emplacements, ne serait-ce que pour avoir de l’eau et des plans de travail irréprochables… et puis cette activité reste de la restauration rapide, donc dans le feu de l’action on perd toujours en qualité. On dit souvent à nos clients qu’on pourrait faire une restauration d’un meilleur niveau, bien installés à la maison. Ceci dit, la restauration sur place et la restauration rapide sont deux orientations différentes.

 

Comment concevez-vous l’avenir de votre entreprise ? Avez-vous d’autres projets en famille ?

Pour le moment, l’activité de restauration reste figée ainsi, surtout que tout appartient à la Mairie, donc peu d’évolutions sont envisageables. À long terme nous allons poursuivre en agriculture du côté de Montsinery-Tonnegrande, où nous possédons 13 hectares. Mon second fils et sa femme souhaitent nous épauler. J’ai encore le désir de faire de la restauration, peut être qu’un jour cela fera partie d’un atelier « agritourisme » avec service de carbets. Ce qui est sûr, c’est que nous aurons laissé notre trace à Cacao le jour de notre départ, notamment en contribuant à rehausser le niveau général de la restauration du village et en rappelant certaines valeurs culinaires parfois oubliées.