Coup de cœur : H’Art Guyane, la danse pour tous, valides et handicapés

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Yva Gelin

Fondée en octobre 2017, H’Art Guyane est une association dispensant des cours de danse classique et moderne pour enfants valides et en situation de handicap. Plus qu’un cours de danse, une leçon de savoir-vivre et être. – Texte Yva Gelin

Un chausson attend dans un recoin d’être retrouvé, une petite dans la précipitation vient d’effilocher son collant… L’univers de la danse est bien là. Ça s’active et papote aux vestiaires en attendant l’échauffement. Les enfants sont sous la direction de Gladys Demba qui, au-delà de transmettre une pratique sportive, inculque aux enfants la notion d’un certain savoir-vivre en communauté, le tout dans l’apprentissage de la tolérance. Bienvenue à H’Art Guyane, une école de danse pas tout à fait comme les autres.

Cours de danse - H'Art Guyane

« Il faut mélanger », le concept de H’Art Guyane

Pour prendre conscience du travail exercé au sein de l’association, il faut comprendre qu’être en situation de handicap implique des défaillances diverses, aussi bien mentales que physiques comme un bras sans mobilité, une jambe affaiblie, une audition imparfaite et qu’il ne s’agit pas d’enseigner les pointes à un enfant en fauteuil roulant. C’est davantage un travail de découverte corporelle qui s’opère dans cette classe de danse.

Au départ seule à assurer les cours, Gladys est maintenant entourée de 5 nouveaux formateurs, issus soit du milieu médical, soit de l’enseignement. Accompagnent ainsi les élèves, un pédiatre, une institutrice d’histoire-géographie, une accompagnatrice d’élève en situation de handicap (AESH) ou encore une danseuse atteinte de trisomie 21.

« Beaucoup de parents remarquent des améliorations motrices avec une meilleure coordination ou encore un maintien du corps plus harmonieux. »

Cependant, le concept de H’Art Guyane n’est pas de mélanger pour mélanger en espérant que le bon sens de chaque enfant fasse le reste. Comme le précise Gladys, « il est nécessaire d’être attentif aux capacités d’adaptation des élèves en situation de handicap. Ils seront toujours acceptés, c’est la politique de la maison, mais en fonction du profil, les classes ne seront pas seulement formées en fonction de l’âge. Il faut que les élèves se sentent en confiance ».

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Apprentissage dans la réciprocité

Comment est-elle devenue cette prof de danse, pour tous, valides et handicapés ? Gladys a une formation dans le handicap physique, moteur et sensoriel. Elle enseigne au centre de développement chorégraphique de Guyane dans les classes Ulis (classe de primaire avec uniquement des enfants en situation de handicap), et régulièrement, elle anime des projets en lien avec la danse et les personnes en situation de handicap. La jeune femme connaît donc bien le domaine.

« Pour les enfants valides nous sommes beaucoup dans la transmission de valeur telle que la tolérance et l’empathie. Être confronté aux différences les humanise. »

« L’un apprend de l’autre. Pour les enfants valides nous sommes beaucoup dans la transmission de valeur telle que la tolérance et l’empathie. Être confronté aux différences les humanise. Dans l’autre sens, pour les enfants en situation de handicap, ce décloisonnement permet une prise de confiance notoire. »  C’est finalement à ce moment que la magie opère. Après un certain temps, bien qu’il ne s’agisse pas du retour officiel d’un professionnel de santé, Gladys se réjouit des observations parentales. « Au fil des séances, l’enfant introverti s’exprime plus aisément. Beaucoup de parents remarquent des améliorations motrices avec une meilleure coordination ou encore un maintien du corps plus harmonieux. »

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L’expression du corps

L’apprentissage de la danse ne se résume pas à lever le menton, serrer les fesses et rentrer le ventre. C’est également une histoire de canalisation des émotions qui revient à utiliser son corps pour mieux exprimer ses émotions. « Lors des cours, il s’agit de faire comprendre que le corps a une parole et qu’en fonction de comment l’enfant bouge, il exprime un sentiment. Beaucoup d’enfants à leurs premiers cours sont dans la rigidité et l’impulsivité. Mais, progressivement, on remarque des mouvements plus souples et gracieux, indicatifs de sentiments plus positifs. »

« Les enfants en situation de handicap ont un mouvement pur. Beaucoup moins influencé par des codes sociaux et plus basé sur le ressenti. Il y a un véritable intérêt à les faire travailler ensemble. »

La notion d’expression du corps est d’autant plus intéressante du fait qu’un enfant valide ne bougera pas comme un enfant en situation de handicap. « Les enfants en situation de handicap ont un mouvement pur. Beaucoup moins influencé par des codes sociaux et plus basé sur le ressenti. Il y a un véritable intérêt à les faire travailler ensemble. » Ou comment des chaussons et un collant, un banal uniforme réussit à délier le langage du corps et donne une nouvelle voix à chacun.

H’Art Guyane
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