Aujourd’hui, environ 58% des Français sont propriétaires de leur logement. On est toujours bien loin des 70% annoncés par Nicolas Sarkozy en 2007 qui souhaitait une France « où chacun pourra accéder à la propriété de son logement ». Non seulement nous en restons éloignés, mais les familles les plus modestes restent écartées de l’accès à la propriété. Du reste, la Loi sur le crédit d’impôt qui avait coûté à la collectivité nationale 249 millions en 2008 et presque 3 milliards en 2010 a été… supprimée !

Par Emmanuel Versini, Cabinet Expertis

Première remarque : la proportion de Français propriétaires est stable depuis 2010. Sommes-nous arrivés à un seuil infranchissable ou les acteurs du marché et les pouvoirs publics n’ont-ils pas su innover en la matière ? Toujours est-il que plus personne ne parle d’une France de propriétaires. Et que l’on se contente d’analyser ce qui est (tous les mois, un analyste quelconque, s’auto-proclamant « autorisé » vient nous dire, sans que cela n’intéresse plus personne, que ça baisse, que ça monte…) et jamais ce qui pourrait être, si tant est qu’on se donne un peu de mal et qu’on y réfléchisse. Et le souhait de l’État cette année de baisser les « aides à la pierre » n’arrange rien, évidemment.
Quelques chiffres disponibles pour faire (vite) le tour :
– La proportion de propriétaires par département est inégale : environ 70% dans le Finistère, 60% en Guadeloupe et 33% à Paris. Et cela ne surprendra personne, la Creuse a un taux élevé de propriétaires dû au fait que les prix au m² sont faibles (qui voudrait s’y installer…).
– La proportion de propriétaires s’applique à un parc immobilier d’environ 34 millions de logements dont 83% sont des résidences principales, 9% des résidences secondaires et le reste des logements vacants. En Guadeloupe, sur environ 210 000 logements (dont ¾ de maisons et ¼ d’appartements), 79% sont des résidences principales, 7% des résidences secondaires, et le reste des logements vacants.
– Le propriétaire type a toujours plus de 50 ans, vit en couple et finance son acquisition par un prêt immobilier. La plupart n’a qu’une résidence principale et pas de résidence secondaire.
– Le ménage jeune ou modeste privilégie les livrets d’épargne (un peu d’humour grinçant !!! même si c’est
exact).
– Le budget consacré au logement moyen s’établit autour de 11 000 euros l’an (travaux, charges et impôts).
– Vieillissement de la population oblige, 70% des propriétaires n’ont plus de crédits à rembourser (chiffres 2014).
– Le salaire net médian en France établi à 1 772 euros (INSEE, chiffres 2013) signifie donc, concrètement, que la moitié des actifs gagne moins que cela…
– Le patrimoine brut médian des retraités (174 000 euros en 2010) était supérieur de 16% à celui des actifs. Leur patrimoine financier (actions, obligations) plus élevé de 70% et celui immobilier de 20%.
– Le patrimoine des Français a été fixé à 10 414 milliards fin 2013, en majorité constitué par des actifs immobiliers.
– Un peu plus d’un million de sociétés civiles immobilières majoritairement patrimoniales sur le territoire national.
– 42 milliards d’aides (global) mentionnés par le journal les Échos fin 2014 dont 18 environ servent à aider directement les propriétaires et les locataires.

Restent les Français qui n’ont aucun patrimoine (du tout !). Nous ne revenons pas ici (politiquement incorrect) sur la proportion de logements vacants (34 000 000 x 8% = environ 2,7 millions) à l’heure où, selon le 20ème rapport de la Fondation Abbé Pierre (2015), 3,5 millions de personnes en France sont « mal logées », 1,8 million attend un logement social et 24 000 autres viendront se greffer sur ces chiffres.

Sacrée France…