Chaque mois, la rédaction se penche sur des métiers exercés avec passion, des carrières d’ultramarins susceptibles d’inspirer et d’encourager les nouvelles générations. Pour ce premier épisode de l’année, rencontre avec le Guadeloupéen, Axel Jacobin… bien plus qu’un simple professeur d’anglais.

Texte Alix Delmas

J’avais aussi envie de transmettre l’histoire caribéenne aux élèves, qu’elle prenne sa place dans nos manuels.

Axel Jacobin

Yes, Teacher !

Axel Jacobin enseigne l’anglais depuis 2007 dans l’Hexagone. Dès son retour de Manchester, à la fin de ses études, il débute par de l’assistanat de langue en école primaire puis obtient son CAPES pour enseigner dans le secondaire.

Sa progression professionnelle est rapide : tuteur puis formateur, il intègre le jury de recrutement des professeurs du CAPES (Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré) externe en 2016 et depuis 2021 celui du CAPES interne. 

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Axel Jacobin : un homme de conviction

Sollicité par un directeur de collection chez Hatier pour contribuer à la rédaction de manuels scolaires, sa réponse sera limpide : « oui, à la condition sine qua non d’évoquer l’histoire caribéenne ». Depuis lors, ce sont déjà cinq éditions auxquelles Axel Jacobin a collaboré en s’attachant à proposer un travail éditorial qui prend en compte la diversité des aires anglophones et notamment celle de la caraïbe. Il propose des séquences telles que l’ancrage précolonial avec les « First Nations », les Amérindiens, mais aussi des pans de l’histoire plus récente comme l’immigration jamaïcaine en Angleterre au XXème siècle : 

« J’ai notamment construit un programme sur la “Windrush Generation” (nom du paquebot Empire Windrush), ces Jamaïcains appelés pour soutenir l’effort collectif de reconstruction après la seconde guerre mondiale. Certains se sont installés, ont fondé des familles, ont occupé des professions délaissées, et pourtant nombre d’entre eux n’ont pas obtenu la nationalité, ce qui a notamment provoqué un scandale au parlement britannique en 2018. Je suis très friand d’enseignement transversal et cette séquence sur bien des aspects rappelle l’histoire du Bumidom aux Antilles. Beaucoup d’enseignants évoquent l’immigration à travers le rêve américain et Ellis Island, j’avais aussi envie de transmettre l’histoire caribéenne aux élèves, qu’elle prenne sa place dans nos manuels. »

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Connaître son histoire

S’il œuvre à une meilleure visibilité de notre histoire, il est important pour Axel Jacobin de rappeler que son métier vocationnel par essence vise à transmettre des connaissances, elles seules permettent de déconstruire les préjugés et combattre les idées reçues. 

À la question d’une figure historique qu’il admire, il cite Harriet Tubman, ancienne esclave, militante féministe antiraciste, qui, sur le « Underground Railroad » (chemin de fer clandestin) a aidé de nombreux esclaves américains à gagner leur liberté. Il rappelle qu’elle devait figurer sur les billets de 20 dollars américains et que Donald Trump, admirateur du président Andrew Jackson qui y figure actuellement s’y est opposé. En 2021, quelques jours après son investiture, Joe Biden a relancé ce projet.

Axel Jacobin souhaite apporter sa pierre à l’édifice

Homme de débat et de culture, son militantisme est apolitique. Né à Caen en 1984, Axel Jacobin arrive en Guadeloupe à l’âge de huit mois et y restera jusqu’à ses 18 ans. Danseur de Gwo ka, formé par Raymonde Pater-Torin, il a été membre fondateur de l’association Otentika à Rosny-sous-Bois, pour laquelle il donnait régulièrement des cours jusqu’en 2007 avant de cofonder la compagnie DNK avec Lydie Fesin, son acolyte depuis le lycée Faustin Fléret.

Si, entre ces deux vocations, il lui a fallu parfois faire des choix, son équilibre aujourd’hui réside aussi bien dans la danse que dans ses cours d’anglais qu’il dispense avec la même passion et le même engagement. Un militantisme qui puise ses origines à Morne-à-l’Eau, commune où il a grandi entourée d’une famille d’enseignants dévoués et engagés dans le milieu associatif :
« Tout jeune déjà, j’étais affairé à couper du tissu, à réaliser des tâches de mon âge pour apporter ma pierre à l’édifice. Je crois que je ne pourrais pas vivre autrement ».