Égalité de soins. Dans le cadre de son Schéma régional de santé 2018-2028, l’ARS Guyane met en œuvre une politique de santé au plus près des besoins des populations les plus isolées. Embarquement immédiat pour Antecume-Pata, un des villages amérindiens du Haut-Maroni. (Texte Sandrine Chopot, Photo Mathieu Delmer)

Mardi 13 septembre, jour de la St Aimé. Au petit matin, le Dr Romain Blaizot, dermatologue spécialiste en pathologies tropicales à l’hôpital de Cayenne et responsable de la lutte anti-hansénienne (lèpre), accompagné d’une équipe médicale, s’apprête à partir en mission durant trois jours, pour atteindre un des villages les plus isolés de Guyane : Antecume-Pata. « Nous réalisons plusieurs missions régulières sur Camopi, Saint-Georges de l’Oyapock, Maripasoula, Saint-Laurent du Maroni. Ces missions médicales financées par l’ARS, effectuées pour le compte de l’hôpital de Cayenne, ont pour objectif de réduire les inégalités aux soins médicaux. Tous les trois mois, une mission médicale se rend à Taluen, sur le Haut-Maroni. Je n’avais pas eu l’occasion de retourner à Antecume-Pata depuis 2020. Dorénavant nous avons prévu de venir tous les trois à six mois », explique Romain Blaizot.

« Ces missions médicales dans les villages les plus isolés, financées par l’ARS et effectuées pour le compte de l’hôpital de Cayenne, ont pour objectif de réduire les inégalités aux soins médicaux. »

Soigner au plus près de la population

Après 50 minutes de vol entre Cayenne et Maripasoula, tout commence au dégrad de Maripasoula, commune au cœur du Parc amazonien de Guyane, face au Suriname, lieu névralgique pour rejoindre les villages construits en bord du Haut-Maroni. L’équipe médicale charge douze kilos de matériel sur la pirogue en bois. Le piroguier fait chauffer le moteur. C’est parti pour trois heures d’aventure. « Nous sommes accueillis par la fille d’André Cognat, figure emblématique du lieu, décédé l’année dernière. Grâce au travail des médiateurs sur place, notre arrivée est annoncée auprès de la communauté et notre planning de RDV est ficelé », ajoute le médecin.

« Certains passent leur vie à porter des manches longues pour cacher un eczéma alors qu’un traitement classique permet de faire disparaître les lésions. »

Le lendemain matin, c’est la fête artisanale au village, les patients ne se bousculent pas, tandis que l’après-midi bat son plein. « Nous avons effectué 20 consultations. Faute de temps, nous faisons essentiellement du curatif. Nous avons deux profils de patients. Ceux qui souffrent de douleurs chroniques et qui ont un suivi particulier et ceux qui consultent pour la première fois. On observe surtout des pathologies infectieuses mais aussi plus classiques comme la gale, l’eczéma, le psoriasis. Le plus souvent, les personnes n’ont pas vu de dermatologue depuis un certain temps et les pathologies évoluent. Certains passent leur vie à porter des manches longues pour cacher un eczéma alors qu’un traitement classique permet de faire disparaître les lésions ».

Pour aider les familles à se soigner certains médicaments/traitements sont délivrés gratuitement. « C’est le cas, par exemple, de la gale. Le prix du flacon est à 15 euros. Nous le remettons gratuitement aux familles ce qui leur permet de traiter l’ensemble de la literie, le hamac. Nous évitons ainsi que la gale ne se propage dans tout le village. Pour certaines pathologies, la délivrance d’une ordonnance est nécessaire. Dans ce cas, les personnes vont se fournir à la pharmacie la plus proche à Maripasoula », précise le médecin. 

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Sentiment d’utilité

« La dermatologie traite des maladies visibles. Une fois que les personnes sont guéries, elles sont reconnaissantes envers leur médecin, contrairement à d’autres disciplines médicales où les maladies sont moins visibles », souligne le médecin. Aller porter des soins vers les populations qui en ont besoin, recevoir un accueil chaleureux des familles, des chefs coutumiers, découvrir des us et coutumes différents, sont des moments forts et hors du commun. « J’ai une affinité particulière pour les cultures amérindiennes et un grand sentiment d’utilité lorsque j’interviens auprès des populations isolées. C’est aussi un exercice dermatologique intéressant sur le plan professionnel car de nombreuses pathologies tropicales sont présentes sur le territoire », conclut Romain Blaizot. 

Jeudi matin, au chant du coq, c’est déjà l’heure de repartir. Ballotée par les rapides, l’équipe médicale fait une halte à Taluen, où une journée de consultation est organisée, avant de regagner Cayenne et défaire son paquetage avant la prochaine mission aux quatre coins de la plus grande région de France. 

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