Une priorité publique affirmée

Portée par l’ARS Martinique, la santé des femmes devient un axe transversal majeur de la politique régionale de santé. Inégalités d’accès, pathologies spécifiques, violences, parcours de PMA : autant d’enjeux auxquels répond une stratégie territoriale ambitieuse, coordonnée et humaine, impulsée par le Directeur Général Yves Servant. Panorama.

Dr Mehdi Jean-Laurent, chirurgien gynécologue, praticien hospitalier en gynécologie, Dr Alexandru Lintis, chirurgien viscéral, praticien hospitalier en gynécologie, Dre Ludivine Chevallier, chirurgienne viscéral, praticienne hospitalière en gynécologie, Dre Alice Monthieux, gynécologue médicale, praticienne hospitalière en gynécologie, Dre Natacha Jeanne-Rose, chirurgienne gynécologue, docteur junior en gynécologie, Dr Loredana Olaru, gynécologue-obstétricienne, assistante en gynécologie, Dr Taïna Labeau, gynécologue médicale, docteur junior en gynécologie Jean-Albert Coopmann
Dr Mehdi Jean-Laurent, chirurgien gynécologue, praticien hospitalier en gynécologie, Dr Alexandru Lintis, chirurgien viscéral, praticien hospitalier en gynécologie, Dre Ludivine Chevallier, chirurgienne viscéral, praticienne hospitalière en gynécologie, Dre Alice Monthieux, gynécologue médicale, praticienne hospitalière en gynécologie, Dre Natacha Jeanne-Rose, chirurgienne gynécologue, docteur junior en gynécologie, Dr Loredana Olaru, gynécologue-obstétricienne, assistante en gynécologie, Dr Taïna Labeau, gynécologue médicale, docteur junior en gynécologie Jean-Albert Coopmann

Une priorité publique affirmée

Portée par l’ARS Martinique, la santé des femmes devient un axe transversal majeur de la politique régionale de santé. Inégalités d’accès, pathologies spécifiques, violences, parcours de PMA : autant d’enjeux auxquels répond une stratégie territoriale ambitieuse, coordonnée et humaine, impulsée par le Directeur Général Yves Servant. Panorama.

Mathieu Rached

« En Martinique, la santé des femmes est bien plus qu’un enjeu médical : c’est une question de justice sociale, de dignité et d’égalité », défend le directeur général de l’ARS. En effet, les indicateurs sont clairs : les femmes sont confrontées à des pathologies spécifiques, à des parcours de soins fragmentés, à des violences trop souvent invisibilisées, et à des inégalités d’accès à des dispositifs essentiels comme la PMA. Aussi, dès sa prise de fonction, il a souhaité inscrire cette priorité au cœur de l’action publique. « Notre responsabilité est collective », reprend-il. « C’est pourquoi nous avons engagé une politique territoriale ambitieuse, fondée sur la coordination des acteurs, le renforcement des parcours, l’innovation, et la proximité. Qu’il s’agisse de l’endométriose, de la préservation de la fertilité, du droit à porter plainte dans un cadre sécurisé, ou de l’accompagnement des femmes dans leur projet parental, chaque action menée vise à répondre à une réalité vécue ». La santé des femmes en Martinique ne se résume pas à une série de pathologies. Elle est le reflet d’un combat pour l’égalité, la dignité et l’accès aux soins, et elle est désormais inscrite dans le Schéma régional de santé comme une priorité transversale. Pour cela, elle mobilise les établissements, les professionnels, les associations, les collectivités et les institutions judiciaires, qui, ensemble, tracent une voie ambitieuse et inclusive ; construisent une réponse durable, humaine et adaptée aux besoins des Martiniquaises.

Dr Mehdi Jean-Laurent, chef de service gynécologie obstétrique au CHUM

Endométriose : pour les femmes, une réponse coordonnée,

⁠Quels sont la situation de l’endométriose en Martinique et ses impacts sur la vie des femmes ?

Même si la situation s’améliore depuis quelques années, nous avons encore affaire à des patientes sous-diagnostiquées, des patientes mal informées, de même que nombre de professionnels de santé de premier recours demeurent mal formés ou pas encore formés… Aussi, bien que l’offre de soins s’améliore, elle reste fragile parce que les professionnels de santé hyperspécialisés ne sont pas nombreux sur le territoire.

Comment la filière FEnM transforme la prise en charge de l’endométriose en Martinique pour mieux diagnostiquer, accompagner et améliorer le quotidien des femmes ?

Pour transformer la prise en charge sur le territoire, la filière endométriose Martinique s’est fixée plusieurs missions. L’une des missions les plus importantes, c’est sans doute la formation des professionnels de santé de premier recours, c’est-à-dire les médecins généralistes, les sages-femmes, les infirmières scolaires. L’enjeu étant que ces professionnels de santé, dont le maillage sur le territoire en Martinique est plutôt bon, puissent diagnostiquer les patientes présentant des dysménorrhées pouvant évoquer une endométriose, puissent prescrire les premiers traitements mais aussi adresser correctement, aux professionnels de santé de niveau 2, des patientes dont la situation est un peu plus compliquée.

La deuxième mission est celle de l’information du grand public, informer les patientes, leurs conjoints et leurs familles de la pathologie, des possibilités thérapeutiques, de la possibilité de soins de support et de comment améliorer leur bien-être avec cette pathologie.

