François Herman est directeur d’Océan, une entreprise spécialisée dans la production aquacole.  L’ancien directeur du Sypagua dresse un état des lieux de la filière aquacole en Guadeloupe.    

Propos recueillis par Willy Gassion                                

L’aquaculture en Guadeloupe est moribonde. Pourquoi ?

François Herman : les raisons sont multiples. La contamination par la chlordécone des sols et rivières du Sud Basse-Terre et de Martinique, a conduit à la quasi disparition de la filière d’eau douce. La raréfaction et les difficultés d’accès au foncier limitent les possibilités de relance. Le futur de l’aquaculture antillaise est donc essentiellement marin.  Et le potentiel est réel. L’aquaculture mondiale constitue le secteur de la production alimentaire qui se développe le plus vite depuis trente ans, principalement dans les régions chaudes où les espèces élevées poussent deux fois plus vite qu’ailleurs. La Guadeloupe importe les deux tiers du poisson qu’elle consomme. Il y a donc des perspectives pour développer cette activité sur notre territoire et réduire notre dépendance alimentaire. Mais les freins demeurent : des surcoûts de production, de faibles capacités de financement, un manque d’investisseurs, une réglementation contraignante, des procédures d’installation trop longues… Ainsi parmi les porteurs de projet accompagnés par Sypagua peu ont abouti. Citons le projet Dipagua, porté par deux jeunes de Baie-Mahault qui, après l’obtention d’une concession de cultures marines, restent en attente depuis des années de l’AOT (Autorisation d’occupation temporaire) sur le littoral de Baie-Mahault.

Un autre obstacle est le retard pris dans la mise en œuvre du FEAMP (Fonds Européen des Affaires Maritimes et de la Pêche). La quasi-totalité des mesures liées au FEAMP dans la programmation 2014-2020 n’est toujours pas opérationnelle. Il y a urgence ! Sans soutien à l’investissement, les porteurs de projet ne peuvent pas concrétiser leur projet alors qu’ils sont en mesure de bénéficier de 80% d’aide publique.

L’aquaculture aux Antilles bénéficie-t-elle du soutien de la recherche ?  

L’Ifremer accompagne l’aquaculture ultramarine, mais les moyens de la recherche ne sont pas à la hauteur des enjeux. La maîtrise de l’élevage d’une espèce native implique sept à dix ans de travaux et ne sont mobilisés que deux chercheurs pour l’aquaculture des cinq Dom !

Qu’en est-il du Sypagua ?

Il a été mis en sommeil faute de financement public pour son fonctionnement. Cependant, il y a une volonté de relance avec un soutien de la Région, en redéfinissant ses objectifs : l’accompagnement, l’expertise et la prospective au service du développement local, l’amorce de programmes de coopération, avec le Mexique par exemple pour un programme de transfert de savoir-faire sur le lambi. Relancer aussi les activités aquaculture en eau douce par le développement de l’aquaponie qui associe aquaculture et cultures maraichères en circuit fermé intégral.

Quelles sont les missions d’Océan, la société que vous avez créée ?

Notre principale activité est la production de produits finis de l’œuf à l’assiette pour les ouassous, le tilapia et surtout le loup caraïbe, notre produit phare.

Une autre de nos missions est l’expertise et le conseil. Océan a obtenu un agrément de la DIECCTE pour devenir organisme de formation professionnelle. Depuis 1999, Océan a formé plus d’une centaine d’étudiants stagiaires, techniciens ou ingénieurs, mais aussi des techniciens indiens dans le cadre d’un programme de coopération franco-indien. Notre compétence est donc reconnue au niveau international et national puisque nous travaillons en réseau avec les acteurs de l’aquaculture de l’Outre-mer.

A ces activités, s’ajoute l’agrotourisme pour valoriser nos produits et les faire connaître, avec visites et dégustations au Parc aquacole à Pointe-Noire.

Quelles sont les modalités de production d’Océan ?

Nous militons pour le développement de l’aquaculture durable. Respect du produit, du consommateur et de l’environnement constituent notre credo. Nous privilégions la qualité à la quantité donc : aucun médicament de l’œuf au produit fini, pas de pollution générée et un circuit court. 

Océan

Parc aquacole, Route des Plaines

97116 Pointe-Noire

0590 98 11 83

ocean@orange.fr