Intégrer les savoir-faire traditionnels au BTP au Lycée Balata à Matoury
« Dans la filière du bâtiment, on peut commencer avec un CAP et finir ingénieur », constate Vincent Martin, proviseur du lycée Balata, en Guyane. Pourtant, les filières professionnelles peinent à se débarrasser de cette image de « voie par défaut », une idée reçue contre laquelle le lycée tente de lutter en améliorant sa communication et en resserrant les liens avec la Fédération du bâtiment.
Intégrer les savoir-faire traditionnels au BTP au Lycée Balata à Matoury
« Dans la filière du bâtiment, on peut commencer avec un CAP et finir ingénieur », constate Vincent Martin, proviseur du lycée Balata, en Guyane. Pourtant, les filières professionnelles peinent à se débarrasser de cette image de « voie par défaut », une idée reçue contre laquelle le lycée tente de lutter en améliorant sa communication et en resserrant les liens avec la Fédération du bâtiment.
Si, après la crise sanitaire, dans l’Hexagone, certains ont été séduits par une reconversion vers les métiers manuels, ça n’a pas été le cas en Guyane. « En tout cas je ne l’ai pas constaté », souligne Vincent Martin. Les lycées professionnels sont toujours contraints de redoubler d’efforts pour séduire les jeunes.
Le lycée Balata a par exemple organisé son Salon des métiers du BTP pour faire connaître ses formations. D’autant que les métiers évoluent, avec les nouvelles technologies d’une part, et, d’autre part, en valorisant le patrimoine bâti guyanais. Ainsi la brique de Guyane, qui avait été abandonnée et qui est remise au goût du jour depuis cinq ans, avec tous les atouts qu’elle représente, d’un point de vue énergétique et écologique. « On voit de plus en plus de constructions en briques », constate le proviseur, qui a aussi pour projet de mettre en place, d’ici à trois ans, une spécialisation en construction de l’habitat traditionnel guyanais.
L’habitat créole, l’habitat bushinengé et l’habitat amérindien ont chacun leurs spécificités. Un travail est donc mené avec l’université, les archives départementales et les maîtres bushinengé et amérindiens qui maîtrisent ces techniques ancestrales afin de les documenter et de définir des process utilisant les outils modernes qui pourront être enseignés aux jeunes. L’objectif est de développer une construction artisanale, voire semi-industrielle, qui s’appuie sur ces savoir-faire traditionnels.
« L’intérêt est double », explique Vincent Martin. « Il s’agit à la fois de sécuriser et conserver le patrimoine bâti guyanais, et de transmettre à nos jeunes ces techniques spécifiques à chaque culture et adaptées à notre territoire. »
L’excellence en partage
L’association des Compagnons du devoir et du Tour de France défend une vision d’excellence de plus de 36 métiers manuels repartis en 4 filières (Bâtiment & Aménagement, Technologies de l’industrie, Matériaux souples et métiers du goût).
Témoignage de Dimitri Andriot, compagnon maçon, chargé de développement international et Outre-mer.
« Nous avons bénéficié d’une belle vitrine durant le chantier de Notre Dame de Paris, un élan assez éphémère car nos métiers souffrent toujours d’un déficit d’image. Pourtant quelle satisfaction de construire, de façonner les paysages. Nous sommes les métiers les plus importants à l’homme. Si mon métier de maçon ne s’exerce plus comme dans les années 50 (avec un bénéfice pour la condition physique), grâce aux nouvelles technologies, il évolue en permanence et mobilise autant de compétences que de mobilité intellectuelle. Un maçon est un véritable chef de chantier, armé de tablettes et de théodolites (instrument de mesure permettant de calculer les angles entre des points précis de plans verticaux et horizontaux). Chauffagiste sanitaire mais aussi frigoriste, le plombier est devenu énergéticien quand le mécanicien fait de l’électricité, de la robotique comme de la programmation. Malgré la complexité de ces tâches, l’admiration va davantage à un avocat ou un médecin pour la difficulté de ses études sans que soient pris en compte le rythme et l’exigence de notre métier où l’apprentissage est aussi très long. La pénurie dans les métiers manuels est bien là, notamment en couvreurs et maçons. A contrario on note un regain d’intérêt pour les métiers de bouche grâce à la promotion des émissions de télévision qui parfois négligent l’envers du décor : ce long apprentissage pour exceller. De même les menuisiers et charpentiers sont bien représentés dans le compagnonnage. »
En chiffres
• 2010 : inscription du système français de compagnonnage sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco, « comme réseau de transmission des savoirs et des identités par le métier
• 3 000 jeunes effectuent actuellement leur Tour de France, et entre 350 et 400 vivent leur étape d’une année hors frontières.
• Entre 20 et 30 compagnons sédentaires sont présents sur chaque territoire, « entre 20 et 30 en Guadeloupe, une vingtaine en Martinique et en Guyane, une quinzaine à St Martin ». Anthony Macé, compagnon plombier en Guadeloupe explique qu’ils se réunissent régulièrement et peuvent intervenir à la demande des lycées ou parfois des universités pour expliquer ce qu’est le compagnonnage.