Quelle économie d’avenir pour les territoires antillais ?
Comment penser ou repenser notre économie alors que la crise sanitaire nous laisse encore dans l’incertitude plus d’un an après ses débuts ? La rédaction a tenté de répondre à la question.
Que se passera-t-il au sortir de la crise sanitaire ?
C’est la première question qui vient à l’esprit. Retrouverons-nous une vie normale ? La fameuse « vie d’avant ». Rien n’est moins sûr.
Et pour cause, à en croire Willy Angèle, l’ancien président du Medef Guadeloupe, nos territoires seront bientôt confrontés à une « crise économique de mutation ».
Cette dernière pourrait se traduire par un arrêt de la « perfusion gouvernementale » ou même une incapacité de la part de l’État à venir combler les déficits liés notamment à une saison touristique blanche.
Rien de neuf sous le soleil, le tourisme est l’un des secteurs phares de nos territoires. Il représente plus de 10 % du PIB aux Antilles contre 7,5 % en métropole. La perte de chiffre d’affaires est estimée à 50 % par les professionnels du secteur en Guadeloupe selon l’IEDOM.
Mais est-ce à dire que ce secteur doit être celui sur lequel se reposent nos territoires ? La situation inédite dans laquelle nous sommes ne nous invite-t-elle pas à nous penser différemment ?
Rebondir après la crise
« La vraie question c’est : quel développement économique pour nos territoires ? Le tourisme est une des activités intéressantes mais plus que le tourisme, je pense que ce qu’il faut pour développer nos territoires c’est arriver à les structurer pour qu’ils soient des lieux intéressants à vivre », décrit Willy Angèle.
Le concept ainsi décrit est celui de « smart territories » ou de « smart island ». Un territoire agréable à vivre, à créer, qui attire à la fois les hommes, les capitaux et les connaissances.
Il est le fruit du concept anglo-saxon de « Smart City », lui-même apparu dans les années 80. Il s’est d’abord développé en Asie, à Singapour, notamment, avant de gagner le continent européen.
Il s’appuie sur des outils technologiques de gestion de la data et doit permettre de répondre à des enjeux sociaux et sociétaux contemporains : rendre les villes moins consommatrices en énergie, moins génératrices de déchets, plus organisées, plus sûres et agréables à vivre pour tous.
Vers des territoires plus intelligents
Un territoire attractif a ainsi géré ses problématiques liées à l’eau, l’électricité, aux déchets, la connexion au monde en termes d’aéroport, de port mais aussi en terme numérique. Il faut également un site universitaire sur lequel on peut développer des compétences.
Dans un premier temps, l’idée était d’irriguer la ville d’intelligence artificielle, en autonomisant de manière progressive des processus de gestion dans les domaines des transports ou encore de l’eau.
Face à cette « ville connectée » un second mouvement émerge ces dernières années. Il vise à remettre au centre des préoccupations, les finalités de l’action publique locale et l’innovation sociale, plutôt que de considérer que le progrès technologique pourra seul répondre aux différents enjeux.
Les collectivités sont alors de plus en plus à l’écoute des citoyens et des acteurs socio-économiques, via un renforcement de la participation citoyenne et l’ouverture des gouvernances territoriales.
Le but étant d’améliorer l’adéquation des projets aux besoins et d’augmenter l’engagement des citoyens et des parties prenantes.
Il s’agit là de mobiliser l’intelligence collective des territoires, dans une approche globale et non plus sectorielle.
Pour tendre vers ce type d’économie sur nos territoires, devrions-nous revoir nos modèles économiques ?
« Notre modèle économique n’en est pas vraiment un. On se contente du recyclage des transferts publics dans la consommation depuis la départementalisation. »
« Même si celle-ci a eu du positif en matière d’aménagement du territoire de 1955 à 1981, date de la décentralisation, à savoir le transfert de compétences de l’État aux collectivités territoriales », lance Willy Angèle.
Mais aujourd’hui, cela ne semble plus suffire. Les transferts publics s’amenuisent, l’État se désengage de l’aménagement du territoire et l’économie de transformation des transferts publics en biens de consommation s’essouffle.
Les collectivités territoriales doivent assainir leurs finances pour porter les aménagements du territoire. Des défis de taille que nos territoires semblent en mesure de relever, aidés par les déclinaisons Outre-mer du plan de relance mis en place par le gouvernement pour faire face à la crise.
Ainsi, les rénovations des réseaux d’eau et des bâtiments publics, mais aussi la transformation agricole, les mesures sociales et l’accélération des infrastructures routières font partie des principales déclinaisons régionales du plan de relance, qui représentent 1,5 milliard d’euros, sur les 100 milliards du plan.