Itinéraire Bis : l’auto-école sociale qui change des vies

En Guadeloupe, l’association Solidarités SOS a créé Itinéraire Bis, une auto-école sociale et solidaire qui s’adapte au parcours de chacun. Elle ouvre l’accès au permis à ceux qui en sont exclus, faute de pouvoir se déplacer librement.

Cédrick-Isham Calvados
Sabine Lautric offre la possibilité à chacun, via son auto-école sociale et solidaire, de passer le permis de conduire. Cédrick-Isham Calvados

Itinéraire Bis : l’auto-école sociale qui change des vies

En Guadeloupe, l’association Solidarités SOS a créé Itinéraire Bis, une auto-école sociale et solidaire qui s’adapte au parcours de chacun. Elle ouvre l’accès au permis à ceux qui en sont exclus, faute de pouvoir se déplacer librement.

Le matin, après avoir déposé ses enfants à l’école, une mère célibataire franchit la porte d’Itinéraire Bis, l’auto-école sociale et solidaire implantée en Guadeloupe. Sa journée commence par une série de quarante questions projetées sur écran, sans manuel de code dans les mains. Autour d’elle, une dizaine d’autres candidats aux profils différents : jeunes en insertion, bénéficiaires du RSA ou encore personnes en situation de handicap.

Ici, les cours sont oraux, bilingues français-créole, accompagnés de jeux, de casques immersifs et de mises en situation concrètes. L’objectif est de rendre accessible le permis de conduire à celles et ceux pour qui la mobilité constitue le premier frein à l’emploi ou à la formation, et même parfois à la vie sociale.

Une pédagogie à la carte

Ancienne manager sociale, Sabine Lautric a de l’expérience. « J’ai toujours maraudé dans les rues. J’ai accompagné de nombreuses personnes, et systématiquement, la question de la mobilité revenait », explique-t-elle. Et ces personnes font souvent face à l’illettrisme, elles n’ont pas de moyens financiers ou sont isolées géographiquement. Sabine Lautric a donc imaginé une offre « à la carte ». Les cours sont accessibles à tous, même en situation de handicap. L’auto-école se déplace vers les usagers (la « mobilité inversée »), et l’apprentissage se fait sur des véhicules électriques pour « limiter la complexité mécanique ».

L’aventure a démarré en mars 2020 et le bouche-à-oreille a suffi à remplir les quatre sessions par an. Au total, 100 candidats au permis sont accueillis chaque année.

Le parcours vers le permis B débute par un entretien diagnostic. « On balise tout : difficultés sociales, éventuels aménagements du véhicule, niveau cognitif. Ensuite, on décide si on part sur un accompagnement long ou
accéléré », détaille Sabine Lautric. « L’après-midi, l’élève reçoit déjà des exercices à faire chez lui. Et le soir, l’enseignant reprend les résultats pour revenir dès le lendemain sur ce qui a péché. C’est intensif. »

Pour le candidat, une aide au financement est prévue grâce aux différents partenaires d’Itinéraire Bis qui sont le Département, l’État et la politique de la ville. En général, il reste à charge pour les bénéficiaires 400 ou 500 euros, payables en dix fois.

Un tremplin vers l’insertion

Chaque parcours est pensé comme un tremplin vers l’insertion durable. Certains anciens candidats ont pu créer leur entreprise, d’autres ont accédé à un emploi stable ou ont retrouvé une autonomie familiale. « On change des destinées », résume la responsable avec émotion.

Itinéraire Bis, qui a été aidée financièrement à sa création par la Région, est une facette de l’association Solidarités SOS, qui développe aussi une plateforme de mobilité sociale et solidaire baptisée MOB’îles. « Nous centralisons du taxi social, de la location solidaire de véhicules électriques et du covoiturage. En Guadeloupe, l’offre de transport public est carencée. Alors nous avons dû inventer nos propres solutions ! », conclut Sabine Lautric.