Le Crédit Agricole Martinique Guyane a accueilli les clients LCL Guyane il y a un an. L’occasion de revenir sur les fondements et les ambitions de cette banque coopérative et engagée pour ses territoires avec France Villette, directrice générale du Crédit Agricole Martinique-Guyane.

Texte Floriane Jean-Gilles – Photo Jean-Albert Coopmann

Le Crédit Agricole est une banque coopérative 100% locale, qu’est-ce que cela signifie concrètement pour les particuliers et les entreprises ?

L’histoire de la construction du Crédit Agricole est intéressante car elle démontre que l’ancrage local fait partie de son ADN. La caisse régionale de la Martinique et de la Guyane s’inscrit dans cette histoire. Elle a été créée ici, sous forme coopérative, comme les 38 autres caisses régionales du groupe. Son capital est composé d’une part, des parts sociales souscrites par les sociétaires martiniquais et guyanais, d’autre part, des résultats réalisés et conservés en réserves pour continuer à investir localement. Son conseil d’administration est composé de représentants des sociétaires des caisses locales et est présidé par Alex Rosette, entrepreneur martiniquais reconnu.

Cette forme coopérative lui confère toute latitude pour construire une politique locale parfaitement adaptée à ces deux territoires. Toutes les décisions sont prises ici, en d’autres termes, nous pouvons réagir très vite. Par ailleurs, le principe coopératif « un homme-une voix » est immuable et est inscrit dans notre mode de fonctionnement. Le fait que la caisse de Martinique-Guyane soit l’une des plus petites caisses du groupe ne signifie pas que sa voix sera minimisée, bien au contraire et cela est une vraie richesse pour la Martinique et la Guyane. Aujourd’hui, un dirigeant de la banque peut porter la parole des besoins de nos territoires, au même titre que la caisse d’Île-de-France, en prenant en compte toutes ses spécificités. Nous sommes intégrés à nos territoires. Nous travaillons avec les acteurs locaux, tels que les chambres consulaires ou les associations comme Réseau Entreprendre ou 60 000 rebonds par exemple, dans l’objectif d’établir une relation de confiance durable au profit de nos clients et sociétaires. Nous nous donnons les moyens pour créer de la valeur afin de la réinvestir sur le territoire ; et notre stratégie est claire : il s’agit de continuer à financer nos territoires en dépit des crises qui secouent les marchés financiers.

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Votre bilan 2022 a été positif, comment s’annonce l’année 2023 ?

À fin juin, les résultats du premier semestre sont meilleurs qu’anticipés. Nous avions prévu un ralentissement de la demande de prêts habitat en raison de deux phénomènes : d’une part, les mesures mises en place par le Haut Conseil de stabilité financière à la sortie de la crise sanitaire, à savoir un taux d’endettement maximal de 35 % et l’interdiction d’endetter les ménages sur plus de 25 ans, et d’autre part, la remontée du taux d’usure, c’est-à-dire le taux maximum auquel les banques peuvent prêter. En réalité, ce n’est pas ce qui s’est passé. Le premier semestre s’est inscrit dans la continuité de l’année 2022, avec 61 millions d’euros de crédit habitat réalisés pour 62 millions d’euros, à fin juin 2022.

Concernant les entreprises, nous constatons toujours un nombre important de projets à financer, principalement des investissements de développement (création, achat ou reprise d’activité).

Le premier semestre a donc mieux fonctionné qu’escompté…

Oui avec, côté crédits, 253 millions d’euros injectés dans les économies martiniquaises et guyanaises (contre 239 millions d’euros, à fin juin 2022). Côté épargne, nous avons lancé en fin d’année dernière le Livret Engagé Sociétaire : c’est un livret d’épargne dont les fonds servent à financer des projets autour du développement durable. Cette initiative porte ses fruits. D’ailleurs, nous avons connu une belle progression puisqu’aujourd’hui 46 % de la clientèle est sociétaire, avec pour objectif d’atteindre 50 % cette année. Autant d’éléments qui ont dépassé nos projections pour le premier semestre 2023 et nous rendent plus confiants pour la suite de l’année.

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Dans le contexte inflationniste actuel, quelle est la situation économique en Guyane ?

La Guyane connaît un développement très rapide du fait de sa démographie. Les opportunités d’investissement y sont nombreuses, que ce soit dans la construction de logements ou la distribution. Des entrepreneurs créent également de nouvelles activités à partir de la richesse de la biodiversité guyanaise (agroforesterie, agriculture raisonnée, biotechnologies…).

