Documentaliste de métier, collectionneuse dans l’âme, bijoutière par passion, la créatrice Adeline Chapin se joint avec sa marque Calendé, à la lignée des rares femmes bijoutières martiniquaises. Autodidacte engagée dans la préservation du vestiaire bijoutier local, elle se raconte en quatre pièces, quatre bijoux, qui parlent autant d’elle que de la Martinique. – Texte Axelle Dorville

La chaîne forçat

« La chaîne forçat est pour moi la base du bijou local. Chaîne la plus classique de notre vestiaire, elle a cette particularité d’avoir des maillons striés de petites nervures, qui lui donnent un côté original par rapport aux modèles que l’on retrouve un peu partout dans le monde.

C’est aussi ce que j’explore dans mon travail : revisiter voire surcycler des bijoux traditionnels, les remettre en avant selon mon esthétique, proposer une nouvelle génération de bijoux qui parlent de notre île.

Bien que l’histoire de la chaîne forçat ne soit pas réellement glorieuse -le maître offrait cette chaîne en or à son esclave favorite-, cette pièce me parle car c’est le premier bijou d’or qu’ont porté les femmes martiniquaises. C’est une pièce forte et symbolique toujours très appréciée de nos jours. »

Adeline Chapin, créatrice de bijoux - Calendé
Adeline Chapin lors d’un atelier de création de grain choux en Martinique février 2022 (Photo Pierre de Champs)

« Un des angles développés dans mon travail de recherche est également, au-delà du port du bijou, de pouvoir parler de ces rares femmes bijoutières, de leur histoire et de leur parcours. »

Le collier choux

« Je collectionne des portraits photo vintage de femmes martiniquaises et le collier choux est ce bijou très imposant et puissant que l’on observe porté dès les premières photos de Martiniquaises. Aussi ostentatoire que raffiné, ce collier est composé de grains choux spécifiques à la Martinique, dont la création demande beaucoup de minutie.

Je suis très proche de ce qui fait notre unicité martiniquaise et c’est véritablement une pièce qui représente toute la richesse bijoutière et le savoir-faire local. Le collier a aussi une importance toute particulière pour moi : il a été mon premier sujet de résidence de recherche et de création en partenariat avec l’espace artistique alternatif Seizemètrescarrés, dans le cadre du projet de recherche Martinique Bijoux Héritage.

Ce projet se destine à documenter la technicité et révéler l’histoire de nos bijoux, et surtout, à valoriser cette part peu étudiée du patrimoine local. Un des angles développés dans mon travail de recherche est également, au-delà du port du bijou, de pouvoir parler de ces rares femmes bijoutières, de leur histoire et de leur parcours, et de recueillir des témoignages pour constituer des archives communes pour raconter notre bijou. »

Adeline Chapin, créatrice de Calendé
Adeline porte une de ses créations, les boucles d’oreille en forme de feuilles de raisinier (Photo Pierre de Champs)

« Je m’applique à créer des bijoux émotionnels et j’espère que mes pièces évoqueront à ceux qui s’y intéressent, l’authenticité de la culture martiniquaise et caribéenne. »

La feuille de Raisinier

« C’est un hommage aux sous-bois des bords de mer et aux pas bruyants sur les tapis de feuilles séchées. La feuille de Raisinier est facilement reconnaissable et sa forme arrondie inspire la douceur.

Je m’applique à créer des bijoux émotionnels pour apporter un peu de poésie dans la parure et j’espère que mes pièces évoquent ou évoqueront à ceux qui s’y intéressent, l’authenticité de la culture martiniquaise et caribéenne.

Je décline la feuille en modèle lisse, texturée ou en version contour avec les rainures; elle est mini ou très grande comme la diversité si inspirante de feuilles existantes dans notre flore locale. »

Bijoux feuille de fwiyapen - Calendé
Grain choux, feuilles de raisinier, feuilles de fwiyapen et boucles d’oreille palétuviers créés par Adeline Chapin (Photo Pierre de Champs)

La feuille de fwiyapen

« Je voulais des pièces qui soient à la fois identitaires et peu communes, créer des bijoux inspirés de chez nous et de l’esthétique bijoutière martiniquaise, en réinterprétant la flore antillaise, telle que la feuille de raisinier déclinée en médaille, les racines entremêlées des palétuviers en boucle d’oreille ou le coui en bague.

C’est la création d’une feuille d’arbre à pain en laiton texturé portée comme un pin’s, qui a suscité pas mal de demandes et m’a permis de créer des bijoux sur demande. La feuille Fwiyapen, c’est le début de l’aventure Calendé ! J’espère pouvoir continuer mon travail de recherche pour pouvoir valoriser le patrimoine et le savoir-faire de la bijouterie martiniquaise. »

À lire également | Retrouvez tous les portraits de notre Hors-Série “Elles font la Martinique”