Responsable d’une société d’import-export depuis plus de trente ans en Guyane, Renaud Mortemard évoque les exigences auxquelles doit faire face un entrepreneur. Dans un secteur d’activité contraignant légalement, il nous livre ses méthodes pour ne pas se laisser envahir par les aléas de son métier…

En tant que dirigeant d’entreprise, quelle est votre vision de l’entrepreneuriat en Guyane ?

Renaud Mortemard : L’entrepreneuriat est, avant tout, un état d’esprit. C’est vouloir être son propre patron et accepter les risques inhérents à cette responsabilité. Or, nous sommes géographiquement éloignés des sources d’approvisionnement, sur un marché intérieur restreint et dans un tissu économique en majorité composé de TPE (très petites entreprises) ; trois facteurs pouvant endiguer la réalisation de projets.

De plus, nous sommes en fin de la chaîne logistique au niveau des approvisionnements en marchandises, que ce soient des matières premières pour l’industrie ou des produits finis pour les distributeurs. Ces difficultés impliquent une anticipation permanente, et une surveillance rigoureuse ; par la force des choses, pour entreprendre en Guyane, il faut être polyvalent !

Quelles sont les qualités que doit posséder un chef d’entreprise actuellement ? 

Un bon chef d’entreprise doit être optimiste, courageux et persévérant. C’est souvent seul qu’il doit faire face à toutes les difficultés financières, administratives et techniques qui se présentent inéluctablement. Il doit aussi savoir gérer les hommes, parce qu’une entreprise est une somme d’individus et que ses collaborateurs en sont la première richesse.

Transmettre l’esprit d’équipe et faire en sorte que chacun avance dans la même direction, relèvent en partie de la res-ponsabilité du dirigeant et de sa gestion des ressources humaines.

Il doit également être à l’écoute et anticiper les changements qui se produisent sur son marché, pour rester en adéquation avec sa clientèle.

Si la formation en école supérieure de commerce ou de gestion est un avantage certain, ce n’est pas une condition sine qua non, me semble-t-il, aujourd’hui.

En revanche, savoir s’entourer de collaborateurs compétents ou encore apprendre à déléguer selon les niveaux de compétences me semble figurer au nombre des atouts nécessaires que doit posséder un dirigeant pour faire évoluer son entreprise.

Comment s’est développée votre entreprise depuis sa création ?

Sideg-Mortemard est née en 1985, de la fusion de deux entreprises qui composent son nom actuel : SIDEG, créée par René CUSSON, qui distribuait une célèbre marque de whisky, et la société MORTEMARD, qui distribuait deux marques de cigarettes.

En 1987, nous avons commencé une activité de distribution de produits d’entretien qui s’est très vite développée et nous a rapidement contraints à déménager du centre-ville vers la zone industrielle et commerciale Collery, en 1992. Puis, nous avons étendu notre activité avec les vins, les champagnes ainsi qu’avec les rhums. Nous avons également fait évoluer la société en S.A. (société anonyme) et avons profité du passage à l’euro pour augmenter le capital social. En 2003, nous avons cédé notre activité de produits d’entretien à une filiale installée à Cogneau Larivot, et avons ajouté un département BNA (boissons non alcoolisées, jus de fruits, et une boisson énergisante).

Notre dernière mise sur le marché concerne une petite activité bières avec, notamment, un produit de Saint-Domingue. Nous continuons de diversifier notre offre de produits de qualité régulièrement, afin de répondre aux attentes de nos clients. Ce dynamisme nous a permis de doubler notre chiffre d’affaires tous les dix ans.

Quelles peuvent être les contraintes liées à votre secteur d’activité et comment les déjouez-vous? 

Structurellement, nous avons des contraintes très importantes, au niveau des douanes et des contributions indirectes. En tant que grossistes, nous avons des dépôts sous douanes, et ceci nous oblige à une gestion très précise et contraignante. Nous avons aussi un rôle de collecteur de ta-xes sur les tabacs et les alcools, avec des cautions illimitées en durée et en valeur, ce qui n’est pas toujours de nature à favoriser un sommeil serein !

Le développement de la grande distribution a été favorable, et nous travaillons aujourd’hui avec l’ensemble du commerce de détail, ainsi qu’avec le secteur des cafés-hôtels-restaurants et celui des stations-service. Nous espérons ainsi poursuivre nos efforts en vue d’apporter un service cohérent à nos clients, mais aussi à nos fournisseurs dont nous assurons la promotion des marques.