Pour Ovide Carindo : “FÒ nou mété lanmou adan tou sa nou ka fè”

Ovide Carindo - Credit Photo Adéola Bambé
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En investissant la collection permanente du MACTe, le danseur et chorégraphe Ovide Carindo fait la démonstration que “l’amour qui nous lie est plus fort que tout”.

Texte Jacques Dancale – Credit Photo Adéola Bambé

Les ambitions de Ovide Carindo

“Men fô nou pé palé dè doulè annou an dot mannyè.” Il ne s’agit pas de nier l’histoire ou les réalités, mais au contraire d’avoir une approche plus profonde, plus dense. Sublimer la réalité passe aussi par l’expression de notre humanité. En investissant la collection permanente du MACTe, le chorégraphe Ovide Carindo convoque non pas les esprits mais une mémoire du legs de nos aînés qui au-delà de leurs sacrifices, de leurs souffrances nous ont livré des clefs pour comprendre et surmonter les souffrances et préserver le beau. “Sé on nanm a lanmou an santi adan le MACTe, une essence que je cherche à restituer. L’amour au sens le plus noble entre un homme et une femme, entre les générations, entre humains tout simplement. L’amour qui nous lie est plus fort que tout.”

Plusieurs tableaux permettront de restituer les différents états et étapes de la “relation dansée” avec les êtres et les éléments. Une forme d’animisme consistant non pas à rechercher dieu mais l’essence de la nature, la puissance des éléments. Ce qui paraît mystique tient à l’énergie des éléments constamment invoquée et évoquée. “Lalin ka kléré” symbolise pour lui cette immersion maîtrisée, une approche avec de la profondeur mais sans agression surfaite.

“J’ai toujours travaillé la danse profonde, dans l’esprit du Krump, avec un investissement total du corps, une expression multidimensionnelle qui permet de vivre chaque partie du corps comme un instrument, donnant l’impression d’un démembrement permanent, chaque membre paraissant indépendant.” Ovide offre ainsi une écriture surprenante où le regard se perd entre les lignes de forces et les énergies tantôt éparpillées tantôt consolidées.

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Pour Ovide Carindo : Lanmou avè dyèz é ganm

Ils seront quatre danseurs en scène pour une performance unique, un dialogue qui tire sa matière brute dans la réalité de tous les jours, dans les désaccords, dans la vie, les divergences, les disputes, mais aussi et surtout la puissance de l’affection et de l’amour qui permet de tout reconstituer. “Men sé on lanmou an tout jan, exprimé avec élégance, avec dyèz, avè ganm, paskè sa ka rété bèl”. L’écriture chorégraphique pour cette performance offrira une autre lecture, une inversion des codes établis pour un voyage inédit.

Le concept “Lalin ka kléré” initié par Laurella Yssap-Rinçon est une autre façon de vivre l’exposition permanente. Les artistes sont invités à faire dialoguer leur création avec l’exposition permanente. Ovide trouve dans “Lalin ka kléré” une liberté pour expérimenter et explorer avec audace dans des champs ouverts, pour conjuguer danse et écritures scéniques. Pour accompagner ce voyage, le chorégraphe a choisi une orchestration à son image, oscillant entre le profond et le léger, la terre et l’air, le dur et le souple, des éléments toujours entrelacés, entremêlés, représentés par des percussions pour l’ancrage et des airs de flûtes pour l’élévation, et parfois sans doute le contraire. Une musique qui colle à Lanmou an tout jan.

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Bio express
Du groupe Karibana à la compagnie Alvin Ailey en passant par des collaborations avec le danseur et chorégraphe Romuald Seremes, Jean Nanga dit Monk ou Léna Blou, Ovide Carindo n’a cessé de s’enrichir de ses expériences. Lauréat de plusieurs bourses d’études, le jeune Ovide s’est très tôt révélé un surdoué de la danse et de l’expression corporelle. Un talent et un feu à toute épreuve, qui l’aidèrent à se remettre d’un grave accident de la route. Marqué par cet épisode douloureux et 5 années en suspens, Ovide embrasse fustige tous les enfermements et puise à toutes les sources qui irriguent notre peuple, l’Afrique et l’apport précolombien qui vibre ici même, sous nos pieds et devant nos yeux dans Lalin ka kléré.