Et si on s’en passait ?

Stopper sa consommation d’alcool pendant un mois, c’est le challenge du « Dry January ». L’occasion de changer de pratique et de se libérer d’une addiction aux lourds effets sur la santé. Le point avec Lise Bride, directrice du Comité Martiniquais de Prévention en Alcoologie et Addictologie (CMPAA).

Lise Bride, directrice du Comité Martiniquais de Prévention en Alcoologie et Addictologie (CMPAA) © Jean-Albert Coopmann
Lise Bride, directrice du Comité Martiniquais de Prévention en Alcoologie et Addictologie (CMPAA) © Jean-Albert Coopmann

Et si on s’en passait ?

Stopper sa consommation d’alcool pendant un mois, c’est le challenge du « Dry January ». L’occasion de changer de pratique et de se libérer d’une addiction aux lourds effets sur la santé. Le point avec Lise Bride, directrice du Comité Martiniquais de Prévention en Alcoologie et Addictologie (CMPAA).

Magaly MONDESIR

Quelle est la situation de l’alcoolisme en Martinique ?

L’alcool est un marqueur culturel fort aux Antilles. On prend un décollage, on trinque, on est ensemble, c’est dans les mœurs. Les jeunes ont toutefois un rapport différent à l’alcool, bien souvent, ils boivent pour boire. L’alcool est le produit le plus expérimenté par les jeunes avec le cannabis (souvent associés). C’est festif, mais aussi parfois le symptôme d’un mal-être, l’occasion « d’oublier ». Les femmes ne représentent que 20% du public accueilli au centre du CMPAA/CSAPA de Fort-de-France, sans doute aussi parce qu’elles dissimulent leur alcoolisme. On note que la consommation se démocratise, qu’elle concerne toujours plus de jeunes. En 2024, la consommation moyenne d’alcool pur est de 9,75 litres/an chez les plus de 15 ans. 

Quelles sont les conséquences de cette consommation d’alcool ?

Elles sont nombreuses et lourdes. Sur la sécurité routière : 24 accidents mortels sur 26 interviennent dans le cadre de consommation d’alcool et/ou de stupéfiants. Sur la situation sanitaire : cirrhose, cancer, hypertension et diabète. Les chiffres locaux sont supérieurs à la moyenne nationale. La santé mentale est également en jeu : à la fois cause et conséquence de la consommation d’alcool. Si le rhum est le symbole de la culture, de l’histoire et de l’économie de la Martinique, il y est aussi très accessible et sa surconsommation reste néfaste pour la santé.

Quel est le sens d’actions comme le dry january ?

Cette pratique appelée « défi de janvier » ou « dry january » a été lancée en 2013 par le Royaume Uni et déployée en 2019 en Europe et ensuite par fédération addiction. Elle vise à réduire, voire supprimer la consommation d’alcool pendant un mois. C’est l’occasion de se sentir mieux, de réfléchir à sa relation à l’alcool et d’enclencher un changement de pratique de consommation. Chaque association décline ses propres actions. Nos éducateurs spécialisés mettent en place des challenges pour les personnes accueillies au centre du CMPAA/CSAPA. Ralentir c’est déjà très bien ! L’alcool est une des substances addictives les plus difficiles à arrêter. 

Quelles sont les actions et missions du CMPAA ?

L’alcool et l’addiction en général sont un enjeu majeur de santé publique, c’est pourquoi il est indispensable de mener des actions de prévention tout d’abord, mais aussi d’accompagnement et d’accès aux soins, gratuits grâce au financement de l’ARS et de la Sécurité sociale. Le CMPAA a été créé en 1974 pour faire de la prévention. En 2019, un Centre de soin d’accompagnement de prévention en addictologie est venu compléter le dispositif, afin de suivre et accompagner les personnes repérées. Elles peuvent venir spontanément ou être orientées par leur médecin traitant, par la justice (dans le cadre d’injonction thérapeutique) ou encore par les centres d’insertion. Un public de 11 à 80 ans est accueilli en ambulatoire par notre équipe pluridisciplinaire : secrétaire médicale, médecin addictologue, assistante sociale, psychologue, éducateur spécialisé et « préventeurs », dont le rôle est « d’aller vers » les personnes en difficulté. Nous mettons en place des ateliers thérapeutiques.