Un modèle mutualiste « made in Guyane »

Le 27 septembre 2025, le Crédit Agricole a inauguré une nouvelle agence à Saint-Laurent-du-Maroni. Thibault Reversé, directeur général du Crédit Agricole Martinique-Guyane depuis février 2025, nous explique comment cette implantation s’inscrit dans une stratégie ambitieuse : créer un réseau mutualiste adapté aux spécificités guyanaises. Entretien.

Thibault Reversé,Directeur credit agricole Martinique Guyane Jean-Albert Coopmann
Thibault Reversé,Directeur credit agricole Martinique Guyane Jean-Albert Coopmann

Un modèle mutualiste « made in Guyane »

Le 27 septembre 2025, le Crédit Agricole a inauguré une nouvelle agence à Saint-Laurent-du-Maroni. Thibault Reversé, directeur général du Crédit Agricole Martinique-Guyane depuis février 2025, nous explique comment cette implantation s’inscrit dans une stratégie ambitieuse : créer un réseau mutualiste adapté aux spécificités guyanaises. Entretien.

Floriane Jean-Gilles 

Pourquoi une nouvelle agence à Saint-Laurent-du-Maroni ?

Saint-Laurent-du-Maroni connaît une croissance démographique exponentielle et pourrait bien devenir la ville ultramarine française la plus peuplée. C’est, par conséquent, un territoire en développement qui génère des volumes d’investissements colossaux avec l’arrivée de la Cité du ministère de la Justice (à l’horizon 2027, ndlr), l’implantation d’établissements scolaires et hospitaliers et la construction de logements pour accueillir ces populations. Le Crédit Agricole accompagne naturellement cette trajectoire de croissance et de développement de l’économie, dans une ville où le besoin de financement, rapporté à la population, reste certes limité, mais où le besoin de bancarisation est réel. Saint-Laurent, c’est une autre Guyane. Les enjeux ne sont pas les mêmes qu’à Cayenne. En somme, les pratiques et les relations avec la banque restent à construire. Nous avons ouvert deux agences pour accompagner les particuliers et les petites entreprises. La première est en cours de rénovation et rouvrira, au plus tard, début 2027. Les équipes y sont majoritairement originaires de la région et certains collaborateurs parlent 5 langues, afin d’être au plus près des réalités locales.

Quels sont les défis de votre développement en Guyane ?

Une agence, c’est à la fois l’immeuble et les compétences. Il existe des freins sur les deux niveaux. Construire une agence bancaire aux standards de sécurité européens est un défi à cause des difficultés pour acheminer le matériel, par exemple. Sur le plan du recrutement, trouver des candidats formés n’est pas non plus chose aisée, ce n’est pas impossible puisque nous avons constitué une équipe de 8 personnes à Saint-Laurent-du-Maroni, mais cela prend du temps. Je pense aussi qu’il faut être humble, car les attentes des clients, tout comme leur approche de la banque sont différentes. Il faut encore aider une partie de la population à comprendre le rôle de la banque, dans une ville où l’économie informelle est extrêmement développée. Nous devons donc également nous adresser à cette partie de la population qui reste en marge du système bancaire traditionnel.

Quelle place tient le numérique dans votre stratégie ?

Une place essentielle ! L’un des slogans du Crédit Agricole est de dire que c’est une banque 100 % humaine et 100 % digitale. Autrement dit notre appréhension des outils numériques ne va pas sans la relation client. La solution digitale est un service complémentaire, c’est le client qui choisit. Mais ce n’est, dans notre conception, jamais l’un ou l’autre. La digitalisation est à ce titre un excellent moyen d’accès à la population guyanaise pour pallier les contraintes géographiques (horaires d’ouverture d’agence, transport) et toucher une population jeune. De nouvelles offres numériques seront bientôt disponibles et permettront de réaliser des opérations qu’on ne pouvait jusqu’alors effectuer qu’en agence.

Subissez-vous la concurrence des banques en lignes ou néobanques ?

Les néobanques attirent surtout par leur gratuité, mais beaucoup de besoins ne sont pas servis, or le Crédit Agricole mise sur un accompagnement global, à chaque étape de la vie. À ce titre, le spectre de nos offres est incommensurable. Le Crédit Agricole est la 1re banque/assurance européenne, la 9e au niveau mondial, charge à nous d’offrir le meilleur du digital. C’est très stimulant de transformer notre façon de faire, le digital est incontestablement un vecteur de performance. Cette vision d’une banque tout en un s’adresse ainsi à la fois aux clients qui ont des besoins limités (une carte, un compte) qu’à ceux dont les projets nécessitent un accompagnement dédié.

En quoi votre modèle de banque se distingue-t-il de celui des autres banques ?

En Guyane, on revient à l’esprit originel du Crédit Agricole, puisque tout est à construire. C’est à l’initiative des élus du conseil d’administration du Crédit Agricole, en Martinique, qu’est né ce projet de banque mutualiste en Guyane. Toutefois, si son origine est martiniquaise, sa vocation est guyanaise. Chaque agence du Crédit Agricole en Guyane devrait, à terme, être associée à une caisse locale couvrant plus finement le territoire, pour renforcer l’ancrage et la prise de décision au plus près de nos clients. D’ici deux ans, nous espérons créer la Maison du Crédit Agricole, à Cayenne (Place des Palmistes), qui regroupera compétences bancaires (entreprises, particuliers et patrimoine), espaces de coworking et salles de réunion pour les associations clientes et partenaires de la banque. Par ce biais, nous entendons apporter le meilleur de la banque et de l’assurance en Guyane, tel qu’il existe en Martinique ou à Paris.

Fidèles à ses origines agricoles, nous accompagnons aussi les petites exploitations afin qu’elles se structurent, malgré un secteur encore « embryonnaire ». Nous sommes très créatifs en Guyane, et construisons chaque jour des offres utiles et innovantes.

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