11 février 2014. C’est la consternation dans le monde institutionnel ultra-marin. La Cour des comptes vient de publier son rapport annuel, et y consacre tout un chapitre sur les stratégies touristiques de Guadeloupe, Martinique et La Réunion. Le jugement est sévère, la réception amère. Les sages de la cour en appellent à plus d’innovation, de rapidité et de pertinence dans les stratégies locales. Les élus, en retour, défendent leurs plans d’action et leur vision.

Cet épiphénomène est symptomatique de la situation de nos territoires qui, depuis de longues décennies, cherchent à définir et à communiquer clairement sur une identité touristique propre.

L’enjeu sous-jacent est d’arriver à sortir d’un tourisme balnéaire milieu de gamme, datant des années 60, qui ne rapporte plus. Cette recherche d’un nouveau tourisme, plus moderne, plus efficace, plus rentable, passe par une exploration systématique des pistes disponibles : tourisme vert, croisières, sportif, culturel…

Parmi toutes ces options, le tourisme d’affaires apparaît comme un segment complémentaire indispensable à toute stratégie pérenne. Il représente 20% du marché du tourisme national. La France est l’un des leaders en Europe sur le marché des congrès. Des acteurs majeurs spécialisés existent, tels que Carlson Wagonlit ou American Express. Une déclinaison de cette expertise nationale peut-elle être envisagée aux Antilles-Guyane ? Quelle est l’opportunité de ce marché ?

Nous avons rencontré certains des acteurs majeurs de ce segment en Martinique, Guadeloupe et Guyane. Ils témoignent d’une envie de développer ce segment, d’une expertise locale qui intègre les spécificités de nos régions, et d’une énergie forte.

“Mon ambition est de faire venir des Trinidadiens, des Barbadiens, d’être attractif à travers toute la Caraïbe”, édicte en vision Sonia Remus, fondatrice d’un centre de séminaire et de formation en Martinique. L’ambition de nos entrepreneurs est l’essence du secteur. C’est en se projetant au-delà de nos frontières, en prenant en compte notre environnement et ses opportunités, que le secteur peut s’imaginer.

Ce sont aussi par des lieux exceptionnels, tout à la fois authentiques et uniques, que nous pouvons faire la différence. “Au-delà des 10 millions d’euros que nous allons investir pour la rénovation de notre établissement, c’est un engagement quotidien que nous menons, pour la qualité et le service”, nous explique Catherine Cadrot, directrice de l’Auberge de la Vieille Tour au Gosier, en Guadeloupe. Son établissement est l’un des fleurons du groupe Accor, très largement dédié au tourisme d’affaires et qui résiste à la morosité du secteur.

Le Conseil économique et social a souligné, dans un rapport datant de 2007, les atouts de l’Outre-mer pour le tourisme d’affaires. Il exhortait déjà l’Outre-mer à les mettre en valeur. Chacun à sa façon. “Le Meeting Industry est une partie de réponse au problème de saisonnalité”, disait, en 2011, Karine Roy-Camille, présidente du Comité Martiniquais du Tourisme. Complément, palliatif, voire cheval de Troie en Martinique et en Guadeloupe, il est fondateur en Guyane. En effet, dans un territoire où le tourisme pèse presque deux fois moins dans le PIB que la moyenne nationale, le tourisme d’affaires représente 51% des revenus du secteur. Peut-être que le tourisme de loisirs de la Guyane est aussi à aller chercher du côté des fusées, plutôt que des plages ou même de la nature. À la Réunion, la concurrence avec l’île Maurice sur ce segment est compliquée. Une approche particulière est à développer.

Différents défis, une même opportunité : inventer le tourisme de demain, l’investir, le faire prospérer. Un défi à la hauteur de nos territoires.

 

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