En tant que banque régionale, quels enjeux avez-vous identifiés au Crédit Agricole ?

L’accès au foncier est plus aisé en Guyane, mais les parcelles proposées sont souvent difficiles d’accès. Dès lors, les travaux de dégagement et de traçage des pistes sont un enjeu important, car c’est un préalable à l’installation des exploitations.

L’autre enjeu est la qualité énergétique des bâtiments et des logements. Nous souhaitons nous investir dans cette démarche, à commencer par nos agences. Cela signifie contribuer à recréer des filières pour réintroduire les savoir-faire et les compétences qui ont disparu et construire selon des normes adaptées à notre environnement.

A notre échelle, quelles sont les grandes orientations vers une économie plus verte ?

Le solaire et la géothermie nous paraissent bien adaptées et nous soutenons les projets de ces secteurs. Et bien sûr l’hydroélectricité en Guyane. Nous parlions de rénovation énergétique des bâtiments tout à l’heure : mettre en place des solutions pour réduire le recours à la climatisation est une orientation que nous souhaitons accompagner plus systématiquement.

Quand on parle d’économie verte, on parle aussi, et surtout, de décarbonation de l’électricité, ce qui est un défi pour la Martinique. Des entreprises comme la SARA et EDF y travaillent. Le Crédit Agricole souhaite être présent dans tous ces projets collectifs. Nous pouvons également citer les projets autour de la biomasse portés par Holdex ou Albioma, en Martinique, et Voltalia, en Guyane, avec lesquels nous travaillons en partenariat avec l’AFD et la BPI. Il s’agit également d’accompagner nos clients des secteurs tertiaires et industriels vers cette transition énergétique et de nous assurer qu’ils en ont intégré les exigences.

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On parle d’objectif « net zéro carbone »… Est-ce un objectif réalisable ?

C’est accessible, il faut que chacun soit convaincu, ce qui n’est pas encore le cas à mon avis. Il sera, en revanche, nécessaire d’aider les plus modestes ; mais avec une vraie volonté politique et le poids des acteurs privés qui en ont les moyens, la transition peut aller plus vite qu’on le croit.

Quelles sont les ambitions et perspectives pour 2024 pour le Crédit Agricole ?

Le Crédit Agricole s’inscrit dans la durée : nous sommes là depuis longtemps et serons là encore longtemps ! Le conseil d’administration a défini une feuille de route de long terme : la relation client, le professionnalisme des équipes, la qualité des relations humaines dans l’entreprise, le développement durable, l’économie circulaire (nous recyclons les équipements et matériels dont nous n’avons plus l’utilité), le développement des productions locales, la relève des métiers de l’agriculture : autant d’orientations de fond à tenir. Cette feuille de route est nourrie par des actions qui vont se dérouler sur un trimestre ou plusieurs années. Notre orientation pour 2024 est de continuer dans cette voie, de continuer d’être le 1er financeur sur les deux territoires et pour toutes les clientèles. Nous poursuivrons les programmes pour améliorer la satisfaction de nos clients et nos pratiques managériales pour des relations encore plus sereines.

Nous avons également un projet avec la mairie de Saint-Pierre autour de la préservation du patrimoine, qui, nous l’espérons, verra le jour.

Credit Agricole
Agence de la Galleria – Credit Photo Jean-Albert Coopmann

Être la première femme à diriger le Crédit Agricole est-ce une responsabilité supplémentaire ?

Dans l’entreprise, vis-à-vis des partenaires et des clients, vis-à-vis du groupe, vis-à-vis des femmes martiniquaises et guyanaises, oui. Voir une femme diriger une entreprise, c’est important pour tout le monde, donc c’est une responsabilité. Mais le monde est en train de changer, beaucoup de femmes entreprennent et cela devient naturel.

Le Village by CA, Fort-de-France
Le Village est pluridisciplinaire, c’est un accélérateur d’entreprises, lieu d’innovation
et de projection vers l’avenir qui accompagne des entreprises en début d’activité.
Une trentaine d’entreprises ont été accompagnées depuis son ouverture en février 2020.
Le 7e appel à candidature a été lancé du 10 mai au 18 juin 2023, 6 start-up ont été retenues.

Crédit Agricole Martinique-Guyane
21, rue Case Nègres
972 32 Le Lamentin
www.credit-agricole.fr/ca-martinique