François Duforez est Expert APM-CPM et Professeur de médecine. Une double qualification qui fait de lui un spécialiste incontesté des remèdes et conseils à prodiguer aux chefs d’entreprises hypersollicités, en état de stress quasi permanent, dans l’univers éminemment concurrentiel et chronophage qui est le nôtre aujourd’hui. Rencontre.. 

 

Tout a été dit ou presque sur la forme du dirigeant. Que peux-ton dire de réellement créatif sur ce sujet ?

François Duforez : Bien entendu, nous ne serons pas très créatifs en disant aux dirigeants d’entreprise qu’il est nécessaire de faire du sport et d’entretenir leur forme. Il est aujourd’hui certain, d’une certitude prouvée, qu’il n’y a pas d’efficacité professionnelle, et qu’il n’y a pas de performance sans forme physique et psychologique.

Ce qui est aujourd’hui nouveau, c’est que notre technologie évolue de façon extraordinaire, alors que nos gènes humains n’ont pas bougé depuis 200 000 ans. La rupture technologique actuelle avec les NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication), pose donc des questions nouvelles sur la cellule cérébrale et notre capacité à « endurer » dans un monde où tout va très vite. « J’ai les nerfs à fleur de peau », « j’en ai plein le dos », « laissez-moi souffler une seconde…. » sont des expressions de notre quotidien, qui traduisent symboliquement, de façon physiologique, les difficultés ressenties par le cerveau.

Ces expressions se vérifient lorsqu’on étudie les zones du cerveau qui sont activées au moment où le ressenti physiologique apparaît. La question qui se pose n’est donc pas la question de la forme du dirigeant, mais bien celle de son rythme de vie et de sa performance.

 

En votre qualité de chef de clinique associé au centre du sommeil de l’Hôtel-Dieu de Paris, que conseillez-vous aux dirigeants qui viennent vous voir ? Ont-ils des spécificités ?

Oui, clairement. On retrouve d’ailleurs ces spécificités dans le monde du sport de haut niveau : l’ultra-compétitivité, l’aspect quantifiable des performances, la globalité et la complexité des actions, l’extrême sensibilité au temps, la nécessité d’équipes multi-métiers, l’aspect primordial de la technologie, des investissements financiers conséquents.

Tous ces paramètres demandent de savoir gérer les temps forts… et les temps faibles. Le rythme de vie professionnelle d’un dirigeant est aussi saccadé qu’un tour de piste de F1. Sa vigilance est donc régulièrement mise à l’épreuve, alors même qu’il ne lui est plus possible d’être constamment vigilant.

 

Alors, comment trouver le bon équilibre ?

Passons rapidement sur le fait qu’il faille maintenir une activité physique régulière, qui “a du sens”. Le sens vient de ce que l’on trouve quelque chose qui fasse aussi du bien au cerveau. Il est tout aussi important de dire aux dirigeants de retrouver leurs rythmes biologiques : appétit, sommeil, détente musculaire, énergie mentale. D’apprendre à se fixer des priorités, en se concentrant sur des objectifs précis.

Et puis faire preuve d’un réalisme optimiste. Je crois que ce qu’un dirigeant doit apprendre à faire assez tôt s’il veut « durer », c’est de relativiser l’importance des sollicitations qui sont les siennes. « Vous n’êtes pas, à chaque fois, attaqués par une bête sauvage qui met votre vie en péril » est la phrase que je sors souvent aux dirigeants qui passent me rendre une petite visite.