Quelques jours après le décès inattendu de Roger de Jaham, MadinMag revient avec certains de ses compagnons de route sur la carrière de ce travailleur acharné, champion de la pub et de la communication. 

Par Thomas Thurar

Il était d’une époque où les fameux panneaux 4X3 n’existaient pas encore, les spots TV non plus, et encore moins la communication digitale. Une époque ou même le métier de publicitaire restait à inventer en Martinique. Roger de Jaham fut un des pionniers de la publicité et plus largement de la communication. Claude Huyghues Despointes, son ami d’enfance, mais aussi son concurrent plusieurs années plus tard se souvient de ce jeune homme plutôt bon dessinateur qui avait débuté ses activités dans le garage de ses parents. Il réalisait alors des dessins pour le quotidien France-Antilles.
« Roger de Jaham était quelqu’un d’entreprenant dans l’âme. Il a donc décidé de monter son agence au début des années 1970, Publicara ». M. Despointes, qui avait aussi son agence à cette époque, se souvient également du combat qu’il avait dû mener avec Roger de Jaham contre la toute puissante agence nationale Havas qui s’était arrangée à l’époque pour écarter les agences locales des revenus fructueux de la régie de la radio. Affaire qui s’était terminée en procès par la victoire des deux amis.

Au début des années 1980, Roger de Jaham, donna sa chance à un jeune venu de Métropole pour tenter l’aventure antillaise avec femme et enfants. Ce jeune directeur d’agence c’était Marc Brunier, qui dirigea et développa Publicara pendant une quinzaine d’années. « Dans les années 1990 on était les champions de la création. Je me souviens d’un grand prix de la pub où on a eu 9 prix sur 10 ». Attentif au mouvement du secteur, Roger de Jaham est à l’origine du regroupement des agences locales en un réseau qui s’appela Publidom, composé de sept agences autonomes. Le dessinateur se mua en visionnaire se rappelle Marc : « pour moi c’était un industriel de la pub, plus qu’un créatif, je pense. Il voulait développer une communication plus pertinente, plus forte parce que réalisée sur place. On a inventé un style, une authenticité que personne ne pouvait faire à notre place. »
Après l’avoir côtoyé plus de 20 ans, il le dépeint comme un fonceur, pas forcément souple mais profondément intègre.

Les années 2000 jetteront les bases d’une nouvelle organisation au sein de Publidom. Roger de Jaham confia les rênes du groupe à Emmanuel de Reynal en 2002. « Il a voulu mettre en place une gouvernance un peu plus opérationnelle, j’ai animé le groupe Publidom à ses côtés ainsi que la gérance des filiales. » Emmanuel de Reynal reconnaît que Roger de Jaham « a toujours eu un coup d’avance sur nos métiers. » Ce stratège a su anticiper les évolutions du métier, en accompagnant par exemple l’éclosion des sociétés de productions audiovisuelles pour la réalisation des premiers films publicitaires. Plus récemment en 2016, pour ne pas rater le virage de la communication digitale, il n’a pas hésité à signer un partenariat avec Havas avec lequel il avait eu des déboires au début de sa carrière.

Roger de Jaham a également servi de tremplin à d’autres acteurs du secteur, comme François Barbier, à qui il avait confié au début des années 2000 le développement de Publicara. « Il m’a encouragé lorsque j’ai créé Média Relais en 2004 », se souvient le communicant.

Enfin, Philippe Taieb rappelle que Roger de Jaham a aussi révélé ses talents de capitaine d’industrie dans l’imprimerie. « Il a débuté avec le marché des tickets de bus du GET dans les années 1970. Grâce à ce premier contrat, il a compris l’importance de l’imprimerie dans la communication et la production locale », assure Philippe Taieb. « Il fut également très présent dans le marché naissant des consommables informatiques, disquettes, cartouches d’encres en Martinique, Guadeloupe et Guyane avec les sociétés MULTI-CONTROLES et AREBORG. »

La rédaction de MadinMag rend hommage à Roger de Jaham et renouvèle ses condoléances à sa famille et à ses proches.