“Rendre la vie plus facile”. C’est à la fois un souhait, un sacerdoce et un business plan pour tous les professionnels du service et de l’aide à la personne. Un secteur bien plus large qu’on ne l’imagine. – Texte Yva Gelin 

« Au départ, explique Alain Bosetti, co-fondateur du salon des services à la personne et de l’emploi à domicile (dont la prochaine édition se tient les 23 et 24 novembre en ligne et en présentiel à Paris), les métiers du Service et de l’aide à la personne (les SAP) sont associés aux femmes de plus de cinquante ans qui une, fois les enfants élevés sont à la recherche d’un travail ne nécessitant pas trop de diplôme. Avant le Covid, c’était un métier invisible. Tout se fait à domicile, on ne remarque pas les salariés allant d’une maison à une autre. » Et pourtant, à l’heure des confinements, le service à la personne est plus que jamais un secteur d’opportunités. Parce qu’il s’agit de prestations non délocalisables, c’est même un atout économique pour le territoire. 

« Aujourd’hui, parce qu’il s’agit de prestations non délocalisables, c’est un atout économique pour le territoire. »

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L’aide à la personne : un secteur, des métiers 

Bienvenue dans ce vaste océan du SAP. La définition qu’en donne le ministère de l’économie, des finances et de la relance est la suivante : “les services à la personne sont les activités exercées à domicile, qui facilitent la vie quotidienne des familles et l’accompagnement des enfants en bas âge, des personnes fragiles, âgées ou handicapées”. Tout un programme et 26 activités réparties en trois secteurs :

  1. L’aide à la vie quotidienne
  2. L’aide à la famille
  3. L’aide aux personnes dépendantes

Dans le détail, la première catégorie comprend des activités telles que la livraison de repas à domicile, l’assistance informatique à domicile ou encore les petits travaux de jardinage ou bricolage. Dans la section aide à la famille c’est une panoplie d’activités qui prendront par exemple en charge les enfants et le soutien scolaire. Enfin, l’aide aux personnes dépendantes comprend toutes activités liées à l’assistance et à l’accompagnement de personnes dépendantes, autrement dit, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées.

Le secteur est large et en plein boom entrepreneurial mais cet envol n’a pas pour unique cause la crise sanitaire. Avant les années 2000 le secteur était surtout peuplé d’associations. Par la suite, afin d’encourager les activités dans ce secteur à se développer le domaine s’est structuré progressivement tout en proposant des avantages fiscaux et le point de départ fut la loi Borloo en 2005.

Loi Borloo kezako

A l’époque ministre de l’Emploi, du Travail et de la cohésion sociale, Jean-Louis Borloo a voulu structurer le secteur du service et de l’aide à la personne. Pour faire simple, ce plan avait pour objectif de créer 500 000 emplois en 3 ans et de prévoir une législation plus précise du secteur. Deux objectifs atteints : 
• 500 000 emplois ont été pourvus
• Les chèques emploi service universel (Cesu) ont été créés,
• Les procédures de déclaration et d’agrément se sont simplifiées,
• Pour certaines activités, le taux de TVA est maintenu à 5,5% ou 10%
• L’Agence nationale des services à la personne (ANSP) a vu le jour

Structurer le service à la personne

Comme l’explique le président du salon des services à la personne et de l’emploi à domicile,
« jusqu’en 2005 les entreprises étaient minoritaires dans le domaine du SAP. Aujourd’hui la tendance s’est inversée ».

Outre la loi Borloo, des aides se sont ajoutées et ont permis de mieux structurer le secteur. La plus importante de toute : l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA). Mise en place en 2001, elle a pour objectif de favoriser la prise en charge des dépendances et  le maintien à domicile en diminuant le reste à charge. Autre mesure phare, celle de l’Adaptation à la Société de Vieillissement en 2015 qui encadre le statut des aidants.

Aujourd’hui la demande est telle dans le secteur, « qu’il est plus difficile de trouver un intervenant qu’un client », explique Alain Bosetti. « Le marché est sous tension et c’est le salarié que beaucoup d’entreprises et organismes cherchent à fidéliser. » Conséquence, « le rapport de force entre l’employeur et le salarié est inversé. Quelqu’un qui traite mal ses employés ne pourra pas rester sur le marché. »

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Secteur en mutation

Nous sommes donc face à un secteur en plein boom qui concerne des domaines tous aussi divers les uns que les autres tels que le transport, l’alimentation, la santé et bien d’autres… tant que l’activité est effectuée à domicile. Mais dans ce cas, à partir du moment où une entreprise qui digitalise son offre va proposer des services directement au domicile (de conseil, de divertissement…) est-elle systématiquement considérée comme du SAP ?

La limite de ce que sont les services et l’aide à la personne reste floue. Chaque professionnel du secteur interrogé le définit selon son expérience et son opinion. Alain Bosetti pour sa part, délimite le secteur en se basant sur la rémunération : « Chaque fois qu’il y a CESU*, il y a service à la personne et c’est tout ce qu’il y a à prendre en compte ». Et pourtant, le digital facilite bien le quotidien. Et rendre une activité ou un service plus accessible, ne serait-ce pas du service à la personne ? D’autant plus que comme l’affirme Alexandre Eruimy, Directeur général de Prestashop (application qui permet de créer sa boutique en ligne), « petits, moyens, et grands acteurs, tous les types d’entreprises sont concernés par la digitalisation. » Le SAP aurait donc probablement besoin de se redéfinir officiellement. La preuve s’il en est qu’il s’agit d’un secteur d’avenir, en pleine mutation.

Et puis, après tout, un métier n’est-il pas « le service » qu’un individu souhaite rendre quotidiennement à sa communauté ? En s’attachant à la facilitation du quotidien, une multitude de services et d’innovations sont peut-être en train de redéfinir le modèle du travail. 

*Le CESU (Chèque Emploi Service Universel) est une offre simplifiée pour déclarer les rémunérations d’un salarié à domicile pour toutes activités de service à la personne. Une garantie pour le salarié de disposer de droits à l’assurance maladie, au chômage ou encore à la retraite.

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