Ce skipper malouin, guadeloupéen d’adoption, porte haut les jeunes navigateurs locaux autant que son autodérision. A 60 ans, le pilier du centre de formation Guadeloupe Grand Large, élevé au rang de chevalier de l’Ordre national du mérite, prendra le départ de sa 6e Route du Rhum.

 Par Julie Clerc

La course au large est un type très revigorant de démocratie sportive. Voilà un sport de haut niveau qui fait se confronter sur une même ligne de départ femmes, hommes, jeunes et (beaucoup) moins jeunes, stars généreusement sponsorisées et amateurs aux budgets façon bas de laine. En mer, pas de problème de genre ou de date de péremption, un seul critère vital est requis : être un vrai marin. En 2014, 91 navigateurs ont couru la Route du Rhum, le plus jeune avait 19 ans, le plus âgé 75. Et c’est Loïc Peyron, 54 ans, qui remporta la course à bord d’un redoutable maxi trimaran. 

C’est donc avec une certaine fierté que nous rencontrons Luc Coquelin, 60 ans, qui appréhende sa 6e participation la fleur au fusil. « Mes copains m’ont poussé. J’ai le bateau et le physique, et je me sens zen. Ca doit être l’âge ! » Luc n’a plus rien à prouver. Son bateau, le même sur la ligne de départ depuis 20 ans, ne prétend pas rivaliser avec les fusées nouvelle génération. Mais il peut se vanter d’être le seul de l’histoire de la Route du Rhum à avoir pris le départ et terminé cinq fois la course. Le Top 50 de Coquelin ? Un navire robuste qui brille par sa simplicité, gage de fiabilité, épris de près et de portant, les deux allures les plus fréquentes sur un Rhum. 

50 transats au compteur, des navigations dans tous les coins du monde, Coquelin en a vu d’autres. « Je ne suis pas un grand marin, mais je suis un marin » résume le skipper qui a embarqué sur son premier cargo à 16 ans. « J’ai été bien formé, très jeune, et je suis allé me faire secouer dans des mers pas faciles, loin de la douceur antillaise. C’est ce que j’essaie de transmettre à mes élèves. Acquérir de l’autonomie technique, médicale et psychologique, ce n’est pas si évident. Et pour ça, il faut beaucoup naviguer. On apprend la rigueur, le sérieux, le respect de l’environnement. » Des valeurs que le formateur prodigue depuis six ans à ses poulains de l’école de navigation Luc Coquelin et de Guadeloupe Grand Large, centre de formation aux métiers de la course au large. Parmi eux, on
retiendra Benjamin Augereau et Kéni Piperol, qui devrait être un bon candidat pour le Rhum 2022.

Pourquoi ce 6e engagement ? « Je suis accro à l’eau salée ! » lance-t-il. Luc se paie la Route du Rhum comme on s’offre un bon resto : pour prendre son pied. « Quand je navigue, j’ai la sensation d’avoir 18 ans. Je n’ai plus mal nulle part. Si je mange mal, si je dors mal, si je suis mouillé, si j’ai froid, ce n’est pas grave. Plus rien ne me dérange! » Luc Coquelin a navigué toute sa vie. « Je dois avoir ça dans la peau » résume-t-il, un brin philosophe. « J’ai encore la chance de pouvoir le faire à cet âge-là. J’ai des copains qui ne sont plus là, ou qui ne peuvent plus naviguer… Ca fait 40 ans que je passe l’écluse de Saint-Malo, j’adore ça. Cette ville est importante pour moi. Je suis chez moi au départ et à l’arrivée de la course. Psychologiquement, ça aide. » C’est une tradition, Luc sortira sa guitare à Saint-Malo pour des concerts pop-celtiques donnés avec quelques copains. « Cette convivialité est géniale. La présence de la Guadeloupe à Saint-Malo en 2014, c’était énorme ! »

 

La présence de la Guadeloupe  à Saint-Malo en 2014, c’était énorme !

Luc Coquelin Skipper de « La mer pour tous »

 

Le Top 50 

« La mer pour tous »

Luc Coquelin est partenaire 

du Rotary Club de Grande-Terre Pointe des Châteaux. 

L’objectif : faciliter l’accès à la mer aux personnes à mobilité réduite.

Le bateau courra en classe Rhum.

Année de construction : 1997

Longueur : 15,24 m

Largeur : 3,60 m 

Titrant d’eau : 4 m

Gréement : ketch

Surface de voile 

au près : 170 m2

Au portant : 300 m2

Déplacement : 6,7 t