La voile traditionnelle est bien plus qu’une simple pratique sportive, elle représente une des richesses patrimoniales du peuple martiniquais. Véritable référence culturelle pour l’ensemble de la population, la yole ronde constitue en fait un vecteur d’identité. Et chaque année, le Tour des yoles suscite un fervent engouement auprès des Martiniquais. Décryptage du phénomène avec Malik Duranty, sociologue.
Où trouve-t-on les racines d’un tel engouement pour le Tour des yoles ?
Malik Duranty : Les racines se trouvent certainement dans la genèse même de cette pratique. A l’origine, ce sont des pêcheurs qui ont organisé des jubilés, des rencontres, des courses dans les communes de l’île. Au fil des temps, ils vont créer une communauté d’intérêt autour de la yole. D’abord familial, ensuite territorial, cet engouement va se généraliser à l’île toute entière. Au centre du phénomène, les yoleurs, ces gens qui bravent la mer, qui se mettent en danger, qui domptent l’océan et, par là même, qui portent une valeur héroïque. On les admire… Il faut aussi considérer le sens du mot “Tour”. A l’échelle géographique et dans l’imaginaire, faire le tour de Martinique représente une expédition, un défi, surtout sur la mer dont le Martiniquais s’est longtemps tenu éloigné. Pourtant, l’océan représente un vaste espace de liberté, même s’il a été, à une époque, un espace de mort. Le rapprochement avec la mer est donc propice à la recomposition d’une identité. La yole fait exister les Martiniquais. Pas étonnant, dès lors, qu’ils veuillent préserver, développer, valoriser, s’approprier ce produit typique, devenu symbole d’une Martinique active, énergique, unique.
Peut-on voir la yole comme un élément fédérateur d’une société ?
Oui, dans l’embarcation, les yoleurs sont tous unis dans la même force, en harmonie parfaite entre eux et avec leur outil qu’est la yole. Dans la symbolique, elle a valeur de rassemblement, qui signifie “être ensemble”, faire corps, être en accord et rester complémentaires. Placement, déplacement, regards, paroles… Autant de mouvements et de signes indispensables pour que l’ensemble puisse avancer, pour emmener l’équipage vers la victoire. Car cette finalité est primordiale : il faut arriver au but ensemble. La victoire est un encensement de la traversée. Pour la plus grande satisfaction du public et des yoleurs, il faut finir le tour, réaliser cette traversée. Enfin, le Tour des yoles porte des valeurs telles que la solidarité, l’authenticité, la performance humaine. événement intergénérationnel, il est un vecteur de transmission, d’apprentissage et de professionnalisation, des anciens vers les plus jeunes.
Et puis, le Tour ouvre un espace alternatif aux Martiniquais. Il crée des rencontres, permet aux familles de se retrouver, de se déplacer ensemble. Un peu comme avant, dans Lakou, où chaque génération va trouver son environnement propre, où manifester son autonomie et exercer sa liberté relationnelle avec d’autres, tout en sachant qu’elle peut se rapprocher du reste de la famille, du noyau dur, à tout moment. C’est un rendez-vous éminemment fédérateur, et comme le disent certains, la yole ronde est le ciment du peuple martiniquais.
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