Associer toutes les forces vives de l’archipel (élus, socioprofessionnels, corps intermédiaires, associations, jeunes…) au dialogue nécessaire à l’élaboration d’une politique de développement durable en Guadeloupe, tel est le socle de réflexions, d’initiatives et d’actions concertées qu’entend impulser et accompagner Ary Chalus, le président de Région. Explications motivées.

Par Daniel Rollé

Comment les éco-développeurs, dont vous appelez de vos vœux les actions concertées, peuvent-ils compter sur l’Exécutif régional que vous présidez afin de construire, de manière contrète les étapes de ce véritable “contrat collectif de confiance” et un avenir économique meilleur ?

Ary Chalus : Ces entreprises, ces éco-développeurs d’avenir, partagent avec la Région un but commun : faire face au défi collectif qu’est la gestion de notre environnement, en produisant des biens et des services destinés à mesurer, prévenir, limiter ou corriger les atteintes à l’environnement.

Nous avions, je veux le rappeler à considérer deux exigences fondamentales :

– Intégrer, d’une part, les effets de la loi sur la “Nouvelle Organisation Territoriale de la République” (la fameuse loi NOTRé, fondatrice des nouvelles régions, au périmètre élargi notamment en matière de développement économique) et assumer les missions nouvelles qui ont été confiées à la collectivité régionale ;

–  Exercer pleinement, d’autre part, l’autorité de gestion des fonds européens.

Dans ces deux domaines, la performance est une obligation pour un développement durable et équilibré de notre archipel. Toutes nos actions doivent donc démontrer, à tous les instants, y compris aux éco-développeurs, notre capacité à agir en fonction de ces deux exigences.

Voilà donc lancé, le “grand chantier” collectif d’éco-développement partagé pour 2017, à vos yeux ?

L’année 2017 s’inscrira tout naturellement dans le prolongement de cette nouvelle impulsion que nous avons su donner à notre collectivité. Nous voyons grand pour notre archipel. Faut-il encore rappeler que celui-ci possède, entre autres atouts, plusieurs façades maritimes ouvertes sur différentes parties du monde ?

Dans ce contexte, et pour valider durablement l’objectif collectif à assumer, il est plus que jamais nécessaire de se recentrer sur le développement économique et l’appui aux entreprises. Nous n’agissons pas uniquement pour créer de la richesse ; nous agissons pour que tous les Guadeloupéens aient les moyens de vivre dignement, grâce au fruit de leur travail. C’est au travers de la création d’emplois privés que nous sortirons du chômage de masse.

La richesse “durable” suppose naturellement une adhésion la plus large possible à un fonds commun d’initiatives et d’actions. À ce titre, notre jeunesse est notre principal atout. Comment impliquer l’ensemble des “forces vives”, jeunesse comprise, en faveur par exemple d’une relance concertée de notre secteur agricole, y compris en repositionnant ce secteur vers l’export ?

La création de richesse durable est une œuvre collective et la croissance économique doit être mise au service de l’épanouissement des Guadeloupéens. De tous les Guadeloupéens, jeunes comme moins jeunes.

À l’heure où la conjoncture est marquée par les incertitudes, ponctuées d’une recrudescence de faits de violences et d’incivilité, l’expertise que possèdent nos “éco-développeurs” dans leurs activités, devrait nous permettre d’anticiper de nombreux problèmes avant même qu’ils ne s’aggravent.

Notre développement doit s’appuyer d’abord sur nos atouts. Tous nos atouts. Sur une agriculture que nous voulons bien-sûr durable, au premier chef, tout en accompagnant nos agriculteurs à la conquête des marchés à plus forte valeur ajoutée. Nourrir notre population et exporter nos produits est un défi que nous devons relever, tout en préservant nos ressources naturelles pour les générations futures. Ensemble, commençons à semer les graines d’une agriculture durable pour que ces générations futures puissent travailler dignement et s’alimenter sainement.

Notre biodiversité recèle de véritables trésors, tout comme l’aménagement de notre littoral. La planification agricole constitue un facteur de cohésion spatiale et surtout une source de croissance verte et bleue.

La Guadeloupe a été une puissance agricole, elle doit le redevenir !

Autre secteur sensible et pourtant potentiellement “porteur” d’emplois en milieux insulaires : la pêche. Comment l’Exécutif régional entend-il encourager la résistance désespérée des professionnels à la lente mais réelle déshérence des productions halieutiques locales ?

Il est aujourd’hui démontré que la production des pêcheries de la Caraïbe – ce n’est pas qu’une réalité locale – diminue globalement depuis ces dernières années. Elle se situe à un niveau insuffisant par rapport à la demande de nos populations. Et cela bien que, de façon générale, nous ne consommions pas suffisamment de produits halieutiques frais et locaux. Les facteurs expliquant cette diminution sont nombreux, et quelquefois complexes. Le secteur de la pêche doit donc faire face à un immense défi : nourrir notre population tout en préservant nos ressources naturelles pour les générations futures. Nos actions en faveur de la pêche visent spécifiquement à : garantir la sécurité alimentaire, contribuer à la souveraineté alimentaire, maintenir le niveau de l’emploi. Nous le démontrerons sur le terrain…

S’agissant de notre précieuse dimension archipélagique, comment comptez-vous encourager la synergie d’actions pour une croissance durable entre les grandes îles du “continent” (Grande-Terre et Basse-Terre) et les “dépendances du Sud” (Marie-Galante, les Saintes, la Désirade), en proie à une double insularité souvent préjudiciable à l’emploi de proximité ?

Notre majorité régionale a, dès son arrivée, voulu marquer son attachement à l’équité territoriale en soulignant notre vision pour les îles. L’usage qui a voulu qu’on parle de “dépendances” marque précisément les limites d’un mode de pensée avec lequel nous avons définitivement rompu. Nos îles du Sud ne doivent plus jamais être les parents pauvres de l’action régionale. Pour nous, il s’agira, en pleine concertation avec tous les Guadeloupéens, d’engager nos îles dans une spirale vertueuse pour en faire des “territoires durables”.

Pour accompagner cette “croissance verte”, ce développement durable intégré, la montée en puissance de l’économie digitale, très sensible dans les communications mobiles, est déjà prise en compte par la Région Guadeloupe dans ses actions en faveur d’une transition numérique au service de tous. Dans quels domaines et pour quelles perspectives en matière de développement et d’emploi ?

Nous sommes, en effet, hautement convaincus qu’il faut favoriser l’émergence des usages numériques car ils peuvent contribuer efficacement à l’édification d’une société plus durable, plus solidaire.

La télé-médecine, la télé-assistance seront, dès demain, au service de nos aînés directement chez eux, à domicile !

Aujourd’hui déjà, nous communiquons avec nos proches, où qu’ils soient dans le monde. Cette proximité sans précédent est aussi une formidable opportunité pour faire connaître au monde entier nos produits, nos savoir-faire ou encore les joyaux de notre riche patrimoine culturel et naturel.

Demain, notre mobilité s’appuiera sur notre capacité à organiser, de manière cohérente, une offre de transport multimodale s’appuyant sur un flux continu d’informations géo-localisées, pouvant atteindre chaque usager.

Demain encore, notre énergie sera produite au niveau de chaque bâtiment et à partir de ressources endogènes qui, de plus, sont renouvelables. Là aussi, les réseaux numériques permettront un fonctionnement efficient et durable de notre mix énergétique.

Grâce à cette transition numérique et à ses multiples opportunités, nous pourrons créer des emplois durables et localisés en Guadeloupe.