Toute entreprise désireuse d’utiliser une partie de l’espace public pour son activité doit se soumettre à des règles. Maître Jean-Marc Deraine, avocat spécialisé en droit des affaires, fait le point sur la législation en la matière. (Texte Adeline Louault, Photo Lou Denim)

Qu’est-ce que le domaine public ?

Selon l’article L. 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques : « le domaine public (…) est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public ». Parallèlement, l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit que : « Les biens des personnes publiques mentionnées à l’article L. 1, qui relèvent du domaine public, sont inaliénables et imprescriptibles ». L’inaliénabilité a pour conséquence d’interdire de se défaire d’un bien du domaine public, de manière volontaire ou non, à titre onéreux ou gratuit. L’imprescriptibilité fait, quant à elle, obstacle à ce qu’une personne publique puisse être dépossédée d’un bien de son domaine public du seul fait de sa détention prolongée par un tiers.

« Une Autorisation d’Occupation Temporaire (AOT) devient une obligation pour le propriétaire et pour l’occupant dès lors que l’usage est exclusif, continu et excède le droit d’usage. »

Quelles sont les modalités pour sécuriser l’occupation commerciale du domaine public ?

L’activité commerciale sur le domaine public, compatible avec son affectation, est en principe libre sauf si elle porte atteinte à l’ordre public. Mais une Autorisation d’Occupation Temporaire (AOT) devient une obligation pour le propriétaire et pour l’occupant dès lors que l’usage est exclusif, continu et excède le droit d’usage (CGPPP, art. L. 2122-1). L’ordonnance n° 2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques a posé le principe d’une procédure de sélection et de publicité préalablement à la délivrance des autorisations d’occupation du domaine public dès qu’il s’agit « d’occuper ou d’utiliser le domaine public en vue d’une exploitation économique » (CGPPP, art. L. 2122-1-1) . Les exigences sont toutefois assez souples. En effet, l’autorité compétente « organise librement » la procédure de sélection pour autant qu’elle présente « toutes les garanties d’impartialité et de transparence » et comporte « des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester ». Les conventions d’occupation du domaine public doivent par ailleurs revêtir un caractère écrit.  

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Quelle est l’évolution récente de la législation en la matière ?

La loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 dite Loi PINEL relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises reconnaît la possibilité d’exploiter un fonds de commerce sur le domaine public (à l’exception du domaine public naturel). En effet, selon le nouvel article L. 2124-32-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, « un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l’existence d’une clientèle propre ». La faculté de disposer d’un fonds de commerce pose évidemment la question de sa valorisation et donc de la possibilité de le céder. La cession supposera que l’acquéreur demande par anticipation à l’autorité administrative une AOT pour l’exploitation du fonds (CGPPP, art. L. 2124-33), la loi envisageant également le sort de l’AOT en cas de décès de la personne exploitant le fonds de commerce (CGPPP, art. L. 2124-34). L’Administration ne perd pas pour autant la possibilité de refuser la délivrance de la nouvelle AOT demandée, mais l’on constate que son pouvoir d’appréciation est plus encadré. Par ailleurs, la loi PINEL a instauré un dispositif de présentation d’un successeur pour les titulaires d’une AOT dans une halle ou un marché, en cas de cession de son fonds (CGPPP, art. L. 2224-18-1). 

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