Kreol West Indies : L’Isolé Soleil de la Pointe des Châteaux 

L’inventeur, au sens latin premier, c’est celui qui a trouvé un trésor, ou dans le domaine des sciences, celui qui décrit un “objet” nouveau. Un terme qui va comme un gant de diamantaire à Vincent Nicaudie, “l’inventeur” du concept et de l’espace Kreol West Indies. “Ce lieu de mémoire récemment inauguré est le second espace muséal de ce type — après celui de Grand-Bourg de Marie-Galante (lancé en mai 2012)”. Des espaces construits selon un concept novateur : mêler arts contemporains et objets du patrimoine, outre une boutique commerciale attenante, proposant beachwear, produits éco-citoyens du terroir — sacs, articles en voile et matériaux recyclés —et articles humanitaires, en soutien à l’association Terre d’Azur.

Un espace muséal d’initiative privée

Cette enclave aux trésors à multiples facettes s’affirme déjà en référence touristique. C’est une “œuvre mosaïque” faite de pièces de collection étonnantes, patiemment rassemblées par le guide-hôte de ces lieux, au long d’une immersion passionnée quasi trentenaire entre terre et mer (mère ?) de Guadeloupe, au fil de ses déambulations dans les Caraïbes. De cette Guadeloupe an tan lontan reconstituée, il a sélectionné et rassemblé les fragments entrelacés, au cœur d’un espace muséal de 400 m2. Et c’est à un embarquement immédiat pour un voyage dans le temps inédit que convie l’exposition permanente qu’il a baptisée “4000 ans d’histoire”. En ce lieu emblématique, peuplé d’objets-témoins uniques et émouvants du riche patrimoine antillais (mobilier, objets usuels, outils et autres bibelots du quotidien d’antan), les rencontres contemplatives qu’on y fait parlent à la mémoire autant qu’aux sens, alertés par tant de précieu-ses beautés.

Une expo coup de cœur, servie par une scénographie coup de foudre, donne à parcourir, en strates chronologiques
signifiantes, des repères historiques documentés. Civilisations précolombiennes, flibuste et piraterie, colonie et économie de plantation, immigrations post abolition de l’esclavage… autant de jalons mémoriels tour à tour passés en revue, avec les commentaires éclairés de notre guide du jour.

Une authentique case créole aux trésors

Au final, un revigorant “tout” fait de beaux morceaux de bravoure amassés par Vincent au hasard de ses plongées, au fil de ses voyages d’outre-monde — il était responsable touristique de haut vol, dans une autre vie —, le requiem grandeur nature d’une immersion recueillie et ludique en terre de beaux souvenirs. Dans cette authentique “case créole aux trésors”, tendez l’oreille : elle vous contera notre Histoire. “Une histoire d’archipel attentive à nos quatre ra-ces, nos sept langues et nos douzaines de sangs”.*

Une visite s’impose. Pour se réjouir l’œil et s’ouvrir l’esprit au spectacle de la foisonnante collection d’objets du patrimoine mobilier antillais exposés, des œuvres d’art contemporain d’artistes plasticiens locaux rassemblées (Félie-Line Lucol, Jean-Marc Hunt, François Piquet, Line, Vava…). Elles côtoient les peintures éclatantes de couleurs et d’expressivité de grands maîtres haïtiens réputés (Préfète Duffaut, Stivenson Magloire, André Pierre, Louisiane Saint-Fleurant, Alexandre Grégoire), outre une multitude de vestiges mémoriels de belle facture, au long d’une déambulation voyageuse et ravie.

De quoi étancher avec bonheur “une soif d’épanouissement, par le dépassement lucide des blessures de l’histoire et de l’isolement des géographies”, en ouvrant les portes de cette authentique “case aux trésors” aux allures d’Isolé Soleil réinventé. Une case-soleil qui inonde des lumières du passé le cœur présent et l’âme vive du visiteur de souche ou de passage, dans ces Kreol West Indies de belle mémoire.

*cf. le poème liminaire de “L’Isolé soleil” du romancier poète guadeloupéen Daniel Maximin.