Un Guadeloupéen face aux paradoxes de l’entrepreneuriat noir

Enfant, il voulait être vétérinaire. À 25 ans, diplômé de sciences politiques, il veut briser le plafond de verre des étudiants guadeloupéens, comme celui des entrepreneurs afrodescendants. Rencontre.

Miguel Antile, entrepreneur © Jean-Albert Coopmann
Miguel Antile, entrepreneur © Jean-Albert Coopmann

Un Guadeloupéen face aux paradoxes de l’entrepreneuriat noir

Enfant, il voulait être vétérinaire. À 25 ans, diplômé de sciences politiques, il veut briser le plafond de verre des étudiants guadeloupéens, comme celui des entrepreneurs afrodescendants. Rencontre.

Alix Delmas

Miguel Antile était présent lors de la manifestation des étudiants de l’Université de Californie de Los Angeles (UCLA), contre les violences policières après le décès de Georges Floyd, le 25 mai 2020, à Minneapolis. Un événement fondateur dans la construction intellectuelle du jeune Guadeloupéen qui effectue alors une année d’échange dans cette université californienne, au cours de son Bachelor à Sciences Po Paris.

Cette même année, il suit un cours du département African American Studies. « J’ai commencé à réfléchir à ma place dans la diaspora afrodescendante, comme afro-caribéen en tant que Guadeloupéen, mais aussi comme afro-européen. Aux États-Unis, des organisations et programmes, comme des incubateurs, des communautés, des réseaux estudiantins, des médias sont tournés vers des publics afrodescendants avec une focale sur l’expérience afro-américaine, mais je ne m’y sentais pas forcément inclus », confie-t-il. Combler ce gap à l’échelle européenne et caribéenne constitue alors les prémices de son envie d’entreprendre.

Vers une startup dédiée à la réussite des talents afrodescendants

C’est à une stealth startup (startup discrète) que Miguel Antile se consacre depuis 8 mois, pour un lancement prévu en 2026. En genèse : le Black entrepreneurship paradox. « Les afrodescendants ont des taux d’entrepreneuriat plus élevés que d’autres groupes que l’on soit aux États-Unis, dans la Caraïbe, en Afrique ou ailleurs. Mais si on observe les métriques concernant les revenus, la profitabilité de ces entreprises, elles sont en moyenne moins viables que d’autres groupes », explique le jeune entrepreneur.

Une situation paradoxale dont les facteurs les plus saillants sont, selon ses recherches, « l’absence de réseaux de partage de connaissances et de soutien à tous les stades de l’évolution du parcours entrepreneurial. Les entrepreneurs afrodescendants, même s’ils sont nombreux sur différentes géographies, sont relativement isolés et ne sont pas connectés », conclut-il.

Entrepreneuriat noir : affronter un paradoxe

Comment agir ? Il l’a d’abord fait avec l’association « De la Guadeloupe aux grandes écoles », qu’il préside depuis 2020, où il a appris et démontré la valeur fondamentale de la communauté en s’attaquant aux nombreux plafonds de verre que peuvent rencontrer de jeunes étudiants guadeloupéens en quête de parcours d’excellence.

Son autre projet s’inscrit aujourd’hui à une plus large échelle afin de lutter contre cette forme d’isolement que connaissent les entrepreneurs afrodescendants grâce à un écosystème de mutualisation d’infrastructures, d’opportunités et de ressources financières et humaines. Les outils ne sont pas tout, les valeurs des projets sont tout aussi importantes et singulières. Et le jeune entrepreneur de citer Fawn Weaver, une entrepreneure afro-américaine qui a fondé Uncle Nearest, au Tennessee. Cette marque de whisky restitue l’héritage de Nathan « Nearest » Green qui a enseigné à Jack Daniel l’art de la distillation. « Soit un modèle de réussite fondé sur la réhabilitation de l’histoire », sourit-il. Rendez-vous en 2026.

Dates Clés

1999 : Naissance à la Guadeloupe
2020 : Finaliste du Library Prize for Undergraduate Research, à UCLA (catégorie Humanité) et président de l’association « De la Guadeloupe aux grandes écoles »
2023 : Diplômé du master anglophone International Management and Sustainability, de Sciences Po Paris
2026 : Lancement d’une startup pour mutualiser infrastructures, opportunités et ressources financières et humaines