Christian Fillatrau


A elle seule, l’Aquitaine concentre plus de la moitié du PIB lié au numérique dans le domaine de la santé en France. Un poids qui s’explique par différentes raisons. Entretien avec Christophe Fillatreau, président du TIC Cluster e-santé en Aquitaine qui réunit industriels, chercheurs et institutions.

Serious game, applis, objets connectés et réseaux sociaux ; tels sont les outils de l’e-santé qui concourent à une évolution dans l’organisation et la prise en charge des patients atteints de pathologies très diverses.

La e-santé est l’un des domaines dans lequel la région se distingue « d’abord parce que l’Aquitaine est naturellement le réceptacle de cette branche car c’est un terre d’implication de l’industrie et de la branche informatique en santé »  explique Christophe Fillatreau.  Ensuite parce que « la région a bénéficié d’un effet d’inertie positive avec la présence d’entreprises majeures comme Agfa Healtcare, Main care et de start-up comme Web100t  qui permettrait de répondre  à des problématiques dans l’e-santé ». Autre facteur « la présence de laboratoires de recherche très investis dans l’informatique de santé. »

Le Laboratoire de recherche en informatique (Labri), l’Institut de recherche dédié au numérique (Inria ) ou encore l’Institut de  santé publique, d’épidémiologie et de développement (Isped) ». Idem avec  la route des lasers qui crée un environnement de recherche important. A ces raisons s’ajoute un autre élément : « Bordeaux est historiquement une ville où l’on fait beaucoup de jeux vidéos ». Bordeaux a en effet connu une sorte d’âge d’or avec notamment Kalisto, une société de jeux vidéos fondée  par Nicolas Gaume en 1990 (liquidée en 2002).  Une histoire qui explique sans doute que les serious game s’y développent  localement. Des serious game qui ont leur utilité, par exemple, dans l’éducation thérapeutique, la bonne observance de la prévention des risques pour le personnel de santé avec la radio–protection ou les accidents d’exposition au sang.

Economies et numérique 

La télémédecine avec la téléimagerie, la téléconsultation et l’utilisation d’objets connectés sont donc des axes majeurs de l’e-santé qui permettraient de répondre  en partie à certaines problématiques comme l’augmentation des coûts liés à la chronicité de certaines pathologies. Par exemple, à Bergonié, l’Institut bordelais de lutte et de recherche contre le cancer, dont Christophe Fillatreau est aussi le directeur général adjoint : « les dépenses de transport des patients sont passées de 7, 4 millions en 2013 à 9 millions en 2014.

Avec une augmentation des patients dépendants et chroniques, ces coûts pourraient être en partie réduits par la consultation à distance ».

L’Aquitaine est aussi une des cinq régions à avoir été sélectionnées pour expérimenter le territoire de soin numérique (TSN), dispositif destiné à faire bénéficier les populations fragiles d’un suivi entre les soins de ville et les soins hospitaliers. Dans la région, cette expérimentation se déroule dans le département des Landes « au motif que c’est un territoire avec une faible densité avec une désertification médicale et des patients isolés ».

Pour Christophe Fillatreau, la nouvelle région va être un élément positif car les régions Poitou-Charentes et Limousin ont des particularités complémentaires de l’Aquitaine. Limoges où la population est la plus vieille de France abrite un living-lab avec un axe de recherche sur la gérontologie et sur le thème de la dépendance et du maintien à domicile. Toujours selon le président du Cluster, le volet industriel de l’ e-santé devrait permettre de créer un millier d’emplois dans les cinq années à venir.