Depuis 1974, l’association des moyennes et petites industries (AMPI) accompagne les industriels, défend et valorise leurs productions.
C’est à elle que nous devons le fameux logo « Produit Péyi ».
Rencontre avec Christophe Wachter, secrétaire général.
Comment est née l’industrie guadeloupéenne ?
Christophe Wachter : Cette question est très intéressante.
On pourrait situer son émergence à l’époque coloniale, avec la mécanisation des activités de transformation de la canne à sucre.
Mais elle est réellement apparue à la fin des années 1960, après la crise de l’industrie sucrière.
Deux événements l’expliquent :
- La décision du Général de Gaulle d’implanter une minoterie et une cimenterie sur la Pointe Jarry
- La diversification des activités de production née de la volonté de fabriquer sur place des produits jusque-là importés – clous, grillage, fenêtres en aluminium…
Si vous deviez dresser le portrait robot de l’industrie guadeloupéenne…
BTP compris, l’industrie guadeloupéenne totalise plus de 5 000 entreprises et 16 000 emplois dans huit secteurs d’activités :
- agroalimentaire
- ameublement/literie/bois
- énergie et traitement des déchets
- imprimerie/papier/carton
- industries chimique et pharmaceutique
- industries liées au bâtiment
- matières plastiques et pneumatiques
- transformation des métaux
L’industrie représente 10% de la population active et environ 8% de la richesse produite localement.
Le secteur est composé d’entreprises jeunes avec des salariés bien formés qui produisent de la qualité.
Depuis les années 1970, des entreprises font donc le pari de l’approvisionnement du marché domestique en productions locales. Quel est le bilan de quarante ans d’import-substitution ?
Il est mitigé.
- Du côté positif
Les productions emblématiques de Guadeloupe représentent un savoir-faire et un goût particuliers qui gagnent des points à l’international.
La fraîcheur des produits proposés par nos industries agroalimentaires notamment a permis de positionner le local en bonne place dans les choix des consommateurs.
Nous pouvons être fiers du dynamisme de nos unités de production et des emplois qu’elles créent.
- Du côté négatif
Ces productions guadeloupéennes demeurent très concurrencées par des équivalents importés, sur un territoire où les habitudes restent orientées vers la consommation de produits en total décalage avec notre milieu géographique et socio-culturel.
En effet, la Guadeloupe importe dix fois plus qu’elle n’exporte… Comment l’industrie locale supporte-t-elle la compétition face aux marchandises importées ?
La Guadeloupe est structurellement et culturellement un territoire orienté vers la consommation de produits importés.
Tout cela trouve son fondement principal dans notre dépendance multiséculaire vis-à-vis des marchés émetteurs de France et d’Europe.
Les chiffres que vous évoquez procèdent de cet état de fait, beaucoup plus que d’une incapacité locale à les rééquilibrer.
« Les outils industriels disponibles sur le territoire sont dimensionnés sur des standards européens, avec d’importantes capacités qui demeurent largement sous-employées. »
Et rares sont les industries guadeloupéennes qui fonctionnent selon les trois huit aujourd’hui.
C’est bien la preuve que notre potentiel actuel est bridé par l’arrivée massive de biens de consommation importés.
Quels sont les défis de l’industrie guadeloupéenne à l’aube de la nouvelle décennie ?
- Continuer à gagner des parts de marché d’abord, avec le soutien de consommateurs patriotes sur le terrain économique.
- Poursuivre la structuration des filières.
- Faire la part belle à l’innovation, au marketing, à la conscientisation, au courage politique et économique.
Et l’AMPI dans tout ça ?
Ses instances dirigeantes ont réussi à se positionner à tous les niveaux d’interlocution politiques et économiques, du terrain local au niveau européen.
L’AMPI porte la mention valorisante Produit péyi, facteur d’identification des biens issus de nos industries locales.
En novembre, elle organise d’ailleurs un séminaire de réflexion autour du thème : « La croissance économique par le développement du capital humain et la création de valeur ajoutée locale ».
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