L’urgence climatique, une occasion de construire ensemble des décisions durables
Forte d’une pratique riche de nombreux projets, Astrid Siniamin-Rodap, maître d’œuvre experte amiable et architecte d’intérieur, élargit son champ d’action pour penser le territoire dans sa globalité.
Astrid Siniamin-Rodap © Jean-Albert Coopmann
L’urgence climatique, une occasion de construire ensemble des décisions durables
Forte d’une pratique riche de nombreux projets, Astrid Siniamin-Rodap, maître d’œuvre experte amiable et architecte d’intérieur, élargit son champ d’action pour penser le territoire dans sa globalité.
À Fort-de-France, trois décennies d’expérience font d’Astrid Siniamin-Rodap une référence en architecture d’intérieur, maîtrise d’œuvre et expertise amiable. Son parcours l’a conduite à accompagner aussi bien des particuliers que des entreprises, de la conception d’espaces de vie à la gestion complète de chantiers.
De l’architecture d’intérieur à la réflexion territoriale
Depuis cinq ans, elle a choisi d’élargir son horizon en proposant du consulting en architecture, urbanisme et environnement. Cette évolution traduit une conviction profonde : pour répondre aux défis contemporains, il faut dépasser la seule échelle du bâtiment et réfléchir aux dynamiques territoriales. C’est donc dans cette perspective qu’elle a intégré cette année le DU Urbanisme et architecture en contexte tropical multi-aléas, proposé sur le pôle Martinique de l’UA. « Intégrer cette formation est une manière de développer une expertise intellectuelle et méthodologique afin de contribuer à des politiques territoriales plus cohérentes, résilientes et justes », explique-t-elle.
« L’aménagement est un levier pour penser autrement nos villes, nos infrastructures et nos usages. Il structure ainsi la cohésion sociale et conditionne la résilience de nos territoires face aux crises ».
Vers une planification rigoureuse et partagée
Le DU lui a, entre autres, permis d’intégrer une dimension essentielle dans le contexte du dérèglement climatique : le diagnostic territorial. « Il s’agit de croiser des données techniques, économiques, humaines et culturelles », précise Astrid. « Ce travail ne se limite pas à une analyse froide, il révèle les forces et les fragilités d’un territoire, identifie les priorités et construit une vision stratégique commune ».
En Martinique, les vulnérabilités sont particulièrement visibles. « Nous avons, par exemple étudié les forces et faiblesses de certaines communes », raconte Astrid. « À Fort-de-France, le quartier Trénelle illustre bien ces risques : bâti « en coup de main » sur le flanc d’un morne, il est menacé par les glissements de terrain et exposé aux cyclones comme aux séismes. »
Astrid s’est également familiarisée avec des outils fondamentaux comme les SIG, systèmes d’information géographiques. « Ces outils permettent de superposer des données variées – réseaux, mobilités, risques naturels, équipements publics, données socio-économiques – et d’en tirer des scénarios d’aménagement cohérents. Ce sont des bases objectives, lisibles et partageables qui soutiennent la décision politique », poursuit-elle. Un socle indispensable pour affronter le grand défi caribéen, à savoir concilier, dans un même mouvement, développement économique, justice sociale et durabilité environnementale.
« Trop souvent, les décisions sont prises dans l’urgence, projet par projet, sans vision globale, et cela a pour conséquence des incohérences avec des zones mal desservies, des espaces dégradés, le gaspillage de ressources, et surtout un sentiment d’injustice pour les habitants », avance la consultante. Selon elle, une planification « rigoureuse et partagée » est une solution. Rigoureuse, parce qu’elle s’appuie sur un diagnostic solide. Partagée, parce qu’elle doit associer tous les acteurs concernés : élus, techniciens, habitants, acteurs économiques et associatifs, via des espaces de dialogue structurés et réguliers comme des ateliers citoyens, des concertations publiques ou des plateformes numériques participatives. Cette coconstruction donne de la légitimité aux décisions et permet d’anticiper les besoins réels plutôt que de subir les urgences. En un mot, « instaurer une gouvernance participative régulière, pour faire de l’urgence climatique une occasion de construire ensemble des décisions durables ».