Il a pris ses fonctions le 1er janvier et succède à Jamil Houda. Maître Bernard Pancrel, stature altière et regard perçant, affiche un charisme naturel. Sa nomination comme chef de l’ordre des avocats allait de soi. Démonstration.

Propos recueillis par Julie Clerc

Quel parcours amène à ce point d’orgue ?

Bernard Pancrel : Il est long et passionnant. Après des études de droit à l’ex UAG puis à Paris 2, je valide deux années de master et deux DEA, en droit des affaires et droit communautaire, et deviens maître assistant de droit privé à Paris 10 et Paris 1. Je prête serment à la cour d’appel de Paris en 1991 puis rallie la Guadeloupe où j’exerce comme collaborateur du bâtonnier Jean-Yves Bélaye. En 1994, à 32 ans, j’endosse les fonctions de président fondateur de l’UJA (Union des Jeunes Avocats) de Guadeloupe. Dès lors, je m’installe à mon compte. Mes domaines d’ activité dominante  : droit bancaire, droit pénal des affaires, droit des étrangers, mais aussi droit administratif, domaine sur lequel je me concentre depuis, soucieux de mettre mes compétences au service des collectivités.

Pourquoi avez-vous présenté votre candidature au  barreau de la Guadeloupe ?

D’abord, c’est le prolongement de mon engagement en faveur de ma profession, qui fut syndical d’abord, lorsque j’étais membre de l’UAJ de Paris puis Seine Saint Denis. En 2015, je deviens conseiller régional auprès d’Ary Chalus. En 2016, ce sont des amis confrères qui m’ont persuadé que je ferais un bon candidat au barreau de la Guadeloupe.

Ma motivation principale est ce sens de l’altérité qui me pousse à aller au-delà de mes intérêts personnels : tout ce que je réalise aujourd’hui est entrepris en faveur du collectif. Si on vous demande d’exercer des responsabilités, il faut les prendre à bras le corps.

A quoi devez-vous votre succès ?

A une part de séduction bien sûr ! Tous les deux ans, un bâtonnier est élu par ses pairs – un collège électoral de plus de 300 avocats. Il n’est pas rééligible. Depuis fin décembre 2015, nous étions trois candidats à mener campagne.

Mon parcours professionnel a aussi beaucoup convaincu. De plus, j’étais dans une dynamique électorale. Je venais de rencontrer un certain succès lors de l’élection régionale, peut-être qu’on me considère comme un fin stratège.

Quel est le rôle du bâtonnier ?

C’est le chef de l’ordre professionnel des avocats. En tant que bâtonnier, je préside un conseil de l’ordre d’une vingtaine de membres. Le bâtonnier pilote l’ordre selon un programme soumis à ses pairs lors de sa campagne. C’est le chef du personnel administratif de l’ordre et le président de la CARPA (Caisse des Règlements Pécuniaires des Avocats). Il peut, en outre, saisir le conseil de discipline en cas de manquement de la part d’un avocat.

Quelles répercussions cette nomination a-t-elle sur votre vie professionnelle ?

Si les responsabilités de bâtonnier compliquent l’activité professionnelle, elles sont bénéfiques car elles permettent de prendre du recul. Je traite au quotidien des dizaines de réclamations émanant de clients. Certaines sont fondées, d’autres pas. Parfois c’est juste un problème de communication. Moralement, je suis tenu d’y répondre, et l’avocat mis en cause également.

Vos projets en tant que bâtonnier ?

Le 13 décembre dernier, au MACTe, lors de la transmission du bâton, j’ai fait part de mon vœu d’œuvrer en faveur de l’accès au droit en favorisant l’installation de confrères dans les communes hors agglomérations. Nous devons tous avoir un avocat près de chez nous. J’ai aussi à cœur de développer les relations de l’ordre des avocats avec le centre départemental de l’accès au droit (CDAD) de Basse-Terre, ainsi qu’avec les PAD (points d’accès au droit) et les maisons de la citoyenneté. Développer l’accès au droit, c’est permette aux gens de se renseigner gratuitement.

Je souhaite aussi que les collectivités puissent avoir recours systématiquement à nous, ce qui peut leur éviter des écueils judiciaires. En outre, je veux travailler à faciliter l’accès au service judiciaire, faisant ainsi écho au service d’accès unique à la justice instauré par Mme Taubira.

Et d’une manière générale, je veux faire valoir le fait que l’avocat doit être reconnu au sein de la cité. Il a son mot à dire sur les grands sujets de société.