Mais pourquoi se pose-t-on encore cette question ? 

Peut-être, justement, parce que le vent tourne en faveur de l’égalité hommes femmes au sein de l’entreprise. Parce qu’il devient évident que la mixité est un atout et qu’une société ne peut se passer de 50% de ses talents. Tour d’horizon des enjeux et des atouts de l’entreprise au féminin.

Par Julie Clerc

Elles demeurent encore sous-représentées parmi les hauts postes de direction et à la tête des entreprises. Selon l’Insee, 30% seulement des créateurs d’entreprise seraient des femmes. En 2011, moins de 3% des Françaises de 18-64 ans avaient créé une entreprise ou étaient propriétaires d’une entreprise récemment créée, contre 4,5% en Allemagne, 5,2% au Royaume-Uni et plus de 10% aux Etats-Unis. La marque d’archaïsmes persistants ? Si les femmes ne manquent pas d’ambition, l’acte d’entreprendre est toutefois moins spontané que pour les hommes. La raison est d’abord culturelle. L’histoire de notre pays et son patriarcat sont passés par là, engendrant des limitations silencieuses. Qu’une femme sacrifie sa carrière pour celle de son compagnon semble normal. L’inverse choque. Qu’une femme enchaine les déplacements professionnels au mieux surprend, au pire suscite la désapprobation.

Une remarque valable aussi pour les femmes managers qui se confrontent aux inégalités salariales face à leurs homologues masculins et se heurtent, en particulier dans les grands groupes, à de laborieuses évolutions de carrière. Selon une enquête de l’Institut CSA pour le cabinet d’audit et de conseil KPMG publiée en 2015, le « plafond de verre » est omniprésent : la part de femmes dirigeantes tend à baisser quand la taille de l’entreprise augmente. Elles restent le plus représentées dans les entreprises de 10 à 20 salariés. La facilité d’accès des femmes aux postes de décision dans l’économie française laisse encore beaucoup à désirer. Selon la même étude, la part de femmes occupant des postes de direction n’a progressé que d’1,2 point entre 2003 et 2013. Alors qu’elles représentent 48 % de la population active, les femmes occupent seulement 14 % des postes de direction.

Pourtant les femmes persévèrent. Et depuis cinquante ans s’imposent dans le monde de l’entreprise. Femmes managers, femmes entrepreneures, elles sont nombreuses à faire fi du déficit d’image dans le monde de l’entreprise et des préjugés persistants. Chaque année, 200 000 entrepreneures se lancent dans l’aventure de la création d’entreprise, soutenues par des réseaux professionnels et des dispositifs financiers dédiés (lire page 50). Avec des résultats dont elles n’ont pas à rougir : trois ans après, 66 % des femmes qui ont créé une entreprise sont toujours en activité, un chiffre comparable à celui des hommes. C’est aussi à la tête des équipes que l’on retrouve de plus en plus de femmes.

Les grandes entreprises se réveillent : dans celles qui comptent plus de 1000 salariés, la part de femmes dirigeantes a progressé de manière significative, de 3,5 % à 7,5 %, soit +4 points en 10 ans selon l’étude CSA-KPMG. Autre signe encourageant : le nombre de femmes de moins de 40 ans créatrices d’entreprises marque une belle ascension. Et des secteurs traditionnellement masculins s’ouvrent aux femmes dirigeantes, tels que l’énergie (+130 % en 10 ans), l’industrie agroalimentaire (+23,6 %) ou encore l’immobilier (+21,5 %).

Les esprits évoluent, la mixité s’enracine et promouvoir les femmes devient un leitmotiv. Y compris pour l’Etat qui de 2013 à 2017 a employé les grands moyens en déployant un plan de développement de l’entrepreneuriat au féminin : « Entreprendre au féminin. Des opportunités pour elles. Une clé pour la compétitivité et l’emploi ».
Parce qu’asseoir la place des femmes dans l’entreprise est d’abord une question d’efficacité économique. Nous ne pouvons passer à côté de 50% des compétences de notre pays.