Innover sans disposer d’importantes ressources en R&D et de centres de recherche, c’est possible. Navi Radjou parcourt la planète pour en convaincre toutes les générations de chefs d’entreprise avec le concept d’Innovation Frugale.

« Faire mieux avec moins ». La formule pourrait être celle d’un entrepreneur désespéré tentant de remobiliser ses équipes. C’est en fait un consultant indien, Navi Radjou, qui en fait son mantra.

Depuis sa prise de parole au TedGlobal de Rio de Janeiro en 2014, l’«Innovation jugaad » ou « innovation frugale » fait sensation dans toutes les conférences où il intervient.

A la fin de l’année dernière, il a publié un opus didactique, « Le Guide de l’innovation frugale : les 6 principes clés pour faire mieux avec moins » pour démocratiser sa pensée et ce modèle qui, à en croire l’auteur natif de Pondichéry, est capable de révolutionner le monde de l’entreprise.

Less is more : comment innover avec peu de ressources

« La rareté des ressources n’est pas une contrainte mais une source d’émancipation ».

Cette approche, Navi Radjou la tire de ce qu’il a pu observer en regardant de près les classes sociales défavorisées dans des pays défavorisés. L’ingéniosité qui s’y crée, l’acquisition des qualités et des valeurs nécessaires pour s’en sortir deviennent une source d’inspiration pour l’économiste.

Ainsi est né le concept d’« innovation jugaad » (innovation frugale) dont le terme hindi « jugaad » ou « débrouillardise » traduit en définitive la « capacité ingénieuse à trouver une solution simple et efficace dans des conditions adverses avec très peu de moyens ».

Un état d’esprit érigé en modèle de développement économique capable de faire naître des solutions ingénieuses à partir de ressources existantes.

Couverture Le guide de l'innovation frugale - Navi Radjou
« Le Guide de l’innovation frugale : les 6 principes clés pour faire mieux avec moins », Diateino Eds. (octobre 2019).

L’innovation frugale, un modèle universel

Une approche séduisante sur le papier, et déjà urgente, avertit l’auteur. N’en déplaise aux sceptiques, nostalgiques du plastique à usage unique, et amoureux des volutes des usines à charbon, tout indique qu’un monde nouveau se prépare et que des capacités d’adaptation affutées vaudront de l’or.

Les entreprises les premières doivent apprendre à « faire plus avec moins ».

Pour les sensibiliser et les former sur le sujet, le théoricien propose quelques grands principes de l’innovation frugale :

  • valoriser les ressources existantes (utiliser la lumière ambiante plutôt que l’électricité par exemple)
  • passer de l’économie linéaire à l’économie circulaire
  • façonner le comportement du client pour que celui-ci devienne un « consom’acteur actif »
  • associer des salariés à la réflexion de la stratégie d’une entreprise etc. 

Des innovations accessibles

Les exemples d’innovation frugale abondent, à commencer par la possibilité de privilégier le développement du réseau internet 2G existant qui couvre 90 % de la planète, plutôt que de poursuivre la course à la 5G, dont ne pourra disposer qu’une petite partie de la population mondiale…

Et Navi Radjou de citer une société française, BeBound, qui s’est positionnée sur cet objectif.

L’innovation n’a de sens, défend l’auteur qu’à condition de mettre ces innovations à la portée du plus grand nombre, en particulier dans les économies émergentes.

Une telle accessibilité à de nouveaux outils et produits de consommation technologiques performants amorcera à son tour de nouvelles avancées et alimentera le cycle de l’innovation.

Un cercle vertueux qui est peut-être déjà en train de changer le monde.