Élue Miss France à 18 ans (en 2000), Sonia Rolland est mannequin internationale – ambassadrice de marque chez l’Oréal -, comédienne et réalisatrice de documentaires remarqués. Elle met régulièrement sa notoriété au service de nobles causes. Maïsha Africa, son association d’aide aux enfants orphelins du Rwanda, sa terre natale, en est la belle illustration. Elle est aujourd’hui la Marraine impliquée du Salon Madame 2018. Rencontre.

Propos recueillis par Daniel Rollé

Quel sens donnez-vous à votre implication, en tant que Marraine du Salon Madame, aux côtés des femmes entrepreneures de ce lointain département français d’Amérique qu’est la Guadeloupe ?

Sonia Rolland : le Salon Madame, comme toutes les initiatives dédiées aux femmes, est très encourageant. Les femmes s’organisent, échangent et restent en lien. C’est un message très positif pour les générations qui nous suivent que j’ai le désir de soutenir.

L’importance du rôle partenarial de la femme, dans un monde du travail encore majoritairement machiste, vous paraît-elle globalement dévalorisé ou en bonne voie de reconnaissance, en France hexagonale comme dans les Outre-Mers ?

Avec les récentes révélations de harcèlements et d’agressions sexuelles dans le monde du cinéma, nous avons pu constater que cela s’étendait dans bien des domaines où le silence règne en maître. Il était temps que cela cesse et que les femmes se sentent enfin protégées. Surtout les générations à venir. Le combat n’est pas gagné, mais les choses bougent enfin. Il y a aussi d’autres combats à mener, comme l’inclusion et la diversité. Le monde social d’où provient une personne peut la conditionner et parfois lui poser des contraintes. J’ai de nombreux exemples de femmes autour de moi qui ont eu à essuyer des refus d’emplois parce qu’elles n’étaient pas blanches ou pas « bien nées »… mais aussi parce qu’elles ne croyaient pas en elles. J’aurais pu être dans cet état d’esprit avant de me présenter à Miss France. Je venais d’un milieu modeste, métisse franco-rwandaise, venant de province. Et j’avais 18 ans ! C’était un pari fou. J’aurais pu me suffire de ce titre qui m’apportait une certaine facilité de vie, mais je me devais de transformer l’essai, ne serait-ce que pour motiver les autres femmes comme moi à croire en elles. Être une femme entrepreneure demande un certain dépassement de soi, une discipline et surtout une faculté à balayer toute forme d’ambigüité avec nos interlocuteurs masculins. Pour autant, les femmes ne sont pas tendres entre elles non plus. J’en ai fait les frais durant mon parcours, sans jamais renoncer. Le monde de l’entrepreneuriat n’est certes pas tendre avec nous les femmes, mais notre capacité à rebondir et à transformer l’essai est indéniable. Pour certaines, elles se doivent d’être de bonnes mères, de bonnes amantes et de parfaites régisseuses de foyer… J’ai souvent défini les femmes comme des êtres puissants, non par féminisme mais par simple constat.

En Guadeloupe, selon une enquête récemment publiée par l’INSEE, le chômage des femmes (33%) est le double de celui de leurs homologues de France hexagonale (15%). Que vous inspire ce chiffre préoccupant, quant on sait qu’il concerne majoritairement des jeunes femmes de moins de 25 ans ? 

C’est préoccupant en effet, voire très triste de se dire qu’une jeune femme tout droit sortie de ses études va peut-être connaître cette réalité injuste. C’est une période éprouvante qui peut détruire l’estime de soi… On a l’impression qu’on part du mauvais pied. Ce manque de candeur et d’insouciance chez les jeunes m’inquiète parce qu’ils sont plongés dans le concret dès le plus jeune âge. On doit absolument revaloriser le travail dans la vie de notre jeunesse, afin qu’elle soit bien préparée à la réalité parfois cruelle du monde de l’entrepreneuriat. Mon expérience et celle de ceux qui m’inspirent me l’ont prouvé plus d’une fois : il ne faut jamais renoncer !