Entreprises. Exposé à une concurrence féroce de la part des produits importés, le secteur industriel local résiste et assure l’approvisionnement du marché domestique. C’est en situation de crise majeure que cette réalité et que le rôle de l’industrie locale apparaissent encore plus clairement. (Texte Lia Mancora, Photo Lou Denim)

Christophe Wachter, secrétaire général des MPI en Guadeloupe
Christophe Wachter, secrétaire général des MPI en Guadeloupe

Une production industrielle stable et diversifiée

Aujourd’hui, en Guadeloupe, la part de l’industrie oscille entre 7 et 10 % du PIB (produit intérieur brut) global. L’association des Moyennes et Petites Industries (MPI) regroupe huit secteurs d’activités : agroalimentaire, ameublement-literie-miroiterie, imprimerie-papier-carton, énergie et traitement des déchets, industrie chimique et pharmaceutique, industrie du bois, transformation des métaux et matières plastiques. L’archipel peut ainsi se targuer d’un tissu industriel stable et diversifié, à l’inverse du mouvement de désindustrialisation observable en France hexagonale.

Pour autant, notre industrie locale est souvent négligée. « Nous vivons dans un monde de plus en plus standardisé », constate Christophe Wachter, secrétaire général des MPI en Guadeloupe. « Les produits importés bénéficient généralement d’une meilleure réputation et sont considérés comme étant moins chers et de meilleure qualité, ce qui n’est pas toujours vrai. Nos produits locaux se trouvent souvent défavorisés sur l’autel de politiques commerciales hyper agressives, les reléguant à une place secondaire sur leur marché naturel. Et ce, alors que la production locale dispose de nombreux atouts : une fraîcheur, une proximité avec le producteur, une logique de circuit court, la création d’une valeur ajoutée sur le territoire, le maintien des savoir-faire, la création d’emplois qualifiés et évolutifs, et évidemment une empreinte carbone moins élevée ».

« Lors du cyclone Irma, l’approvisionnement de Saint-Barth et Saint-Martin, en très peu de temps, en eau et en denrées alimentaires a été d’un très grand secours. »

L’industrie locale, indispensable à la résilience du territoire

Les MPI soulignent aussi le rôle déterminant que joue la production locale en situation de crise, qu’il s’agisse de crise sanitaire, de catastrophe naturelle, de perturbation du transport ou de poussée inflationniste. 

Lors des épisodes dévastateurs des cyclones Irma et Maria en 2017, ou plus récemment de la tempête Fiona, la production locale a eu l’occasion de démontrer son caractère indispensable pour le territoire. Le cas de l’eau en bouteille produite en Guadeloupe est particulièrement éloquent. Souvent boudées pour des raisons évidemment très discutables, les eaux guadeloupéennes reprennent de la valeur à l’occasion des catastrophes naturelles en étant les seules disponibles rapidement et en grande quantité. « Lors du cyclone Irma, l’approvisionnement de Saint-Barth et Saint-Martin, en très peu de temps, en eau et en denrées alimentaires a été d’un très grand secours », se souvient Christophe Wachter. « Sans cela, ces îles n’auraient peut-être pas échappé à des situations de quasi-guerre civile. » Après Irma, c’est encore l’industrie locale guadeloupéenne qui a pu alimenter les boulangeries de La Dominique en farine et en aliments pour bétail notamment.

Eau, yaourts, jus de fruits, confitures, sucre, viandes, poisson, œufs… La Guadeloupe est de plus en plus clairement en capacité de nourrir sa population et de conforter les approvisionnements dans les territoires environnants. Cet état de fait est également mesurable au regard de la crise structurelle de l’eau qui touche nombre de foyers guadeloupéens. Des citernes fabriquées localement permettent d’y faire face. 

Production de tôle en Guadeloupe

Autre exemple récent : la crise sanitaire du Covid-19 s’est traduite par des infléchissements d’approvisionnements en provenance de l’Europe. Conséquence : ce sont, une fois de plus, les entreprises locales de production qui ont assuré le relais en matière alimentaire, comme en matière d’équipement ou d’aménagement de la maison (bois, tôle, piscine, etc.). Une tendance qui s’est tassée après la crise mais dont la valeur d’exemple mérite d’être rappelée. 

On observe enfin qu’en période d’inflation galopante à l’échelle mondiale, comme c’est le cas actuellement depuis la guerre en Ukraine, l’industrie locale permet d’amortir les répercussions sur les prix pratiqués. « Au niveau international, les augmentations des prix des matières premières sont vertigineuses », souligne Christophe Wachter. « Matériaux, blé, café, huile, aluminium, acier, engrais, papier, carburant… Aucun secteur n’est épargné. Toutefois, du fait des stocks dont disposent les industriels locaux en raison de leur éloignement des marchés émetteurs, les répercussions sur les prix ont été soit amoindries, soit retardés sur notre marché »

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