Santé mentale des dirigeants : un enjeu invisible ?
Grande cause nationale en 2025, la santé mentale doit enfin sortir de l’ombre et le monde de l’entreprise n’y échappe pas. Stress, anxiété, isolement… Les dirigeants d’entreprise sont très souvent en première ligne, parfois au détriment de leur équilibre psychologique. Levons le voile.
Préserver la santé mentale des équipes est une obligation légale de l’entreprise. La loi du 2 août 2021 impose d’ailleurs davantage de prévention dans ce domaine devenu vital dans un environnement dégradé depuis la crise du Covid-19. Des mesures d’autant plus justifiées qu’un salarié français sur deux confie être en souffrance psychologique.
Faire de la santé mentale « Grande cause nationale » en 2025 vise donc à intensifier ces efforts. Certaines grandes entreprises ont déjà même pris l’habitude de proposer, sur place, des séances de psychothérapie à leurs salariés. Une question se pose toutefois… Quid de la santé mentale du chef d’entreprise ? Le dirigeant prend-il aussi le temps de consulter s’il en ressent le besoin ? Rien n’est moins sûr.
Selon une enquête réalisée, en 2024, par la fondation MMA des entrepreneurs du futur, 32 % des 1 500 dirigeants (TPE, PME, ETI) interrogés avouent avoir renoncé à voir leur médecin dans les douze derniers mois. Parmi eux, 60 % l’ont justifié par manque de temps et 37 % par leur difficulté à concilier leur vie professionnelle et personnelle. En un mot, leur incapacité à prendre soin d’eux.
Le poids des responsabilités
« La grande majorité des chefs d’entreprises, avec ou sans salarié, ont un profil très spécifique », explique Guylaine Volcy-Lafages, psychologue du travail, intervenante en prévention des risques professionnels (IRPP) et experte bénévole pour l’association 60 000 rebonds. « Ils ont un esprit d’entreprise qui les pousse, au départ, à prendre des risques et des responsabilités plus que tout un chacun. Ce sont des personnes qui « La grande majorité des chefs d’entreprises, avec ou sans salarié, ont un profil très spécifique », explique Guylaine Volcy-Lafages, psychologue du travail, intervenante en prévention des risques professionnels (IRPP) et experte bénévole pour l’association 60 000 rebonds. « Ils ont un esprit d’entreprise qui les pousse, au départ, à prendre des risques et des responsabilités plus que tout un chacun. Ce sont des personnes qui font preuve de courage, d’adaptabilité et de résilience.
Toutes ces qualités et cette force morale vont les aider à faire face, à réagir et à supporter les difficultés qui ne manquent pas dans ce contexte de crise mondiale. Ils ne sont toutefois pas à l’abri du burn out s’ils se laissent piéger par le poids des responsabilités aussi bien financières que vis-à-vis de toutes les personnes qui gravitent autour d’eux : salariés, partenaires, fournisseurs, famille, etc. ».
En effet, lorsque la pression subie dépasse les ressources psychologiques et physiques, les conséquences se manifestent rapidement : fatigue intense, douleurs (tête, dos, estomac), troubles du sommeil, maladies de peau, système immunitaire déficient, etc. « La fierté, la posture à tenir et l’image à soigner, notamment dans nos territoires où le qu’en dira-t-on est très prégnant, rendent encore plus difficile la prise de conscience et donc la prise en charge effective du chef d’entreprise », poursuit la psychologue.
Comme pour les salariés, plusieurs bonnes habitudes sont nécessaires à mettre en place dès le départ pour que travailler rime avec sérénité. « Il est primordial de prendre du temps pour soi, d’avoir des activités, des loisirs, en un mot, des temps de déconnexion totale », précise Guylaine Volcy-Lafages. « Une bonne alimentation et de l’activité physique sont également indispensables. Les chefs d’entreprise ont aussi tout intérêt à savoir se donner des limites, à gérer leur stress, à apprendre à déléguer si possible, à chercher du soutien auprès d’autres dirigeants et évidemment à consulter un professionnel en cas de besoin. La bonne santé de leur entreprise en dépend ».
EN CHIFFRES
- 83 % des chefs d’entreprise se considèrent être en bonne forme physique.
- 18 % se sentent découragés et ne veulent pas lancer de nouveaux projets.
- 35 % craignent de voir leur santé physique se dégrader.
- 23 % évoquent le risque de dépression et de burn out.
(Opinion Way /France. 2023)
1 GRANDE CAUSE POUR 3 OBJECTIFS
En désignant la santé mentale « Grande cause nationale » en 2025, le Gouvernement espère atteindre trois objectifs : informer, prévenir et déstigmatiser. Chaque année, 13 millions de personnes en France, soit une personne sur cinq, vivent avec un trouble psychique et huit français sur dix estiment que les pouvoirs publics ne sont pas à la hauteur des enjeux de santé mentale. L’attribution du label « Grande cause nationale » permettra de fédérer les acteurs publics et privés et d’inciter à un changement profond dans la perception et la prise en charge de la santé mentale en France et en Outre-Mer. Tous les secteurs sont concernés : médical, médico-social, jeunesse, sport, entreprise et culture.