Nos territoires permettent-il d’envisager tous les parcours ? La rédaction fait un zoom sur des carrières d’ultramarins capables d’interroger et d’inspirer la jeunesse. Ce mois-ci, Garry Weishaupt, du Centre National d’Études Spatiales (CNES), est le responsable de la sécurité des systèmes d’information au Centre spatial guyanais (CSG). (Texte Karollyne Hubert)

Quel a été votre parcours académique et professionnel ?

Après l’obtention d’un BAC scientifique à l’externat Saint Joseph de Cluny de Cayenne, je suis parti à Paris pour une licence en informatique plutôt orientée programmation à l’Université Paris-Diderot. Ensuite, j’ai poursuivi un cursus de Master en Sécurité des Systèmes d’Information et de Communication à l’université de Metz. A mon retour au péyi en 2012 en tant que consultant, le marché local n’était pas du tout prêt à ce type de services. Heureusement, le CNES au CSG m’a permis de trouver ma place chez moi. J’y travaille depuis huit ans, depuis trois ans je suis responsable de l’antenne de sécurité des systèmes d’informations.

« Il faut s’assurer que l’information soit sécurisée au bon niveau pour préserver les intérêts de l’organisation et en garantir la survie et la pérennité. »

Quand on entend parler du Centre Spatial, on ne pense pas d’emblée aux métiers de la cybersécurité…

Et pourtant, les métiers dans la sécurité de l’information sont indispensables dans toutes les structures, publiques ou privées. La sécurité de l’information doit être distinguée de la sécurité informatique qui renvoie plutôt à des aspects purement techniques. La sécurité de l’information assure que l’information soit protégée à tout moment : stockée sur un ordinateur, envoyée par mail, échangée sur des réseaux ou sauvegardée sur un disque dur externe etc. Il faut s’assurer que l’information soit sécurisée au bon niveau pour préserver les intérêts de l’organisation et en garantir la survie et la pérennité.

« Je ne lutte pas contre un hacker armé de mon clavier, mais je tente de mettre tout en œuvre pour éviter cette attaque et, si elle devait survenir, pour en limiter les impacts. »

Le cinéma fait souvent rimer “cybersécurité” avec espions et secrets d’états… En réalité, à quoi correspond la sécurité de l’information ?

(sourire) C’est surtout un terme commercial, ça revient à parler de la sécurité de l’information tout simplement. Pour avoir une idée concrète, quand un projet démarre au CSG, celui qui en a la charge ne sait pas quel mécanisme de sécurisation mettre sur le système, car ce n’est pas son domaine. Et c’est à moi de sécuriser ce projet à travers différents moyens techniques, organisationnels, juridiques, en sensibilisant les équipes… Je ne lutte pas contre un hacker armé de mon clavier, mais je tente de mettre tout en œuvre pour éviter cette attaque et, si elle devait survenir, pour en limiter les impacts. Au quotidien, c’est beaucoup moins sexy que dans James Bond.

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Vous enseignez aussi à l’IUT de Kourou, et vous avez notamment créé une association pour sensibiliser les jeunes à ce métier…

Étudiants en master, nous avions la chance de pouvoir échanger avec certains enseignants dans des cadres moins formels qu’une salle de cours. Ils évoquaient alors des aspects très concrets du monde du travail ou des difficultés que nous rencontrerions une fois diplômés. Ce discours vrai et sincère, je l’applique constamment avec mes élèves aujourd’hui afin de créer un climat de confiance qui facilite la transmission de connaissances et l’échange.

Par ailleurs, au vu du manque de sensibilisation aux problématiques « cyber », avec des amis nous avons créé cette année l’association CLUSIR (Club de la Sécurité de l’Information en Réseaux) Guyane qui va nous permettre de mener plusieurs projets en 2023.

« Nous sommes constamment sollicités, car il n’y a plus un seul métier sur la base qui n’ait besoin de système informatisé pour sécuriser ses données et actions. »

Quel impact ce type de métier peut-il avoir sur la vie personnelle ?

Je mentirais si je disais que mes journées ne sont pas très chargées, autant physiquement que mentalement. Nous sommes constamment sollicités, car il n’y a plus un seul métier sur la base (climatisation, équipements électriques…) qui n’ait besoin de système informatisé pour sécuriser ses données et actions. Par ailleurs, la banalisation du télétravail nous oblige tous à une vigilance et une surveillance accrue… Raisonner constamment en termes de gestion de risques déteint sans doute sur le quotidien, nous rendant plus prudent, réfléchi et méthodique, certaines mauvaises langues diront même un “brin parano” (rires).

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