La troisième mission vise à améliorer l’offre de soins et pérenniser les centres d’expertise, que ce soit en chirurgie ou en procréation médicalement assistée. Enfin, la dernière mission de la filière endométriose Martinique est de participer ou de conduire des études aussi bien sur les soins de support – comme l’activité physique adaptée –, que sur l’épidémiologie, soit les mesures de l’incidence de cette pathologie sur notre territoire. De même que nous devons nous inscrire dans des études nationales, voire internationales, comme l’étude actuelle sur le test salivaire.

CHIFFRES CLÉS

– En Martinique, la prévalence semble plus élevée que la moyenne nationale, où environ 1 femme sur 10 est concernée.

– L’endométriose est responsable de 50 % des cas d’infertilité en France.

Dr Cynthia Bichara-Petit, médecin biologiste AMP

Dr Cynthia Bichara Petit, médecin biologiste en AMP*

PMA : un dispositif consolidé, au service des femmes

Quels changements majeurs avez-vous observés dans la pratique de l’AMP ?

L’assistance médicale à la procréation (AMP) est une spécialité qui évolue au fil du temps avec les découvertes scientifiques (embryologie…) mais également les évolutions sociétales (mariage pour tous). En effet, en 2021 avec la nouvelle loi de bioéthique, l’accès à l’AMP a été élargi aux femmes seules et couples de femmes, et nous avons pu proposer aux femmes et aux hommes la possibilité de préserver leur fertilité sans raison médicale.

Comment s’organise concrètement l’activité biologique en biologie de la reproduction sur le territoire ?

Le centre d’Assistance médicale à la procréation en Martinique est composé de la clinique Saint-Paul qui assure les activités cliniques telles que les ponctions ovocytaires, et du laboratoire Eurofins Bio Santé qui assure les activités biologiques telles que la fécondation in vitro classique, la fécondation in vitro par micro-injection (ICSI), l’insémination intra utérine, la congélation des embryons et des gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) dans un contexte médical et non médical (ou plus communément appelé « sociétale »). Nous sommes en capacité de réaliser tous les actes AMP que ce soit en intraconjugale mais également avec tiers donneur grâce à notre collaboration avec le CECOS de Guadeloupe qui nous fournit les gamètes de donneurs.

Nous avons pu également collaborer avec les praticiens spécialisés en AMP de Guyane afin de répondre à la demande de la population guyanaise qui n’a, pour le moment, pas de centre AMP actif sur son territoire.

En 2024 nous avons réalisé 266 ponctions d’ovocytes, et nous espérons pour 2025 faire mieux afin de pouvoir répondre au maximum aux demandes de la population.

Quelles sont les priorités pour renforcer la qualité et la continuité de cette activité ?

Cette activité apporte, certes, du bonheur quand on voit les patients revenir avec leurs enfants suite aux tentatives, mais présente bien des difficultés que ce soit pour les patients mais aussi pour les professionnels de santé.

Les institutions telles que l’ARS et l’ABM, ainsi que tous les protagonistes tels le directeur d’établissement de santé, le directeur de laboratoire, les associations de patients et l’équipe AMP, nous œuvrons ensemble afin de maintenir la qualité de ce formidable outil de travail sur notre territoire. L’ARS a notamment structuré une feuille de route incluant le recrutement de professionnels, l’élargissement des créneaux afin de diminuer le délai de prise en charge qui est actuellement de 3 mois (sauf pour les tentatives avec don à cause du manque cruel de donneurs aux Antilles) et le développement de la préservation de la fertilité notamment dans un contexte oncologique. Nous renforçons aussi la coordination avec les associations en participant à des moments d’échanges ouverts au grand public, et participons aux réseaux de soins pour garantir un parcours fluide et humain.

Getty Images

Dr Catherine Bonnier, cheffe de pôle adjointe – pôle MFME – CHUM Martinique

Violences faites aux femmes : un guichet unique pour libérer la parole

En quoi le guichet unique est-il innovant ?

Pour la première fois, les victimes peuvent porter plainte directement à l’hôpital, dans un cadre médical, sécurisé et confidentiel. Cela évite le passage parfois traumatisant par les commissariats et permet une prise en charge immédiate et globale.

Quels types de violences sont concernées ?

Violences conjugales, intrafamiliales, agressions sexuelles, viols… Le dispositif s’adapte à chaque situation, avec des professionnels formés à l’écoute et à l’accompagnement.

Et si la victime ne souhaite pas porter plainte immédiatement ?

Nous pouvons recueillir et conserver les preuves médicales sans que la victime ait à s’engager tout de suite. Cela lui laisse le temps de réfléchir, tout en garantissant ses droits si elle décide plus tard de porter plainte.

Comment ce dispositif a-t-il été mis en place ?

Le 25 avril 2025, une convention a été signée entre le ministère de l’Égalité, la préfecture, le parquet, la police, la gendarmerie, l’ARS et le CHUM. C’est une démarche interinstitutionnelle inédite.

capturedecran2025-08-29a08.00.39

En chiffres

– Moins de 1 victime sur 5 de violences conjugales dépose plainte

– En cas de viol, 1 victime sur 10 engage des poursuites

– 471 500 € sont consacrés en 2025 par l’ARS Martinique à l’accompagnement de 16 projets et dispositifs visant à prévenir les violences sexistes et sexuelles, les violences faites aux enfants et accompagner les victimes vers une sortie de ces situations.