L’intégration de la transition écologique dans la stratégie de l’entreprise n’est aujourd’hui plus un choix pour garantir le maintien de la vie humaine et répondre à l’attente des salariés d’une gouvernance plus éthique. Avec les évolutions des normes liées à la RSE, l’entreprise se doit d’être plus transparente sur son impact environnemental. Alors, comment s’organiser pour croître dans ce cadre sans greenwashing ?

Des précurseurs dans l’intégration de la nature adans l’entreprise

C’est Patagonia qui a d’abord révolutionné les mœurs en septembre dernier, en léguant son entreprise à deux ONG dédiées à la protection de la biodiversité et la lutte contre le réchauffement climatique. « La Terre est notre seule actionnaire », annonçait alors fièrement son fondateur, toujours en phase avec ses engagements des années 1970, de freiner la surconsommation en produisant des articles de sport durables. Depuis, d’autres sociétés ont suivi le mouvement, à l’instar de Léa Nature, fabricant de produits naturels et bio. Son fondateur, Charles Kloboukoff, qui veut pérenniser les missions écologiques et sociales de son entreprise, a créé une fondation actionnaire (Fondaction Ficus) à laquelle il va progressivement céder ses parts. Faith in Nature, une entreprise britannique, a, quant à elle, repoussé les limites du concept en intégrant la nature à sa gouvernance en nommant un administrateur qui la représente ainsi que ses intérêts. Simeon Rose, directeur de la création du groupe, explique : « L’idée était vraiment de faire de la nature “le boss”, et pas seulement de la sauvegarder. On s’est dit que le meilleur moyen d’y arriver serait de la nommer membre du Board ». Et c’est Brontie Ansell, directrice de Layers for Nature, qui portera la voix de la nature au Conseil d’administration de l’entreprise.

Introduire les non-humains ?

Selon Frantz Gault, auteur et sociologue des organisations, « une démocratisation appuyée par un modèle juridique et sur une délibération incluant humains et non-humains » serait une solution. « Introduire les non-humains – le poireau, la forêt, la rivière – dans la gouvernance des entreprises impliquerait de les inviter à la table des actionnaires pour décider en commun. Depuis des millénaires, les peuples animistes savent très bien le faire, ce qui leur permet de cohabiter d’égal à égal avec les autres êtres de la nature. » Une idée adoptée en 2017 par les néo-zélandais qui ont accordé au fleuve Wanghanui un statut juridique lui permettant d’être représenté par deux avocats. Pour Léa Kulinowski, chargée de mission juridique chez Les amis de la Terre (ONG française) : « tant qu’il n’y a pas de vérification externe aux entreprises, des audits, des contraintes mises en place par l’État, ça ne marche pas ». L’innovation juridique sur la question des ressources vivantes serait-elle la réponse ultime aux enjeux environnementaux, économiques et humains ? Il est grand temps de le découvrir !