C’est un jeune monsieur de 93 ans qui nous ouvre la porte de son atelier de Fort-de-France. Julien Ponceau nous invite dans son espace comblé d’œuvres, de meubles, d’outils … Comment résumer tout cet investissement artistique à quelques pièces sans faire injure à son auteur ? 

 

Julien Ponceau

Un grand buste de Frantz Fanon retient pourtant l’attention. Et puis, le regard se pose sur des chaises de style directoire, des bas-reliefs, des coffrets en marqueterie, des gouges, des racloirs, des rinceaux, des ornementations, des consoles Louis XVI, un style qui malgré la longueur de sa carrière conserve encore sa prédilection.

Si la poussière s’est posée, il suffit d’un souffle pour révéler une esquisse ou le relief d’un gabarit. De nombreuses sculptures de nus émaillent l’atelier, dont une pièce remarquable que l’auteur garde depuis 1949. Sur l’établi, repose une vierge en cours de restauration qu’un prêtre a récemment confiée aux mains de l’artiste. Et dressés contre un mur, impressionnants, quatre panneaux d’une face de salon d’époque sont en cours de fabrication.Trompe-l’œil édifiants, chutes de fleurs, coquilles et guirlandes d’ornements, volutes…

Que de talent. Que de passion. Que d’heures de travail. Que de souvenirs semblent incrustés dans cette cet antre ! Mais aussi que de modestie de la part de cet artiste qui n’a de cesse de ressusciter les courbes et les plis de pièces d’antiquités, dans le respect de la main et de savoir-faire ancestraux. Son travail transcende les limites entre art et ar tisanat.

D’un des tiroirs d’une console dorée, Julien Ponceau sort un catalogue Arcade Sotheby’s où figurent son nom et certaines de ses œuvres, vendues aux enchères par cette société célèbre.

 

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Capture d’écran 2014-12-17 à 23.35.48Avec des yeux souriants mais mouillés, il évoque son parcours peu banal et les personnalités qui l’ont conduit au summum de son succès.

Après une enfance difficile à Fort-de-France où ses amis s’appellent Frantz Fanon et Aimé Césaire, il prend le bateau en 1946 pour l’Amérique. A New York, il suit des cours au Pratt Institute et à l’école d’architecture Cooper-Union. Peu de temps après la fin de ses études, il entre chez un célèbre restaurateur d’antiquités, Elario Scothery. Mais c’est plutôt sa rencontre avec James Amster qui sera déterminante puisqu’il le convainc d’ouvrir son propre atelier d’art. C’est là qu’il sculpte et restaure des pièces rares. Son nom commence à être connu et reconnu par des personnalités comme Marlène Dietrich, Greta Garbo ou encore Winthrop Rockefeller qui lui confient la décoration de leur intérieur. Il collabore également avec l’architecte Boutros Boutros Ghali à la réalisation de boiseries d’une salle à manger Louis XVI ou encore, il crée des pièces vénitiennes d’époque pour l’acteur Henry Fonda. Dans les années 60, lors de la révolution Noire aux Etats-Unis, il rencontre des musiciens emblématiques de jazz comme Count Basie ainsi que des membres du Black Panther Party pour qui Fanon et Césaire étaient des demi-dieux.

Après 37 ans, Julien Ponceau regagne son île natale où il poursuit aujourd’hui encore son œuvre. Récemment, sa sculpture du buste d’Aimé Césaire a été sélectionnée pour figurer à l’aéroport du Lamentin. Une œuvre monumentale en hommage à son ami.

 

 

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