Willy Bissainte est un habitué de la Route du Rhum. C’est le maître de cette compétition et il compte bien le prouver.

Propos recueillis par Alice Colmerauer

Racontez-nous vos deux précédentes participations à la Route du Rhum.

J’ai tout d’abord acheté Pogo40 (monocoque de 12 mètres). Deux ans plus tard, je fais ma première transatlantique seul. Je n’avais alors jamais dormi tout seul en mer, mais ça s’est très bien passé. En 2010, je participe à la course, en catégorie Class40. Je ne fais pas un bon classement, mais mon objectif était alors d’être présent au départ et à l’arrivée. J’ai par la suite décidé de faire une deuxième Route du Rhum avec ce même bateau mais en passant en catégorie Rhum. Je termine sixième, mais la victoire n’était toujours pas possible car mon bateau est trop petit. La catégorie Rhum m’a satisfait, car je me suis retrouvé entouré d’amateurs. C’est l’esprit que j’aime dans cette course.

Pour cette édition 2018, vous changez de bolide…

J’ai longuement cherché un 50 pieds (15 mètres) car c’est la longueur moyenne des bateaux en Rhum. En 2016, j’achète un Open50 (anciens bateaux qui courraient le Vendée Globe). Il y avait cependant une difficulté de taille : le bateau était amarré à Lorient et moi, j’habitais en Guadeloupe… J’ai donc enchainé les allers-retours en avion pendant presque un an pour naviguer avec ce bateau d’occasion et faire rejaillir tous ses problèmes. A deux ans et demi de la Route du Rhum, je n’avais pas encore de sponsors, donc je disposais de très peu de moyens. J’ai quand même réussi à ramener mon bateau en Guadeloupe où j’ai pu trouver des partenaires. Ceci m’a permis de repartir en juin 2018 pour une transatlantique retour. Une fois arrivé à Lorient j’ai mis mon bateau en chantier afin de l’optimiser pour cette course.

Quel est son nom ?

Il s’appelle « C’la Guadeloupe » et c’est le nom qui a été trouvé en concertation avec mes partenaires : le Conseil Départemental, GMA et la SIMEG.

Quelle place visez-vous ?

J’aimerais être dans les trois premiers, voire gagner. Cette année, il y a deux catégories Rhum : Rhum mono et Rhum multi. Nous serons dix-sept participants en monocoques et une vingtaine en multicoques, la concurrence va être rude !

Vous avez grandi en Guadeloupe, quelle a été votre approche de la voile ? 

Mon père avait une Saintoise sur laquelle nous sortions quand j’étais enfant. J’ai ensuite découvert la voile à l’âge de douze ans, à la VPP (Ecole de Voile de Pointe-à-Pitre) et très vite j’ai eu envie de faire de la compétition. Pour moi, c’était une forme d’aventure. Donc j’ai fait tous les championnats de la Caraïbe en Optimiste puis en 420… Puis je suis parti faire mes études à Paris et la compétition s’est arrêtée. Je l’ai très mal vécu.

Vous avez une grande expérience du canot traditionnel…

Après dix ans en Métropole, je suis rentré en Guadeloupe. J’ai alors découvert la voile traditionnelle, un milieu avec une très bonne ambiance et surtout, de nombreuses régates ! J’ai décidé de monter un projet. J’ai regroupé un équipage et fait construire un canot. Cet aspect projet voile m’a beaucoup plu. C’était à petite échelle, mais au final on retrouve les mêmes éléments dans un projet Route du Rhum. 

Quel était le nom de votre canot ?

Le premier s’appelait « Difé kako » (on met le feu). Puis j’ai eu un autre canot, « Mèt a mannyok » (la personne qu’il faut). Pour moi la voile traditionnelle passe aussi par les noms. Aujourd’hui cela se perd un peu, mais j’espère que certains coureurs trouveront d’autres expressions fortes pour faire revivre le créole de Guadeloupe

Comment faites-vous pour mener de front votre vie professionnelle et la préparation de cette
Route du Rhum ?

A la base, je suis ingénieur en bâtiments mais depuis quatre ans j’ai mis en standby mon travail pour me dégager du temps. Ainsi je me prépare comme un professionnel, mais je reste amateur !

Comment vos fans pourront-ils vous suivre durant la course ?

Chaque jour, je posterai un message sur ma page Facebook. Je parlerai du bateau, de mon ressenti, mais aussi des astres, de la mer, des animaux rencontrés… Pour moi, le vrai bonheur n’existe que si on le partage.

Facebook : Willy Bissainte

C’La Guadeloupe

Catégorie : Rhum mono Modèle : Open 50 

Longueur : 15 mètres

Largeur : 4,7m 

Tirant d’eau : 3,3m

Tirant d’air : 22,3m

Vitesse moyenne : 8-9 nœuds.