Héritier d’une tradition familiale dans l’élevage bovin, Emmanuel Gimenez Richardson atteste d’un parcours d’autodidacte éclairé.

Il met un point d’honneur à observer une éthique en faveur de l’élevage raisonné. 

Texte Jill Mamie – Photographie Alexandre Julien

Comment situez-vous historiquement la tradition agricole de Saint-Martin ? 

Emmanuel Gimenez Richardson : A l’époque de la colonisation, on y a cultivé le sel d’où le nom Soualiga, l’île au sel car il n’y a pas beaucoup d’eau pour le végétal.

Ma famille a développé l’élevage. Nous sommes de la vallée de Colombiers. C’est le cœur culturel de l’agriculture.

Auparavant, tout le monde y avait un jardin et pratiquait l’élevage.

Lorsque les anciens disaient « I’m going to the country », ils parlaient d’ici, de Colombier.

Quel poids représente l’élevage aujourd’hui ?

Nous avons créé une coopérative, Sicasmart, qui regroupe environ quinze éleveurs.

Un seul en vit, pour les autres il s’agit d’une activité complémentaire.

Le cheptel compte quatre cents bêtes.

Depuis 2015, l’abattoir est fonctionnel et nous structurons la filière pour qu’elle soit pérenne.

Quels sont les enjeux d’une filière agricole ?

Au niveau alimentaire, Saint-Martin dépend des importations à 99 %.

“Quand la nature fait un « reboot » avec des cyclones comme Irma, cela nous oblige à revenir à la base, qui est de subsister.”

Nous n’avons pas beaucoup de disponibilités foncières, l’enjeu n’est donc pas nécessairement de viser l’autosuffisance.

La production locale vertueuse est identitaire et donc un atout complémentaire pour le tourisme.

L’objectif est d’être dans la dynamique planétaire du retour au raisonné, produit en circuit court.

Quelles sont les caractéristiques du bœuf de Saint-Martin ?

Les animaux grandissent dans un climat salin proche des conditions des prés-salés.

Selon l’alimentation, les bovins saint-martinois portent plus ou moins de graisses.

Nos animaux sont élevés en semi-liberté, c’est la clef pour une viande de grande qualité.

Quelles sont les prochaines étapes de structuration de la filière d’élevage ?

Nous avons un produit brut, identitaire, avec du caractère, qui peut être amélioré en travaillant l’alimentation, la reproduction et en développant l’insémination.

Nous travaillons sur la future commercialisation du produit, la relation au public, aux restaurateurs.

Beaucoup reste à faire, mais nous avons déjà beaucoup fait !