Fruit d’une bataille acharnée, l’implantation d’un cyclotron en Martinique est une victoire sans précédent en matière de lutte contre le cancer. Le premier institut caribéen d’imagerie nucléaire (ICIN) devrait accueillir ses premiers patients d’ici juin. 

Par Sarah Balay

« On rattrape notre retard et on a une longueur d’avance (1) », se réjouit le professeur Karim Farid, chef du pôle médecine nucléaire du CHU de Martinique. Avec la création de son Institut caribéen d’imagerie nucléaire (ICIN), la Martinique dispose désormais d’un outil de dépistage, de diagnostic et de suivi thérapeutique des cancers, classé au top 10 mondial. Un juste retour des choses après 25 ans d’attente et un combat de longue haleine. 

Implanté sur le site de l’hôpital Pierre-Zobda Quitman à Fort-de-France (à côté du CHU), cet institut, qui devrait recevoir ses premiers patients en juin, a nécessité un investissement de 63 millions d’euros financés par les Fonds européens, la collectivité territoriale de Martinique et l’Agence régionale de santé (ARS). Objectifs : améliorer la prise en charge des patients martiniquais (1 640 cas de cancer par an), devenir un centre de référence mondial et faire rayonner la Martinique dans la Caraïbe.

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L’ICIN : des projets de recherche 

L’ICIN regroupe des équipements de pointe parmi lesquels un cyclotron moyenne énergie (18Mev), un TEP-IRM, deux TEP scanner dont un « grand champ », une gamme caméra hybride, deux caméras type CZT pour la cardiologie, deux échographes et deux salles d’efforts. « Peu de centres dans le monde disposent de TEP grand champ (un seul en Europe, un seul aux USA, trois en Chine et un au Japon) et de TEP-IRM », explique Stéphane Berniac, directeur adjoint du CHU de Martinique. « Nous espérons que les projets de recherches utilisant ces équipements, très rares sur les différentes applications cliniques de nos thématiques, seront d’une grande valeur scientifique ».

Aux côtés de l’ICIN se trouveront un laboratoire d’anatomie cytologie pathologique (ACP) (diagnostics de tumeurs et des maladies de cause inflammatoire, dégénérative, vasculaire, métabolique ou infection ainsi que des malformations) et une unité de préparation des médicaments injectables et chimiothérapie. 

« Ce qui nous différencie des autres centres, c’est le principe du “one stop shop” », poursuit Stéphane Berniac. « À savoir, proposer de réaliser un maximum d’examens d’imagerie en un seul déplacement du patient. »

(1) La Guadeloupe dispose d’un centre d’imagerie moléculaire depuis 2017 mais de moins grande envergure

Le cyclotron
Il s’agit d’un accélérateur circulaire de particules qui permet de produire des isotopes radioactifs servant à la médecine, comme le FDG (sucre fluoré) utilisé dans le dépistage du cancer. Une fois injecté dans le corps, ce produit va se fixer sur les cellules de la tumeur et/ou sur ses métastases mises en évidence et détectées par le Tep-Scan

Des retombées économiques non-négligeables 
L’ICIN devrait générer la création de plus de 40 emplois dès son démarrage, l’accueil des chercheurs et de doctorants internationaux et le développement de projets de recherche développement et innovation (RDI) avec un partenariat intégré avec la société caribéenne d’imagerie nucléaire. Les retombées indirectes seront surtout visibles dans le secteur du tourisme médical avec la création d’une nouvelle filière (soins, hébergement, restauration, etc.), mais aussi dans celui de la formation (nouveaux parcours d’études supérieures). 

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