Carole Vénutolo est Guadeloupéenne, « profondément Guadeloupéenne » parce que précisément ses ancêtres viennent de tous les ailleurs. « Nous n’avons pas la même couleur, ne venons pas des mêmes endroits, nous n’avons pas les mêmes cheveux mais nous avons en commun d’être tous des Guadeloupéens. » – Texte Willy Gassion

« Être guadeloupéen, c’est d’abord aimer la Guadeloupe, et la Guadeloupe, c’est les gens. Les paysages viennent après. »

La source 

« Je suis profondément Guadeloupéenne, je ne suis rien d’autre. Mes grands-parents, mes parents et moi sommes nés à Pointe-à-Pitre, je suis viscéralement attachée à cette ville, c’est la source. Je ne peux pas m’empêcher, quand je passe devant la Darse, de me dire que tous les bateaux sont arrivés là, à des époques différentes, dans des circonstances différentes mais ils sont tous arrivés là, et mes ancêtres sont arrivés là aussi. Chaque fois que je passe devant la Darse, je me dis : à quoi ont-ils pensé quand ils ont débarqué, quels sont les premiers visages qu’ils ont vus, quel temps faisait-il ? Est-ce qu’un jour j’aurai une bribe de réponse ou faudra-t-il que j’écrive, que j’imagine leur réponse. »

« Je suis le fruit de gens qui viennent de différents endroits du monde : d’Italie du côté de mon père, et d’Antigua-et-Barbuda et du Liban du côté de ma mère. Je ne connais pas le Liban, je ne parle ni arabe ni italien en revanche je parle très bien l’anglais, chaque année ma mère m’emmenait visiter sa famille, j’ai couru plusieurs fois le carnaval à Antigua-et-Barbuda. »

Ce que nous avons en commun

« Être guadeloupéen, c’est d’abord aimer la Guadeloupe, et la Guadeloupe, c’est les gens. Les paysages viennent après. J’ai eu le privilège de naître dans une famille qui a toujours vécu avec les gens et pas à côté des gens. Quand on dit : fout sa bel, ça me raconte une histoire ; quand on dit : tchip, ça me raconte une autre histoire. On est le fruit de sa culture, pas le fruit de ses ancêtres et ma culture est guadeloupéenne. La Guadeloupe c’est ce que nous avons en commun. »

« Il faut inspirer, transmettre, faire naître des vocations. Aujourd’hui le public est de plus en plus nombreux, diversifié, il vient de tous les milieux sociaux, c’est très gratifiant. »

Vulgariser le chant lyrique 

« Quand j’ai commencé à chanter, on partait de zéro. On a fait un travail de terrain, de pédagogie. En 2007, j’ai chanté trois soirs d’affilée à guichets fermés dans la grande salle du Centre des Arts avec le spectacle Opéra Soleil ; cependant j’adore chanter sur les places publiques. Je veux déplacer le chant lyrique, aller au plus près des gens pour vulgariser cet art. Depuis mes débuts, des générations de guadeloupéens se sont dit je peux faire ça, ils se sont lancés et se sont professionnalisés. Il faut inspirer, transmettre, faire naître des vocations. Aujourd’hui le public est de plus en plus nombreux, diversifié, il vient de tous les milieux sociaux, c’est très gratifiant. »

« Puisque la Guadeloupe n’est pas parfaite, puisqu’aucun endroit au monde n’est parfait, je choisis de travailler à la perfection de mon péyi. » 

« J’ai choisi d’être guadeloupéenne » 

« Toute ma vie j’ai milité pour l’unité en tant que citoyenne engagée. Mon amie Marie-Line Dahomay avec qui j’ai monté L’Opéra-Ka m’a dit un jour ; on nait guadeloupéen mais on choisit d’être guadeloupéen, et elle a raison. J’ai choisi d’être guadeloupéenne et je prends tout de la Guadeloupe. On ne peut pas dire ; mwen enmé la Gwadloup mè an pa enmé moun Gwadloup paskè yo ni mové mantalité. Non ! cela ne va pas ensemble. Chacun de nous parce qu’il est né ici, parce qu’il vit ici, parce qu’il se sent appelé par le péyi a quelque chose à apporter à son niveau. On ne peut pas changer le monde mais on peut changer son quartier, sa ville. Alors puisque la Guadeloupe n’est pas parfaite, puisqu’aucun endroit au monde n’est parfait, je choisis de travailler à la perfection de mon péyi. » 

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