Dès son plus jeune âge, Anne Criquet-Hayot baigne dans un environnement de partage, d’engagement social et de transmission du savoir. – Texte Audrey Juge

Le partage, l’engagement social, la transmission du savoir sont les trois valeurs héritées d’abord de sa mère, directrice d’école élémentaire dans le petit village qu’habite la famille. « Ma mère avait des élèves de tous les âges. Nous mêlions les sujets d’apprentissage de façon très interactive, les grands s’occupaient des petits. Pour moi, c’était extraordinaire ». Jusqu’à son entrée au collège, elle observe sa mère transmettre chaque jour ses connaissances aux écoliers « dans une communauté d’engagement, de partage et de culture qui a été très importante pour moi ».

« Je voulais que ma vie ait du sens et aide l’Autre. Apporter ma pierre, ma contribution, aussi modeste soit-elle à améliorer la santé de ceux qui en ont besoin. Si c’était à refaire, je le referais de suite ! »

Puis c’est son grand-père qui fait référence. Exemple implacable de résilience, professeur d’histoire-géographie fait prisonnier pendant la seconde guerre mondiale, il marque sa petite-fille par sa capacité à avancer et reconstruire, à faire pour les autres. « Leurs exemples m’ont formatée » affirme-t-elle. Et l’engagement qu’elle a pris, c’est d’aider les autres en devenant médecin. « Je voulais que ma vie ait du sens et aide l’Autre. Apporter ma pierre, ma contribution, aussi modeste soit-elle à améliorer la santé de ceux qui en ont besoin. Si c’était à refaire, je le referais de suite ! ».

Maître de stage universitaire en parallèle de son activité de médecin, Anne Criquet-Hayot enseigne la médecine générale à la faculté pendant 15 ans, encadre des internes dans la réalisation de mémoires ou de thèses et accueille au sein de son cabinet des étudiants en observation. « J’ai été élevée comme ça. Dans ma famille, on a toujours partagé et transmis ».

Pour la population

Véritable femme d’engagement, Anne Criquet-Hayot s’est toujours vivement impliquée socialement. Après une Thèse sur l’origine des termes médicaux en 1990, elle devient médecin et exerce trois ans dans l’Hexagone avant de s’envoler pour la Martinique en 1993.

Dynamique et proactive, elle fédère la communauté médicale autour d’idées justes. « J’ai toujours fait mes gardes. Je pense qu’il est normal que la population puisse avoir un accès aux soins permanent. Cependant, il faut trouver le bon équilibre pour que les médecins puissent décompresser. J’ai donc créé les Maisons médicales de garde afin d’assurer une continuité des soins avec une permanence organisée, pour que chaque professionnel puisse prendre du repos ».

Anne Criquet-Hayot participe ensuite dès 1999 à la création du Centre 15 puis sera sollicitée par la préfecture pour l’organisation et la coordination des renforts d’urgence lors de grandes catastrophes. 

« J’ai créé les Maisons médicales de garde afin d’assurer une continuité des soins pour la population, avec une permanence organisée pour que chaque professionnel puisse prendre du repos. »

Pour la communauté libérale

Agir pour l’Autre, c’est aussi pour ses pairs, les médecins libéraux. À ce titre, elle préside depuis 2015 l’Union Régionale des Médecins Libéraux de Martinique (URML) et vient d’être réélue pour sa deuxième mandature. « Par le biais de l’URML, et cela me tient beaucoup à cœur, on a essayé de montrer que la médecine n’est pas qu’un praticien assis dans son bureau mais aussi un médecin au service de l’Autre ». 

Anne Criquet-Hayot enchaîne les projets collaboratifs, à la fois artistiques et philosophiques, toujours liés à la médecine. Elle emmène son auditoire à réfléchir parfois sur son rapport aux autres cultures, sur notre réaction face à l’abondance de nourriture ou encore sur le colloque singulier qu’il existe entre un patient et son médecin. Anne Criquet-Hayot fourmille d’idées innovantes. 

« J’ai aussi participé à la création en 2007 de la CPTS Madinina (Communauté Professionnelle Territoriale de Santé), qui regroupe les professionnels de santé libéraux et dont je suis la Présidente. Elle représente « les soldats de l’ombre », ceux du quotidien. Il fallait une interprofession pour que les libéraux se retrouvent et se connaissent. Nous avons monté une cartographie pour les identifier ». Organiser en Martinique ce monde libéral souvent ignoré. Fédérer, regrouper, travailler en collaboration est pour elle primordial.

« Pour moi, être Martiniquais, c’est se bouger pour la Martinique, s’investir en apportant son énergie et ses compétences. C’est avancer ensemble pour construire. »

Et c’est au profit de la Martinique et de ses habitants qu’Anne Criquet-Hayot se démène au quotidien. « Je me sens totalement Martiniquaise. Pour moi, être Martiniquais, c’est se bouger pour la Martinique, s’investir en apportant son énergie et ses compétences. C’est avancer ensemble pour construire, en reconnaissant les spécificités du territoire et en les faisant reconnaître ».

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